Fiche, Bergson, Introduction à la métaphysique - Bergson, La pensée et le mouvant
Publié le 31/10/2023
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«
Bergson, La pensée et le mouvant
Introduction à la métaphysique :
Il y a une différence radicale entre deux modes de connaissance : l’analyse et l’intuition.
L’analyse est une façon de connaître les choses se bornant à les observer de l’extérieur, d’un
point de vue particulier, et ne parvenant, de ce fait, à n’en saisir que des signes qui ne lui
appartiennent pas en particulier mais qui au contraire l’identifient avec de nombreuses autres
choses.
Cette connaissance, en plus d’être particulière, est donc aussi généralisante, et ne pourrait
prétendre à connaître l’essence des choses.
L’intuition, qui ne doit pas être perçue comme une sensibilité mystique, mais bien comme un
mode de connaissance réel et authentique, cherchera au contraire les caractéristiques des choses
dans les choses elles-mêmes, parvenant ainsi à en rendre l’essence, c’est-à-dire le trait qui les
particularise absolument de toute autre chose, en plus de proposer un discours objectif, car déyaché
de tout point de vue.
Bergson prend appui sur la littérature : la description d’un personnage, si polyphonique et
approfondie soit-elle, ne nous fournira que des symboles, que des généralités qui ne feront que
tourner autour de ce personnage, qui pourra nous apparaître plus connu, mais que nous ne
percevrons jamais vraiment dans sa particularité.
Au contraire, l’identification au personnage
permet bien de le connaître de l’intérieur.
Tandis que l’analyse propose un rapprochement infini (au sens du mauvais infini) à son
objet, l’intuition revendique une certaine simplicité dans son approche (attention à la caricature
cependant).
La science est par nature cette connaissance passant par l’analyse, essayant toujours,
par la multiplication des catégories, par le rapprochement toujours plus ramifié de ses objets entre
eux (pensons en cela aux ramifications des espèces en biologie, et des différents attributs de ces
espèces permettant une telle catégorisation), de définir son objet sans jamais y parvenir.
La
métaphysique, elle, devrait être le terrain de l’intuition, puisqu’elle a pour but d’aller au cœur des
choses.
C’est « la science qui prétend se passer des symboles ».
Or, c’est en essayant de comprendre le temps/la durée que cette différence se fait le plus
sentir.
La métaphysique cherchera à connaître le réel comme il est.
Or celui-ci est en perpétuel
mouvement, et tout change, dans ce flux ininterrompu que l’on appelle « durée ».
La durée est donc
l’objet métaphysique privilégié, puisque c’est à partir de lui que toute chose dévoile son essence
(intéressant : peut-on encore parler d’« essence », comme fait Bergson, quand il s’agit d’un
devenir?).
La science, elle, s’en branle royalement, n’arrive pas à saisir cette durée car elle ferme
tout, du fait de l’analyse, dans des catégories figées.
Ainsi, elle segmente partout la durée, et y voit
une ligne fixe (v spatialisation du temps chez Bergson) toujours décomposable, dans le but de
l’analyser, justement.
Si la science et toute connaissance non-métaphysique agit de la sorte, c’est d’abord pour des
impératifs pratiques (pas au sens kantien, rassurons-nous) : le langage, qui ne fonctionne que par
segmentation du réel en unités minimales de sens (morphème dans la théorie linguistique), tandis
que la réalité c’est une gerbe continue ; la liberté, puisque sans distinction des objets, il n’y a pas de
distinction de cause et d’effet (mais seulement la fameuse gerbe sans causalité), donc on ne peut pas
se définir comme la cause de tel effet, donc on n’est pas libre ; pour prévoir, donc pour agir.
La métaphysique, alors, se définit d’abord par son caractère désintéressé, puisqu’elle évacue
de la connaissance toute donnée subjective pour aller au cœur de l’objet, or faire ce geste si
sympathique qu’est une connaissance de l’essence d’une chose, ça sert à que dalle.
Le drame est cependant double : d’un côté la science, à part quelques rares anomalies, ne
s’est jamais intéressée à la durée (Bergson cite Galilée comme étant un des rares matheux à s’être
intéressé au mouvement réel) : mais ce n’est pas si grave, me direz-vous, car c’est dans la nature de
la science de procéder par analyse (incapable de saisir la durée) et non par intuition (capable de
saisir la durée)...mais en fait c’est quand même un peu grave, on verra pourquoi après.
De l’autre
côté, et là c’est la catastrophe, la métaphysique a toujours procédé par analyse, en ne s’essayant
jamais à aller dans les choses pour les comprendre.
C’est pourquoi la durée n’a jamais été un objet
philosophique proprement compris.
Cela a plusieurs implications.
D’abord, pour la science, c’est qu’elle tourne autour de ses
objets depuis belle lurette quand même, sans jamais les saisir.
Le problème n’étant pas tant le fait de
vouloir atterrir sur des concepts (les concepts sont le résultat d’une connaissance par analyse, figés
et maladroits), mais bien celui de vouloir d’emblée définir ces concepts, pour ensuite déterminer
une essence.
Dans le cas précis de la durée (qui n’est pas vraiment un cas précis, puisqu’il
détermine tout en fait), l’analyse a conduit a d’abord segmenter le temps en plusieurs moments,
comme une multitude de perles sur un même fil (image de Bergson au cas où), et ensuite de
considérer, que par un collage artisanal, en considérant ce fil sur lequel pendaient tous ces moments
réunis, on avait trouvé là le temps qui s’écoule, si bien que la durée devenait un assemblage
impossible d’une multiplicité de moments (perles) et....
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