GUILLAUME Paul (né en 1878) est l'auteur de l'Imitation chez l'enfant (1925); La formation des habitudes (1936); La Psychologie de la forme (1937) ; Introduction à la psychologie (1942).
Publié le 21/10/2012
Extrait du document
«
BLANCHOT Maurice (né en 1907) « Q.u'en est-il de l'art? » De l'homme, si la littérature est possible? L'œuvre
- si consciente - de Maurice Blanchot
est la vie même de cette interrogation;
à travers le récit et l'étude critique, et par la reprise incessante de ses propres
thèmes, la recherche progresse vers le lieu
de la contradiction essentielle où l'art - le langage lui-même -a son origine,
et qu'il a pour tâche d'indiquer.
« L'œuvre est en souci de l'art ...
, elle
devient le souci de sa propre origine », qui exprime à la fois la certitude heureuse du commencement et la proximité redou table du séjour désolé et sordide « où sans cesse être se perpétue sous l'espèce
du néant ».
Dans l'art, l'homme rz.sque son droit au monde, à la vérité, à · a
mort : expérience radicale, qui contredit
à l'histoire et au travail
du temps, à
l'œuvre elle-même, et par laquelle l'homme
est lié à la répétition et à
la mort.
(Thomas 1 'obscur, L'arrêt de mort, Faux-pas, La part du feu, L'espace littéraire.) ( H.D.)
KARL BARTH ET LA THÉOLOGIE
BARTH Karl (né en 1886) Karl Barth, le plus illustre des théolo
giens actuels de la Riforme, est un Suisse alémanique à l'allure paysanne,
plein de sève et d'humour, grandfumeur de pipe et d'ailleurs parfaitement exempt de toute sujfisance doctrinale.
Né à
Bâle, il fait des études de théologie pour entrer en 191 1 dans la carrière
pastorale.
La pensée riformée de l'époque
est fortement teintée de libéralisme mo derniste; la critique « scientifique >> des textes a entamé l'assurance dogmatique,
et beaucoup de protestants sont tentés de se limiter à une action humanitaire.
Le jeune pasteur Barth se rallie au socia lisme; il n'oubliera jamais cette pre mière orientation de son apostolat.
Mais sous la pression de la première guerre mondiale, il entreprend une méditation
personnelle de la Bible d'où sortira le Commentaire de 1 'Epître aux Romains ( 1918), qui, en quelques
années, rendra son auteur célèbre dans
l'univers chrétien.
Karl Barth sera appelé à enseigner dans les universités
allemandes à partir de 192 1, à Goettin
gen, puis à Münster et à Bonn.
Il publie
alors de nombreux ouvrages, en parti culier Parole de Dieu et parole humaine ( 1928) et entreprend la
mise au point d'une monumentale Dog matique.
Mais il se heurte au régime
hitlérien, dont il dénonce avec vigueur le paganisme et le nihilisme foncier, ce qui lui vaut d'être expulsé d'Allemagne en 1935.
Il r~oint alors l'université de Bâle, où il enseigne toujours, et d'où il exhorte les chrétiens de l'Europe à la résistance contre l'oppression nazie -
tout en gardant vis-à-vis du communisme russe une attitude nuancée où se retrouve son souci de justice sociale.
Le caractère essentiel de l'attitude bar thienne est sans doute la redécouverte de l'élément religieux à l'état pur, dans la confrontation de l'homme et de Dieu.
Or, ce rapport est disproportionné : selon la formule de Kierkegaard, l'un des maîtres de Barth, il y a une diffé rence qualitative infinie entre le temps et
l'éternité.
La condition humaine a été si radicalement faussée par la chute,
qu'aucun effort humain de sagesse, de piété ou d'ascèse ne peut rétablir l' équi libre.
Seule la grâce qui vient de Dieu, de par son ifficacité souveraine, opère le salut du crl!)lant.
La Révélation est
l'événement de la toute-puissance divine
intervenant pour sauver ce qui était perdu.
Prendre au sérieux la Révélation, c'est reconnaître
que seule peut être retrouvée la
brebis égarée, qui jamais par ses propres moyens ne se serait tirée de sa détresse.
Tel est le point de départ de la théologie dialectique : elle procède par un retournement du pour au contre, la grâce intervenant pour lever la con tradiction insoluble dans l'humain.
Le salut ne peut être qu'au-delà du désespoir : il est fiducialis desperatio sui, selon le mot de Luther.
