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Faut-il reprocher aux mots leur ambiguité?

Publié le 22/01/2013

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Dans L’honneur d’un capitaine, film de Pierre Schoendoerffer sur la guerre d’Algérie basé sur des faits réels, un fellagha (terme désignant les opposants algériens) se fait capturer par des soldats français en haut d’une colline. Un des soldats demande alors à son capitaine, se trouvant en bas, quels sont les ordres à suivre suite à cette capture. Le capitaine répond alors : « Descendez-le. « Là-dessus, le soldat abat le prisonnier d’une balle dans la tête. Même s’il s’agit ici d’un cas extrême, ce genre de quiproquo dû à l’ambiguïté des mots n’est pas rare dans la langue française.  Mais alors faut-il reprocher aux mots cette ambiguïté ? Est-elle telle qu’elle nuit à l’accomplissement des différentes fonctions des mots, que nous définirons par la communication purement utilitaire, l’expression des passions et la formulation des pensées ? Mais avant tout, qu’est-ce que l’ambiguïté : d’après le Littré, ce qui est ambigu « est à plusieurs sens, et par conséquent d’un sens incertain «. Nous voyons que l’ambiguïté des mots commence au mot même ambiguïté : nous en avons ici deux facettes. Nous verrons donc en quoi il faut reprocher cette ambiguïté aux mots puis nous tenterons de voir en quoi cette ambiguïté n’est pas forcément répréhensible.   Avant de commencer le développement, nous pouvons noter que la problématique présuppose l’existence d’une ambiguïté inhérente aux mots, il paraît donc important de justifier ce présupposé. Pour cela nous considérerons les mots tels que le linguiste Ferdinand de Saussure les définit, c’est-à-dire constitués par deux éléments : le signifiant et le signifié, qui illustrent bien les deux facettes de l’ambiguïté. Le signifiant désigne le mot en lui-même, tandis que le signifié désigne le concept du mot. Prenons l’exemple du signifiant « avocat « : pour ce même signifiant il existe deux signifiés complètement différents, d’un côté le fruit, et de l’autre, le juriste. Cette ambiguïté du mot reflète bien la première facette de l’ambiguïté, à savoir « qui est à plusieurs sens «. Prenons maintenant un signifiant comme « arbre « : celui-ci n’a qu’un seul signifié, mais ce signifié est un concept, concept qui ne correspond à aucun arbre en particulier, celui-ci peut être grand, petit, droit, tordu etc… Ici on retrouve donc le deuxième concept d’ambiguïté, celui du sens incertain, du sens vague et imprécis du concept lié au mot.   Après avoir justifié le présupposé du sujet, nous commencerons par montrer en quoi il faut reprocher aux mots leur ambiguïté en fonction de leurs différents rôles. Le rôle le plus évident attribué aux mots est celui du rôle utilitaire de ceux-ci, c’est-à-dire de la communication au sens pratique. Pour montrer le défaut de l’ambiguïté pour cette fonction des mots, nous pouvons reprendre l’exemple du terroriste algérien qui perdit la vie à cause d’un malentendu. En effet, inutile d’expliquer que l’ordre « descendez-le « est ambiguë à cause du mot « descendre « qui signifie à la fois aller de haut en bas et abattre. Il...

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Ici on retrouve donc le deuxième concept d'ambiguïté, celui du sens incertain, du sens vague et imprécis du concept lié au mot.   Après avoir justifié le présupposé du sujet, nous commencerons par montrer en quoi il faut reprocher aux mots leur ambiguïté en fonction de leurs différents rôles. Le rôle le plus évident attribué aux mots est celui du rôle utilitaire de ceux-ci, c'est-à-dire de la communication au sens pratique.

Pour montrer le défaut de l'ambiguïté pour cette fonction des mots, nous pouvons reprendre l'exemple du terroriste algérien qui perdit la vie à cause d'un malentendu.

En effet, inutile d'expliquer que l'ordre « descendez-le » est ambiguë à cause du mot « descendre » qui signifie à la fois aller de haut en bas et abattre.

Il s'agit ici du premier concept de l'ambiguïté, celui du signifiant avec plusieurs signifiés.

Ce genre d'ambiguïté entraîne de manière évidente des problèmes de compréhension entre les interlocuteurs, nuisant à la fonction de communication des mots, et en ce sens, il est forcément reprochable : à défaut de coûter la vie d'un homme, il peut créer des situations qui pro quo, de malentendu pouvant être très gênantes, allant parfois même jusqu'à mettre des personnes en danger.

Prenons maintenant un autre exemple du rôle utilitaire des mots, celui d'une personne qui raconte un événement qu'il  a vécu à une autre personne.

Il est contraint d'utiliser les mots pour retranscrire la réalité : il dira par exemple : « à ce moment-là, une voiture verte est passée ».

La vérité est alors transformée en mots, le linguiste Benveniste dira même « re-produit » par les mots, c'est à dire recréée, ce par quoi la vérité originale se perd.

S'offre donc à l'interlocuteur une nouvelle réalité, déformée par les mots, qu'il va lui-même réinterprété à sa manière : le signifié de « voiture » est en effet un concept large, il pourra alors s'imaginer une break, un cabriolet, une voiture de ville ou de sport, idem pour la couleur verte, qu'il ne se représentera pas telle qu'elle était dans la réalité, car là encore, le signifié « vert » comprend de multiples nuances de vert toutes appelées vert.

Cette ambiguïté correspond à la deuxième facette de la définition de l'ambiguïté, et ici encore, elle est reprochable, car elle entraîne un très grand manque de précision concernant la scène, alors que le but des mots était précisément de partager celle-ci.

Au lieu d'être. »

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