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Faut-il se méfier de la multiplicité des interprétations ?

Publié le 26/01/2004

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: celui de l'auteur, celui de l'interprète. Todorov "Connaître c'est toujours entrer en relation avec quelque chose... que les choses puissent avoir une nature en soi, indépendamment de l'interprétation et de la subjectivité, c'est une hypothèse parfaitement oiseuse; elle supposerait que l'interprétation et la subjectivité de sont pas essentielles, qu'une chose détachée de toutes ses relations est encore une chose... Le caractère interprétatif de tous les phénomènes choisis et groupés par un être qui les interprète." Nietzsche Heidegger La « philosophie » est dans la nécessité constante de justifier son existence devant les « sciences ». Elle pense y arriver plus sûrement en s'élevant elle-même au rang d'une science. Mais cet effort est l'abandon de l'essence de la pensée. La philosophie est poursuivie par la crainte de perdre en considération et en validité si elle n'est science. On voit là comme un manque qui est assimilé à une non-scientificité. L'Être en tant que l'élément de la pensée est abandonné dans l'interprétation technique de la pensée.

L’interprétation est un jugement non sur des faits mais sur du sens, sens d’éléments langagiers (mots, textes) ou plus largement signifiants : expressions corporelles, œuvres d’art, ou n’ayant pas nécessairement été produits avec une intention signifiante, mais dont on peut considérer qu’ils en sont néanmoins porteurs : événements historiques ou d’actualité par exemple, conduites, voire phénomènes naturels. C’est une notion extrêmement large puisque elle touche aussi bien à l’art, au langage à la psychanalyse et peut même  entremêler ces dimensions. De là découle une certaine difficulté quant à la définition de ce que recouvre la possibilité d’une bonne interprétation face notamment au foisonnement des sens possible. En effet du côté de la multiplicité on a tendance à mettre le relativisme, c’est-à-dire ce qui est incapable de se donner une unité, de se fonder et d’avoir une cohérence. C’est pour cette raison que l’on se méfie de la multiplicité des interprétations. Mais la multiplicité est-elle signe uniquement d’une défaillance ? Ne peut-elle pas être le signe d’une pensée qui évolue dans diverses sens, non pour s’égarer nécessairement, mais parce qu’elle doit justement se trouver dans la multiplicité du sens pour être capable de s’enrichir ? Ou comme le dit Ricœur que: « Il y a interprétation là où il y a sens multiple, c’est dans l’interprétation que la pluralité des sens est rendue manifeste «.

Soulignons en premier lieu, que devant la diversité des interprétations, on peut être tenté de craindre le relativisme, c’est-à-dire ce régime de la pensée qui autorise toutes les interprétations, et nous égare immanquablement. C’est pour cette raison que l’on cherche à instituer une interprétation unique que l’on décrète seule légitime.

Mais pour que cette interprétation ne soit pas considérée comme dogmatique ou arbitraire ne faut-il pas la légiférer la méthode interprétative  par les lois de la raison.

Seulement l’interprétation n’est pas une connaissance, elle porte en elle un caractère subjectif et relatif qui dessine certes sa limite mais instaure la possibilité pour tout interprète de s’enrichir, de dialoguer et d’éprouver sans cesse la diversité des sens ainsi que leurs foisonnements irréductibles. Si bien que l’on sera tenté de conclure, sans le déplorer, qu’il ne saurait y avoir une seule interprétation valide, et de souligner que le propre de toute interprétation est d’être limitée. Qu’est-ce à dire sinon que l’instrument de l’interprétation est  la multiplicité ?

« Introduction : « On obtient un idéaltype en accentuant unilatéralement un ou plusieurs points de vue et en enchaînantune multitude de phénomènes donnés isolément, diffus et discrets, que l'on trouve tantôt en grand nombre, tantôten petit nombre et par endroits pas du tout, qu'on ordonne selon les précédents points de vue choisisunilatéralement, pour former un tableau de pensée homogène.

On ne trouvera nulle part empiriquement un pareiltableau dans sa pureté conceptuelle : il est une utopie ».

Weber , Essai sur la théorie de la science .

Interpréter c'est choisir, c'est définir un sens qui ne se donne à lui-même en premier lieu.

Il s'agit de développer notrecompréhension du monde à partir des éléments qui nous sont donnés.

Dès lors, on peut voir tout le décalage entrel'interprétation et ce que l'on pourrait appeler l'idéal type de la vérité dans son unicité essentielle.

Or il n'y ainterprétation que s'il y a des interprétations c'est-à-dire des différents modes de compréhension d'un phénomène.Pourtant n'est-ce pas justement rater la connaissance que de multiplier les interprétations comme autant depossible sur la chose ? En effet, s'il est nécessaire d'interpréter (1 ère partie), il n'en reste pas moins que la multiplicité des interprétations semble masquer l'absence de connaissance sûre (2 nd partie), ce qui - si l'on renverse le paradigme de La Vérité – ne nous renvoie à rien moins que la vitalité du phénomène considéré (3 ème partie). I – La multiplicité nécessaire de l'interprétation a) L'interprétation est nécessaire dans nombre de domaines où la connaissance exacte est quasi impossible.

