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Faut-il travailler pour être heureux ?

Publié le 19/09/2005

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Se partager les tâches est une entraide comme cela se pratique le plus couramment du monde dans les familles. Mais dans les familles, on distribue avec justice les biens selon les besoins, non selon une hiérarchie arbitraire des savoirs. Rendre joyeuse la vie est un service; rendre la vie intense, ardente, belle par la réflexion et les illustrations humaines de la perfection constitue également un service, un don à autrui pour sa sauvegarde et son salut. Tel est le lien entre travail et art.   [Le travail n'échappe jamais aux impératifs de la nécessité. Il relève du domaine de la contrainte et de la peine. Si cette contrainte n'est pas dictée par la nature, elle est dictée par des impératifs sociaux.] La condamnation au travail Dans la Bible le travail est considéré, après le péché originel, comme une pénitence. Au paradis terrestre, l'homme et la femme « gardai[en]t et cultivai[en]t le jardin » sans aucune peine, mais avec joie et délectation. Ne pas travailler, dans les sociétés juive et chrétienne, a longtemps été regardé comme une grâce divine; mendier pour étudier comme les moines, s'exposer à la mort comme les guerriers, étaient les activités nobles et libres.

« Kant affirme la positivité du travail pour trois raisons : 1.

Dans la perspective d'une philosophie de l'histoire, l'impossibilité de vivre sans travailler apparaît comme le moyenpar lequel la Providence assure le développement des facultés humaines.

Sans cette nécessité vitale, jamaisl'espèce humaine n'aurait été contrainte au progrès.

(« Il lui faut beaucoup de préparation...

») 2.

Dans une perspective métaphysique, le travail apparaît comme le moyen pour l'homme d'échapper à l'ennui.L'ennui tient à l'absence de sens, le travail est ce qui permet à l'homme de donner un sens à sa vie.

Les distractionsfont passer le temps, le travail, lui, donne un sens au temps humain.

(« L'ennui les eût torturés.

») 3.

Dans une perspective anthropologique, le travail est le moyen de mieux jouir de la vie.

Si le plaisir est absence dedouleur, on ne jouit vraiment du repos qu'après un effort ! (« Que le meilleur repos soit pour lui celui qui suit letravail.

»). Freud considère qu'il est possible, grâce à lui, de sublimer les pulsions sexuelles.

Ainsi, l'artisan qui donnenaissance à un objet satisfait autant son esprit que ses sens.

Il féconde la matière et il accouche d'une oeuvresortie de ses mains. "Nous croyons qu'il est au pouvoir du travail scientifique de nous apprendre quelque chose sur laréalité de l'univers et que nous augmentons par là notre puissance et pouvons mieux organiser notrevie." Freud, L'Avenir d'une illusion, 1927. Le travail intellectuel est un facteur de progrès pour l'espèce humaine.

Il permet à l'homme de développer sessens, son intelligence, d'acquérir des savoirs.

Sans la connaissance théorique des lois de la gravitation, aucunenavette spatiale n'aurait pu décoller.

En ce sens, le travail scientifique nous donne sur la nature un pouvoirmais aussi une responsabilité, car il oriente le développement des sociétés.

On voit très clairement aujourd'huique les déséquilibres économiques entre le Nord et le Sud de la planète reposent en partie sur les possibilités,pour certains pays et non pour d'autres, de développer les connaissances fondamentales en physique, enbiologie, en mathématiques. Pour être heureux, il faut se libérer de la nécessité• « Celui qui ne travaille pas ne mangera pas », a écrit saint Paul.

L'homme est un être vivant qui, comme toutêtre vivant, doit satisfaire un certain nombre de besoins.

Or, la satisfaction des besoins n'est pas immédiate :une activité, donc une dépense, est requise non seulement pour boire et manger, mais aussi pour se procurerles biens nécessaires.

J.

Locke justifiait la propriété par le travail : dans l'état de nature, le simple geste decueillir un fruit confère un droit à celui qui l'accomplit car ce geste est un travail. • Les besoins ne constituent pas un domaine établi une fois pour toutes, ils changent avec l'histoire et lasociété.

D'une manière générale, le développement économique élargit le domaine des besoins si bien que lanécessité du travail, loin de disparaître avec les progrès techniques, est sans cesse réaffirmée. L'animal se contente de vivre.

Le propre de l'homme est de refuser ce «minimum vital».

Voilà qui fait saparticularité.

En travaillant, il se libère peu à peu des nécessités naturelles.

N'étant plus directement soumis àses instincts, l'homme peut s'élever au-dessus de sa condition première et s'occuper du monde qui estvéritablement le sien, à savoir le monde de l'esprit. Le travail est la réalisation de l'espritHegel a longuement développé cette idée: l'histoire de l'humanité est l'histoire de l'esprit qui, sans en avoirconscience, transforme la nature, se projette dans ses oeuvres, puis comprend que tout ce qui est réel estidentique à tout ce qui est rationnel, c'est-à-dire à tout ce que l'esprit peut concevoir.

Grâce au travail,l'homme se sent partout chez lui.. »

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