Fiche de cours en philo : NATURE ET CULTURE .
Publié le 02/08/2009
Extrait du document
• La nature, au sens où nous la prendrons ici, désigne essentiellement tout ce qui est inné, par opposition à ce qui est acquis. • Le terme de culture possède, dans l'acception que nous retiendrons, un sens très vaste : tout ce qui est produit par l'homme dans le cadre social. • Avec les analyses de C. Lévi-Strauss (§ 3, 4, 5, 6), nous tenterons de comprendre le passage de la nature à la culture. • Néanmoins, certaines recherches récentes vont jusqu'à remettre en question l'opposition des deux termes (§ 7). • Enfin, réfléchissez bien sur culture et personnalité : c'est la culture, au sens large du terme, qui modèle la personnalité de l'homme (§ 9). • Lisez, en même temps que cette fiche, celle consacrée à «la société :« les deux fiches sont complémentaires.
«
attributs du relatif et du particulier.» (C.
Lévi-Strauss, op.
cit.)Ainsi, des règles particulières informent les phénomènes strictement humains, alors que la nature renvoie à la pureuniversalité.
V — Le passage de la nature à la culture : la prohibition de l'inceste
La prohibition de l'inceste est, à cet égard, tout à fait remarquable.
Elle consiste en ceci que, dans toutes lessociétés sans exception, le lien sexuel avec certains parents est rigoureusement interdit.
En ceci, elle estuniverselle et semble donc renvoyer à la sphère de la nature.
Mais les règles de cette prohibition varient avec lessociétés (ce n'est pas toujours le même parent qui est interdit).
Dans la mesure où nous avons affaire, dans cedomaine, à une classe de règles variables, la prohibition de l'inceste semble un phénomène culturel.
Nous trouvonsdonc en elle une articulation tout à fait privilégiée entre la nature et la culture : elle assure le passage de l'une àl'autre.« La prohibition de l'inceste présente, sans la moindre équivoque, et indissolublement réunis, les deux caractères oùnous avons reconnu les attributs contradictoires de deux ordres exclusifs : elle constitue une règle, mais une règlequi, seule entre toutes les règles sociales, possède en même temps un caractère d'universalité.» (C.
Lévi-Strauss,op.
cit.)
VI — La culture introduit un ordre dans le désordre naturel
Avec la prohibition de l'inceste, s'inscrivent un ordre et une organisation dans un espace naturel que caractérisait ledésordre.
Là où la nature ne laissait que hasard, promiscuité sexuelle, indifférenciation, absence de discrimination,élans individuels incontrôlés (puisque non modelés par la norme), la règle introduit l'ordre.
Au désordre biologique,naturel et animal, s'oppose l'ordre humain de la culture.
La prohibition de l'inceste va réguler la cohésion du groupe àtravers un ensemble de règles, de droits et de devoirs collectifs.
Elle inaugure le règne humain et fonde l'ordre de laculture.«Si la Nature abandonne l'alliance au hasard et à l'arbitraire, il est impossible à la culture de ne pas introduire unordre, de quelque nature qu'il soit, là où il n'en existe pas.
Le rôle primordial de la Culture est d'assurer l'existence dugroupe comme groupe, et donc de substituer, dans ce domaine comme dans tous les autres, l'organisation auhasard.
» (C.
Lévi-Strauss, op.
cit.)
VII — La société, réalité primaire
Cette vision de la nature et de la culture, pour classique et fondamentale qu'elle soit, doit cependant être nuancée.Les structures élémentaires de la parenté ont été publiées en 1949 et certaines affirmations d'hier semblent avoirperdu leur évidence.La Nature est-elle véritablement absence de règles, inorganisation et indifférenciation? Ce n'est nullement sûr.
Il esttout à fait possible de constater une organisation et un ordre dans les espèces animales.
Le monde naturel et animalne se ramène nullement à un élan individuel incontrôlé, et pas davantage à la sourde violence des besoins.
Il estdéjà organisé.La société semble donc quelque chose de beaucoup plus immédiat qu'on ne le pensait.
Il n'y a pas d'un côté, l'animalet la nature et, de l'autre, l'homme et la société.
L'usage des concepts de nature et de culture reste légitime, maisle philosophe doit être extrêmement prudent dans l'utilisation de ces termes, puisque la nature animale elle-mêmen'est pas livrée au chaos.
« Si, par hasard, il nous arrivait d'oublier ou de perdre nos règles sociales, nous ne tomberions pas dans unesituation d'anomie' ou de non-société : nous retrouverions autour de nous, chez les autres animaux, un capital denormes, le modèle de différents ordres sociaux.» (S.
Moscovici, La société contre nature, 10/18 UGE, 1976)
VIII — Privilège de la culture humaine
Est-ce à dire qu'il faille mettre sur le même plan la culture humaine et les productions sociales que l'on trouve dansles espèces anima-les? Ce serait une conclusion inacceptable.
Réellement complexe par opposition aux règlesanimales, qui demeurent rudimentaires, la culture humaine est en devenir permanent.
Elle est une indéfinie conquêtehistorique.
Seul, l'homme a une histoire et une culture.
IX — Culture et personnalité
Notons, pour terminer, que la culture au sens large du terme oriente et modèle toute la personnalité de l'homme.Sociologues et anthropologues ont souligné à juste titre l'existence d'une personnalité de base dans chaque société,minimum psychosocial commun à tous les individus d'une même culture.
Chaque culture, de par ses impératifs et sonsystème d'éducation, est en mesure de créer une certaine contexture psychologique et sociale.
«Ainsi, chaque culture...
refoule, inhibe, favorise, surdétermine l'actualisation de telle ou telle aptitude, de tel traitpsychoaffectif, fait subir ses pressions multiformes sur l'ensemble du fonctionnement cérébral, exerce même deseffets endocriniens propres et, ainsi, intervient pour coorganiser et contrôler l'ensemble de la personnalité.» (E.Morin, Le paradigme perdu : la nature humaine, Le Seuil, 1973)
Conclusion.
Illusions et dangers de l'ethnocentrisme.
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