Cet antihumanisme, fidèle à
la tradition
calvinienne, discrédite par avance toutes
les tentatives de conciliation : la religion
instituée comme la piété sentimentale
sont des pièges où se corrompt l'obéis sance de la foi.
L'idée d'une philosophie
chrétienne est une contradiction dans les
termes, et la théologie elle-même en tant que discours sur Dieu succombe d'ordi
naire à la tentation de renverser les rôles en mettant Dieu à la raison.
Non que la théologie, en tant que témoignage de la Parole et témoignage à la Parole du Dieu vivant, soit inutile; elle est à la
fois nécessaire et impossible.
La dogma tique a pour tâche la simple critique et
correction du témoignage rendu par
l'Eglise à la seigneurie du Christ.
Mora lisme, quiétisme, orthodoxie, libéralisme,
autant de diformations trop humaines de la vérité chrétienne, qui demeure en son essence l'actualité même de la Révélation, en laquelle le Dieu caché se fait présent pour le salut de la con science fidèle.
En cet instant, l'eschatologie se réalise, ici et maintenant, dans cette situation-limite où tout est sauvé parce que tout est perdu.
L'affirmation de Barth se situe dans le prolongement d'une des lignes
maftresses de la spiritualité chrétienne.
Ce pessimisme actif est ,celui de saint Paul, d'Augustin, de Luther, de Calvin, de Pascal, de Kierkegaard et de Dos toïevski, en accord avec eux tous sur le thème qui est l'un des maîtres mots de la Riformation : Soli Deo gloria.
GEORGES GUSDORF
TEILHARD DE CHARDIN (Le R.
P.
Pierre) (1881-1955)
Le Père Teilhard de Chardin, né à
Orcines et mort à New York, a laissé
à travers une série d'opusculeset d'articles
(dont beaucoup sont encore inédits) une œuvre remarquable par le souci scien
tifique et par la hardiesse théologique.
Parmi ses écrits on peut citer : Le Phéno mène humain; Le Rebondissement
humain de 1 'évolution et ses consé quences; La Structure phylétique du groupe humain; Le Cœur de la Matière, et de nombreux essais parus
dans diverses revues scientifiques.
Pour T.
de Chardin, l'Evolution est bien plus
qu'une hypothèse : elle apporte la seule perspective susceptible de dévoiler le sens de l'histoire du Monde.
Toute l'œuvre de T.
de Chardin tend à dégager ce sens, et,
dans le cadre de la philosophie cosmique
ainsi constituée, à dijinir la place et le but du « phénomène humain ».
Deux
lois capitales expriment pour lui le sens de l'Evolution universelle : la loi de complexité/conscience, d'abord, c'est à-dire la tendance de la nature à construire des molécules de plus en plus
grandes et de mieux en mieux organi sées, depuis les corps simples et les virus jusqu'aux êtres vivants supérieurs
et conscients; la loi de céphalisation,
ensuite, qui permet de dijinir avec précision
comment s'opère ce progrès.
La Matière, la Vie, la Conscience sont des étapes qui
marquent le déploiement de l'Evolution,
et l'homme, loin d'être un simple acci dent, en représente le sommet.
Toutefois
la science positive ne saurait se borner à
constater; elle permet également des extra polations.
Et d'abord l'idée de l'Evolu
tion continuée.
L'apparition de l'homme,
loin de signifier la fin de l'Evolution, n'en
est qu'un « rebondissement », le plus
extraordinaire.
En apportant la r4flexion, l'homme ouvre une nouvelle voie à l'Evolution qui,
d'aveugle, devient consciente de soi et acquiert le pouvoir de se diriger elle même.
Aux yeux de Teilhard l'homme se trouve ainsi placé à la tête de l' Evolu tion, avec la charge de continuer et
d'achever la Cosmogénèse.
Hominisation
et personnalisation, tel est le double but
poursuivi par l'Evolution, si on refuse
d'accepter la possibilité d'un avortement
absurde du Monde.
Ce n'est pas l'homme
individuel qui est ici en cause, mais
l'humanité dans son ensemble, et Teilhard ne peut envisager pour l'Evolution
d'autre terme qu'un état d'Union
Parfaite
où les êtres humains, tout en épanouissant leur personnalité, finiront
par se r~oindre.
Ce point terminal que le Père appelle aussi le Point Oméga, marque la culmination du processus
cosmique tout entier.
Ici la foi chrétienne r~oint les suggestions de la science positive, et la pensée de Teilhard de Chardin débouche insensiblement sur une véritable eschatologie.
Ce Point
447.
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