Et c'estbien ce que l'on peut voir avec Freud dans Sur le Rêve : « le rêve est un message codé venu de l'intériorité du dormeur, qu'on ne comprendra qu'en défaisant par l'analyse ce qu'a réalisé un travail inconscient ».

L'humanité atoujours accordé aux rêves un sens caché.

Les rêves assouvissent imaginairement des désirs.

Le langage du rêveest le plus souvent symbolique.

Le rêve a donc un double contenu, manifeste et latent.

Il en va de même dusymptôme névrotique.

Le superstitieux quant à lui interprète le hasard.

Il interprète quelque chose d'extérieur à savie psychique pour établir la réalité à venir.

Toutefois, l'interprétation ne peut pas prétendre à l'exactitude d'unescience dure ou du moins se rapprocher pleinement de son paradigme.

Le dévoilement de l'inconscient ici parl'interprétation psychanalytique participe à cette quête de sens sur ce qui se passe en nous.b) Néanmoins, tous les domaines sont soumis à l'interprétation et à sa diversité en tant qu'elle rend compte d'unrapport entre moi et l'autre que ce soit un sujet, un objet ou un phénomène.

Il reste un mystère que je cherche àsaisir c'est-à-dire à lui donner du sens.

Et c'est bien ce que l'on peut dire avec Merleau-Ponty dans sa Phénoménologie de la perception : « Je perçois autrui comme comportement […] Mais enfin le comportement d'autrui et même les paroles d'autrui ne sont pas autrui.

Le deuil d'autrui et sa colère n'ont jamais exactement lemême sens pour lui et pour moi.

Pour lui, ce sont des situations vécues, pour moi ce sont des situationsappréhendées.

Ou si je peux, par un mouvement d'amitié, participer à ce deuil et à cette colère, ils restent le deuilet la colère de mon ami Paul ».

La recherche du sens est donc cette quête et cette nécessité de l'interprétation.c) Et quand bien même une interprétation serait fausse ce qui sans doute ne saurait manquer face à une tellediversité, il n'en reste pas moins qu'en tant qu'elle est une proposition construite logiquement, elle exprimera un étatde la personne ou une perception personnelle du monde.

Dès lors, toute interprétation est une perspective dumonde.

Et c'est bien ce que l'on peut voir avec Wittgenstein dans son Tractatus logico-philosophique : « Une proposition fausse a un sens.

(4.021) Une proposition est une image de la réalité.

(4.022) la proposition montre lesens.

La proposition montre ce qu'il en est, quand elle est vraie.

Et elle dit qu'il en est ainsi.

(4.023) La réalité doitêtre déterminée par la proposition « oui » ou « non ».

La proposition est la description d'un état de chose.

Laproposition construit un monde à l'aide d'un échafaudage logique et c'est pourquoi on peut reconnaître à laproposition comment se comporte tout ce qui est logique, quand elle est vraie.

On peut tirer des conclusions d'uneproposition fausse.

(4.024) Comprendre une proposition, c'est savoir ce qui arrive, quand elle est vraie ».

Transition : Ainsi différentes interprétations sont possibles voire nécessaire pour rendre compte de la complexité et del'individualité de l'expérience d'un phénomène.

Néanmoins, n'est-ce pas s'éloigner de l'idéal de vérité ? II – Vérité et interprétation : les dangers de l'interprétation a) S'il faut se méfier de la multiplicité des interprétations c'est dans la mesure où elles ne donnent pas un accèsclaire à la vérité de la chose c'est-à-dire à sa nécessité comme pourrait le dire Spinoza dans son Ethique .

En effet, l'interprétation est un effet lié de la mémoire et de l'imagination qui relie des phénomènes à ce qui est déjà connu etnon pas à la réalité de la chose constatée.

Ainsi elle n'est pas une connaissance adéquate de la chose considéréeet c'est bien ce que l'on peut voir en Ethique II, 18, scolie : « Je dis, premièrement, que la mémoire est l'enchaînement de cette sorte d'idées seulement qui enveloppent la nature des choses qui existent hors du corpshumain, et non des idées qui expliquent la nature de ces mêmes choses ; car il ne s'agit ici (par la Propos.

16, partie2) que des idées des affections du corps humain, lesquelles enveloppent la nature de ce corps et des corpsextérieurs.

Je dis, en second lieu, que cet enchaînement se produit suivant l'ordre et l'enchaînement des affectionsdu corps humain, pour le distinguer de cet autre enchaînement des idées qui se produit suivant l'ordre del'entendement, d'une manière identique pour tous les hommes, et par lequel nous percevons les choses dans leurscauses premières.

Et de là nous pouvons concevoir avec clarté pourquoi l'âme passe instantanément de la penséed'une certaine chose à celle d'une autre qui n'a aucune ressemblance avec la première : par exemple, un Romain, de. »

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