Faut-il distinguer certitude et vérité ?
Publié le 14/09/2005
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«
La réponse la plus simple est celle-ci : le jugement vrai se reconnaît àses caractères intrinsèques : il se révèle vrai par lui-même, il se révèlevrai par lui-même, il se manifeste par son évidence.
C'est le point devue de Spinoza (« Ethique », II, 43).
« La vérité est à elle son propresigne » (« verum index sui »).
« Celui qui a une idée vraie sait en mêmetemps qu'il a cette idée et ne peut douter… Quelle règle de véritétrouvera-t-on plus claire et plus certaine qu'une idée vraie ? De mêmeque la lumière se montre soi-même et montre avec soi les ténèbres,ainsi la vérité est à elle-même son critérium et elle est aussi celui del'erreur.
» Pour Descartes, comme pour Spinoza, une idée claire &distincte qui apparaît évidente est une idée vraie et il n'y a point àchercher au-delà.
« Les idées qui sont claires & distinctes ne peuventjamais être fausses » dit Spinoza.
Descartes écrit de son côté : « Etremarquant que cette vérité : je pense donc je suis était si ferme et siassurée que toutes les plus extravagantes suppositions étaientincapables de l'ébranler, je jugeais que je pouvais la recevoir, sansscrupule, pour le premier principe de la philosophie….
Après cela jeconsidérai en général ce qui est requis à une proposition pour être vraieet certaine, car puisque je venais d'en trouver une que je savais êtretelle, je pensais que je devais aussi savoir en quoi consiste cette certitude.
Et ayant remarqué qu'il n'y a rien du tout en ceci : je pense donc je suis, qui m'assure que je dis lavérité sinon que je vois très clairement que pour penser il faut être : je jugeais que je pouvais prendre pourrègle générale que les choses que nous concevons fort clairement et fort distinctement sont toutes vraies.
»C'est donc dans l'intuition de l'évidence des idées claires et distinctes que Descartes situe le critère du vrai ;une perception claire de l'entendement étant « celle qui est présente et manifeste à un esprit attentif » et «distincte, celle qui est tellement précise et différente de toutes les autres, qu'elle ne comprend en soi que cequi paraît manifestement à celui qui la considère comme il faut.
» (« Principes », I, 45).
La certitude dérive d'un rapport juste entre l'esprit et la chose conçueUne idée ne serait donc pas qualifiée de « vraie » ou « fausse » en elle-même par ses caractéristiquesintrinsèques, mais seulement par sa conformité ou non à la réalité.
Les scolastiques disaient : « La vérité c'estla conformité de notre pensée aux choses » (« adeaquatio rerum et intellectus »).
L'idée vraie est celle quiest fidèle à la réalité.
De là résulte la certitude: ce que je pense ne peut pas être pensé autrement.
Si jecomprends les lois de la perspective, je ne croirai plus en la réalité de ce que je vois: la lune, qui me sembleavoir la taille d'un ballon, le bâton plongé dans l'eau, qui m'apparaît courbe.
La certitude est l'absence de doute.
Une méthode peut m'aider àatteindre le vraiL'essentiel pour atteindre la certitude d'avoir raison réside dans laméthode.
« Méthode » est un mot qui vient du grec et qui signifie àl'origine « chemin » : c'est la voie qu'on emprunte pour mener sapensée, pour ne pas s'égarer.
Si tous les hommes ont une raison égale,savent également marcher, il semble clair à Descartes que certainss'égarent, se perdent, dissipent leurs forces.
Il y a une sorted'obsession cartésienne à ne pas se perdre.
Pour un savant ou unphilosophe qui, comme lui, sort des sentiers battus et balisés de latradition, rien ne saurait être plus important que de ne pas s'égarerdans les terres inconnues à découvrir.Aussi trouve-t-on chez Descartes une magnifique définition de laméthode :« Par méthode, j'entends des règles certaines et faciles, grâceauxquelles tous ceux qui les observent exactement ne supposerontjamais vrai ce qui est faux, et parviendront sans se fatiguer en effortsinutiles, mais en accroissant progressivement leur science, à laconnaissance vraie de tout ce qu'ils peuvent atteindre.
»« Règles pour la direction de l'esprit » (IV).
La méthode garantit donc :
ï?± La certitude (l'élimination de l'erreur) ;ï?± La facilité et l'économie d'efforts ;ï?± La fécondité et l'augmentation progressive des connaissances ;ï?± La sagesse, en ce sens que l'homme qui s'y soumet atteindra la connaissance de tout ce qu'on peuthumainement savoir.
Resterait à dire pourquoi Descartes ressent le besoin de créer une méthode, applicable à tous les objets deconnaissance, après vingt-trois siècle de science et de philosophie.
La première partie du « Discours » enfournit l'explication, qui se présente comme une biographie intellectuelle.
Descartes y expose ce qui l'a pousséà sortir des sentiers battus, c'est une véritable crise de l'éducation qui est le signe d'une crise de civilisation..
»
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