Faut-il toujours lever les masques ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
«
que par aucun des autres sens.
Tout homme peut voir ; mais il est donné à très peu d'hommes de savoir rectifierles erreurs qu'ils commettent par les yeux.
On voit aisément ce qu'un homme paraît être, mais non ce qu'il estréellement ; et ce petit nombre d'esprits pénétrants n'ose contredire la multitude, qui d'ailleurs a pour elle l'éclatet la force du gouvernement.
Or, quand il s'agit de juger l'intérieur des hommes, et surtout celui des princes,comme on ne peut avoir recours aux tribunaux, il ne faut s'attacher qu'aux résultats ; le point est de se maintenirdans son autorité ; les moyens, quels qu'ils soient, paraîtront toujours honorables, et seront loués de chacun.Car le vulgaire se prend toujours aux apparences, et ne juge que par l'événement.
»
Une première compréhension du masque envisage celui-ci comme une illusion volontairement mise en place parcelui qui le porte, afin de séduire, d'exercer un pouvoir - y compris, comme dans le texte de Machiavel quiencourage le culte de l'apparence à des fins de pouvoir, un pouvoir politique.
Le masque est donc considéré icicomme une déformation, dont il faut peut-être se méfier.
Il est bénéfique pour celui qui le porte, mais il entraînedans l'erreur ceux qui le voient et choisissent de s'y fier.
* Il faut lever les masques pour connaître la réalité
Platon, Banquet
« Alcibiade - Pour louer Socrate, mes amis, j'aurai recours à des comparaisons : Socrate croira peut-être queje cherche à faire rire, mais ces images auront pour objet la vérité, et non la plaisanterie.
Je dis d'abord queSocrate ressemble tout à fait à ces Silènes qu'on voit exposés dans les ateliers des statuaires, et que les artistesreprésentent avec une flûte ou des pipeaux à la main : si vous séparez les deux pièces dont ces statues secomposent, vous trouvez dans l'intérieur l'image de quelque divinité.
Je dis ensuite que Socrate ressembleparticulièrement au satyre Marsyas.
Quant à l'extérieur, Socrate, tu ne disconviendras pas de la ressemblance ;et quant au reste, écoute ce que j'ai à dire : N'es-tu pas un railleur effronté ? Si tu le nies, je produirai destémoins.
N'es-tu pas aussi joueur de flûte, et bien plus admirable que Marsyas ? Il charmait les hommes par lapuissance des sons que sa bouche tirait de ses instruments, et c'est ce que fait encore aujourd'hui quiconqueexécute les airs de ce satyre ; en effet, ceux que jouait Olympos, je prétends qu'ils sont de Marsyas, son maître.Or, grâce à leur caractère divin, ces airs, que ce soit une artiste habile ou une méchante joueuse de flûte qui lesexécute, ont seuls la vertu de nous enlever à nous-mêmes et de faire connaître ceux qui ont besoin des initiationset des dieux.
La seule différence qu'il y ait à cet égard entre Marsyas et toi, Socrate, c'est que, sans le secoursd'aucun instrument, avec de simples discours, tu fais la même chose.
Qu'un autre parle, fût-ce même le plushabile orateur, il ne fait, pour ainsi dire, aucune impression sur nous ; mais que tu parles toi-même, ou qu'unautre répète tes discours, si peu versé qu'il soit dans l'art de la parole, tous les auditeurs, hommes, femmes,adolescents, sont saisis et transportés.
»
« Lever les masques » signifie ici « dépasser les apparences » : c'est ainsi seulement que l'on peut connaître laréalité d'une personne - il en va ainsi de la beauté de Socrate qui se cache sous la laideur de son visage.Reconnaître les qualités réelles d'une personne suppose alors de regarder au-delà du masque - masque cettefois involontaire - qu'il porte.
Cette démarche vaut aussi pour le cas des masques volontaires, qui cachent laréalité.
* L'important n'est pas de lever les masques, mais de savoir reconnaître leur statut de masques..
»
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