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Faut-il vivre comme si nous ne devions jamais mourir ?

Publié le 08/04/2004

Extrait du document

Ils ne savent pas ce qui les attend et craignent confusément que des souffrances terribles ne leur soient infligées, peut-être en punition de leurs actes terrestres. Les chrétiens, par exemple, imagineront que quiconque à mal agi et n'a pas obtenu le pardon de Dieu ira rôtir dans les flammes de l'enfer. La peur de la mort a partie liée avec les superstitions religieuses dont la métaphysique matérialistes nous libère. De plus, si tout dans l'univers n'est fait que de matière, si nous, comme tous les êtres vivants, ne sommes que des agrégats d'atomes, lorsque nous mourons, ce ne sont que nos atomes qui se séparent, qui se désagrègent, ce n'est que notre corps qui se décompose, en un point d'abord (celui qui est blessé ou malade), puis en tous. Dès lors, rien de notre être ne survit, il n'y a rien après la mort, « la mort n'est rien pour nous «. Ceux qui pensent que la vie du corps, la pensée, la sensation, le mouvement viennent de l'âme, et que cette âme pourrait survivre après la mort du corps, ont tort. Car l'âme elle-même est faite de matière, certes plus subtile, puisque invisible ; mais si elle n'est qu'un agrégat d'atomes, elle aussi se décompose lorsque la mort survient, et même, selon l'expérience la plus commune, il faut penser qu'elle est la première à se décomposer puisque le mort apparaît immédiatement privé de vie, de sensation, de pensée et de mouvement, alors que le reste de son corps semble encore à peu près intact et mettra plus de temps à commencer à se décomposer. Aussi, la mort se caractérise bien en premier lieu par l'absence de sensation : « Habitue-toi à la pensée que le mort n'est rien pour nous, puisqu'il n'y a de bien et de mal que dans la sensation, et que la mort est absence de sensation. « En effet, les sensations que nous avons de notre corps et, à travers lui, des choses du monde sont la source de toute connaissance, et aussi de tout plaisir et de toute douleur, donc le vrai lieu de tout bien et de tout mal, puisque le bien réel n'est que le plaisir et le mal la douleur. Nous pouvons désigner la pensée d'Epicure comme un sensualisme qui fonde toute la vie intérieure sur la sensation.
  • Analyse du sujet
  • Faut-il... ? : la question est posée en termes d'exigence, d'impératif. Nous n'avons pas à nous interroger sur une possibilité, mais sur une nécessité. Mais qu'est-ce qui peut justifier un tel impératif ? • Le comme si renvoie au caractère imaginaire et hypothétique de la proposition qui suit. Il ne s'agit pas de faire de la science-fiction (de nous croire soudain immortels), mais d'occulter ce que nous savons être notre lot à tous. • Pour bien vivre, devons-nous anéantir la perspective de la mort, l'oublier volontairement et faire comme si elle ne nous concernait pas ? 
  • Identification de la problématique.
  La question met en cause la position morale de l'homme face à sa propre mort. Doit-il vivre en ignorant la mort ? Mais ce serait reconnaître alors que l'idée de la mort est un obstacle au « bien-vivre «. L'homme doit-il céder à l'illusion de l'immortalité pour vivre en paix, ou trouver au contraire dans la méditation de la mort le secret de son existence ?


« comme un sensualisme qui fonde toute la vie intérieure sur la sensation.

La mort étant la disparition dessensations, il ne peut y avoir aucune souffrance dans la mort.

Il ne peut pas y avoir davantage de survie dela conscience, de la pensée individuelle: « Ainsi le mal qui effraie le plus, la mort, n'est rien pour nous, puisquelorsque nous existons, la mort n'est pas là, et lorsque la mort est là, nous n'existons plus.

» La mort ne dépend pas de nousL'heure de notre mort nous est inconnue.

La mort ne dépend pas de notre choix sauf peut-être dans lesuicide.

C'est pourquoi il ne faut pas s'en soucier comme le disait Épicure.

Ce qui dépend de nous, c'est devouloir vivre, d'aimer, agir, comme si la vie ne devait jamais finir.

Il nous faut vivre comme des immortels pourl'éternité.

[Le fait que nous devons mourir est ce qui donne tout son sens à l'existence humaine.

La mort fait partie de la vie.

Elle nous force à donner un sens à notreexistence, à nous interroger, à créer, à nous sentir solidaires des autres hommes.

Sans la mort, nous serions irresponsables et vains.] La mort fait partie de la vieC'est parce que la mort, comprise comme néant, nous dévoile l'absurdité de la vie, que cette dernière pourraêtre authentiquement vécue, dans la conscience et la révolte : « Il s'agissait de savoir si la vie devait avoirun sens pour être vécue.

Il apparaît ici au contraire qu'elle sera d'autant mieux vécue qu'elle n'aura pas desens.

Vivre une expérience, un destin, c'est l'accepter pleinement [...].

Vivre c'est faire vivre l'absurde.

Lefaire vivre, c'est avant tout le regarder.

Au contraire d'Eurydice, l'absurde ne meurt que lorsqu'on s'endétourne.

L'une des seules positions philosophiques cohérentes, c'est ainsi la révolte [...] Cette révolte donneson prix à la vie » (A.

Camus, Le Mythe de Sisyphe, Gallimard, coll.

Idées, pp.

76-77).

Ainsi, c'est dans lesentiment de notre finitude et la capacité que nous avons de faire face à notre propre mort que nous puisonsla force et l'énergie de vivre pleinement et authentiquement la vie qu'il nous est donné de vivre, car « la viede l'esprit n'est pas la vie qui s'effarouche devant la mort et se préserve pure de la décrépitude, c'est aucontraire celle qui la supporte et se conserve en elle» (Hegel, Phénoménologie de l'esprit, p.

48, trad.

J.-P.Lefebvre). Notre temps est limitéComme l'explique Sartre, la mort marque en effet la limite absolue denotre être et de nos possibilités.

Notre temps est limité, ce qui nousoblige à faire des choix et à prendre des engagements.

Celui qui selaisse bercer par l'illusion de l'immortalité risque de ne jamais rien faire,et donc de ne pas exister véritablement.

Etre immortel serait êtrecondamné à une vie d'ennui et d'inaction.

C'est la conscience que nousavons de la mort qui nous pousse à agir, à...

vivre. La mort donne un sens à la vieToute entreprise est un acte par lequel ma vie empiète sur l'avenir.

Eneffet, toute action suppose une médiation, un travail, un effort, unepersévérance.

Or si la mort est l'horizon et le terme de touteanticipation, si toute anticipation me convertit à la mort en metournant vers le futur, je ne puis échapper à la perspective de la mortqu'en cessant de me porter au-delà du présent : mais du même couptoute entreprise me devient impossible.

Or, si je n'entreprends plus rien,si je refuse de me donner un avenir pour ne pas être déterminé àconsidérer la limite de cet avenir, peut-on encore dire que je suisvéritablement vivant ?C'est un double écueil qu'il nous faut éviter : d'une part l'oubli de notrecondition, d'autre part le refus de tout avenir.

Il s'agit de vivre comme si nous étions immortels, non pas en s'imaginant immortels ; ce n'est pas un éloge de l'illusion : il me fautsavoir que je suis mortel, mais mener une vie divine comme si j'étais immortel.

Ainsi, toute oeuvre d'art, toutegrande entreprise a l'éternité comme condition.

Il faut donc que je ne me laisse pas déterminer par lacondition mortelle, il faut vouloir pour l'éternité.. »

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