Faut-il vouloir la paix à tout prix ?
Publié le 19/09/2005
Extrait du document
Alain pensait que c'était moins les intérêts que les passions qui étaient à l'origine des guerres. On peut en effet composer avec des intérêts, mais on ne discute pas avec des passions. Celles-ci révèlent l'impuissance de l'esprit et l'inutilité du bon sens, puisque le désir de paix, qui tient d'abord de la raison, ne résiste jamais à la violence de leurs assauts. S'il en est ainsi on comprendra que la raison ne puisse suffire à impulser la volonté de rendre la paix durable, voire perpétuelle, comme le désirait Kant. Aux passions qui la menacent, ne faudra-t-il pas opposer l'obstination passionnelle de la vouloir inconditionnellement, c'est-à-dire à tout prix, même au prix de la vie que Jaurès lui sacrifia un soir d'été 1914 ?
La volonté pacifiste se trouve aux prises avec des difficultés. faut-il au nom de la paix laisser se perpétrer des massacres ? N'y a-t-il pas des cas où la guerre semble juste ? On pense aux guerres de libération ou encore aux mouvements de résistance armée contre l'envahisseur.
- I - Fragilité de la paix
- II - Le Devoir de faire la paix
- III - Guerre et paix dans la servitude
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Il semble, de toute évidence, que la paix sociale est souhaitable.
En effet, le conflit nous apparaît comme le témoignaged'une animalité intolérable de l'homme qui n'assume pas ses pulsions.
Toutefois, est-il si évident que la société puisseopérer la convergence des intérêts particuliers ? Notre répulsion à l'égard du conflit se heurte à une autre évidence quinous porte à reconnaître que chacun cultive une identité et une culture propre.
Autrement dit, nous pouvons nousdemander à quel prix la paix sociale est souhaitable, et dans quelle mesure la vouloir à tout prix ne conduit pas à nier lesdifférences constitutives de l'individualité.
Proposition de plan
1.
Ia.
Il semble naturel de penser que la définition de la société comme ensemble d'individus vivant ensemble sur unmême territoire semble appeler l'idée d'une paix en tant qu'état de non conflit permettant à chacun de vivre en toutesécurité.
Ib.
De plus, la vie commune des individus se réalise selon un certain nombre de normes et de codes partagés ethistoriquement déterminés qui permettent à des relations de confiance de se créer et à une civilisation de voir le jour.
Ic.
Enfin, ce n'est que par la paix que se développent un esprit commun et une identité collective par lesquels l'humanitéprogresse.
2.
IIa.
Néanmoins, cette analyse omet les raisons des divergences entre les individus.
La paix sociale (comme celle queconnaissent les démocraties contemporaines fondées sur l'égale liberté des individus) correspond également à un état quiexige des individus qu'ils adoptent des comportements policés, et qu'ils se plient aux règles politiques qui définissent lesmodalités de leurs existences.
IIb.
Dès lors, ce n'est plus tant à chacun de s'accorder avec autrui, qu'à la puissance publique de déterminer des règlesqui s'imposent aux individus.
D'où le risque que les individus se renferment sur eux-mêmes au point de mettre en péril nonseulement la paix, mais plus profondément tout esprit de sociabilité (égoïsme propre à la tendance individualistemoderne).
IIc.
Dès lors, la paix sociale risque de conduire progressivement les individus à s'abêtir et devenir des objets manipulables,au point qu'à un faux état de paix risque de s'articuler une nouvelle forme de despotisme.
3.
IIIa.
En ce sens, l'entretien de conflit ou de rivalités sociales (comme celles liées aux différentes idéologies, ou auxdifférents modes de vies) permet de penser que la confrontation entre des points de vue contradictoires entretient enmême temps la richesse et le dynamisme d'une société.
IIIb.
Il ne s'agit pas bien sûr de faire l'apologie de la lutte sociale et de la cristallisation des antagonismes, mais de penserque le maintien des différences et des divergences est souhaitable dans certaines limites (puisqu'il faut se rappeler que laguerre radicale du chacun contre chacun ruine toute sociabilité et toute vie décente et proprement humaine).
IIIc.
Dès lors, loin d'être une fin en soi ou un état toujours désirable, la paix sociale peut apparaître comme dangereuse,et ne doit pas être considérée comme l'objectif unique de la vie sociale, puisque c'est à ce prix que risque de s'imposerune pensée unique..
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