Faut-il se méfier des images ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
L’ensemble des choses que l’on peut appeler image est très vaste : un tableau, un dessin, une photographie, mais aussi une cartes géographique, une caricature, un schéma, une radiographie médicale. Quel est leur point commun ? Tous sont images de quelque chose : ils dérivent d’une réalité qui leur est extérieure et à laquelle ils sont inféodés. Puisque l’image est une réalité seconde, dérivée d’une réalité première dont elle est l’image, on peut se demander si elle est bien fidèle à cette réalité. Peut-on, en regardant l’image, apprendre quelque chose sur la réalité ? les images ne déforment-elles pas la réalité, ne serait-ce que parce qu’elles l’extraient un détail du contexte global dans lequel il prend sens ?
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contraire en parlant son langage propre.
L'image représentative assume son caractère d'image.
On retrouvecette conception de la connaissance par la représentation dans deux tableaux de Vermeer : Le Géographe et L'astronome représentent tous deux un érudit assis à son bureau ; derrière lui une fenêtre par où rentre la lumière.
Cette fenêtre donne donc sur le monde sensible, sur la réalité.
Mais ni le géographe, ni l'astronomene se tournent vers cette fenêtre, tous deux étudient le monde, mais en se recroquevillant sur lareprésentation qu'ils en ont sous les yeux, l'un sous forme de carte astrale, l'autre de globe.
La réalité, pourêtre comprise doit être étudiée non pas directement, mais par le biais d'une représentation ordonnée.
C.
Le modèle épistémologique ainsi présenté doit beaucoup à la chambre noire, qui se répand alors et illustre parfaitement l'isolement du sujet pensant par rapport au monde qu'il étudie.
La chambre noire est unevéritable pièce, dans laquelle un sujet entre.
Cette chambre est absolument noire, à l'exception d'un petit trou par lequel passe un rayon de lumière.
Sur le mur du fond, l'image inversée du monde apparait.
Lachambre noire, connue pour les son utilisation par les peintres, est avant tout un modèle épistémique quisymbolise l'isolement du sujet.
L'image du monde devient alors plus fiable que le monde lui-même, car l'imagepermet au sujet de ne pas être pris directement dans le monde, elle permet le recul nécessaire à la réflexion.De plus, l'image isole, organise, trie les données foisonnante du monde qui nous entoure.
Elle devient un outilde connaissance par excellence.
Transition : d'un côté, nous avons donc l'image imitatrice, de l'autre l'image représentative.
Pourtant, dire qu'il y aurait de bonnes et de mauvaises images ne suffit pas, il convient plutôt de comprendre quel est le rapport del'image à la réalité qu'elle figure, et comprendre pourquoi la notion d'imitation s'accorde avec celle d'illusion.
III. Les images ont une portée subversive.
A.
L'image, parce qu'elle est elle-même une réalité, un objet, est comme un double du réel qui s'insère dans le réel.
Or, elle nous montre que si l'on peut imiter à la perfection, l'imitation devient falsification, uneimitation parfaite ne montre que le modèle lui-même n'a rien de naturel, mais est bel et bien artificiel.Bergson, dans Le Rire écrit que l'on ne peut imiter quelqu'un qu'en ce qu'il a en lui-même de mécanique : ses tics de langage, ses gestes.
Ce qui est imitable est toujours artificiel.
B.
Un billet de banque par exemple peut être imité à la perfection, il suffit pour cela que le faussaire soit en possession des technologies les plus abouties.
Il est possible de fabriquer un billet de banque parfait, etcelui-ci aura alors la même valeur qu'un billet authentique (au sens d'artificiel).
Par contre, on ne peutfabriquer de l'or, on peut toujours l'imiter, mais aucun moyen technologique ne permet d'en créer.
Or, si l'onpeut imiter un billet de banque, en faire la réplique parfaite, c'est justement parce que le billet de banque n'aen lui même aucun valeur, tandis que l'or, si.
C.
Judith Butler, dans son ouvrage intitulé Trouble dans le genre, pour un féminisme de la subversion consacre le dernier chapitre aux actes performatifs de genre (c'est-à-dire du féminin et du masculin) et plusparticulièrement aux travestis.
L'homme qui se déguise en femme à force de maquillage, d'habit, de coiffure,de gestuelle et d'effets de voix parvient à avoir une véritable image de femme.
Or, ce qui provoque le« trouble » au sein des catégories de genre, c'est qu'en parvenant à imiter à la perfection une femme, letravesti montre que l'original lui-même n'est qu'un artifice.
Il montre que tout ce que nous plaçons sous lacatégorie « femme » dépasse très largement des attributs sexuels biologiques, et que toutes cescaractéristiques, parce qu'elles sont imitables, ne sont pas elles-mêmes des originaux, mais sont socialementconstruit.
La méfiance envers les images vient donc avant tout de leur capacité à subvertir la réalité, à enmontrer tout l'artifice.
Ce qui est imitable à la perfection n'est pas authentique et naturel, mais construit etmécanique.
ConclusionOn a coutume de dire qu'il faut se méfier des images, que les photographies journalistiques par exemple peuventêtre non seulement truquées, mais aussi et plus simplement, qu'elles peuvent suggérer quelque chose qui n'est pasvrai.
Pourtant, les images permettent aussi une confrontation avec la réalité qui, parce qu'elle impose une distanceentre le sujet et la réalité elle-même, offre au sujet la place et le temps de la réflexion là où le réel qui le happel'embarque dans la tourmente des événements.
La question de savoir si l'on peut se fier aux images renvoie à unequestion bien plus importante encore : faut-il se fier à la réalité ? Cette réalité, quelle est-elle ? Et en quoi la réalitéest-elle vraiment autre chose qu'une image primitive ? Entre Judith Butler et Platon, il y a finalement beaucoup depoint communs, puisque tous deux ont insisté sur le rapport complexe, subversif, illusoire et falsificateur qui liel'image à son original..
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