Faut-il critiquer toutes les opinions ?
Publié le 16/03/2009
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Toute l'oeuvre de Platon contre les sophistes montre le caractère fugace et fugitif de l'opinion par rapport à la stabilité et à l'éternité de l'Idée. Ne reposant sur aucun fondement rationnel, une opinion peut être soit vraie (elle est donc dite droite), soit fausse. Dès lors, il paraît clair que se fier à ses opinions en toutes circonstances, et ne jamais tenter d'établir une distance critique entre soi-même et ses opinions, ne permet pas d'accéder à la connaissance et à la vérité, universelle et nécessaire. Les opinions semblent donc devoir être critiquées, et leur porter un jugement critique paraît nécessaire lorsque l'on entre en philosophie.
Toutefois, critiquer toutes les opinions, est-il légitime ? Les opinions constitue aussi toute la sagesse des nations, un ensemble de connaissances pratique héritière de l'expérience sensible. De plus, les opinions paraissent être le seul mode de connaissance possible dans certains domaines. Par exemple, en matière d'art ou de religion, chacun ne se fie-t-il pas à ses opinions ? Les critiquer toutes, sans discernement, ne serait-ce pas plonger l'homme dans un doute perpétuel voire dans le chaos ?
Dès lors, nous sommes en droit de nous demander si la recherche de la vérité passe obligatoirement par la remise en cause de toutes les opinions.
Nous verrons tout d'abord que les opinions sont à critiquer si l'on veut accéder à la vérité, et démontrerons ensuite que l'opinion a néanmoins sa place, et qu'il serait dangereux de la négliger. Enfin, pour terminer, il serait souhaitable de se demander si une éducation voire une rééducation des opinions est possible ?
I) La critique de toutes les opinions nécessaire pour philosopher.
II) L'opinion comme arme contre le dogmatisme.
III) Eduquer l'opinion.
«
sa propre expérience, c'est être capable d'agir librement, de circuler entre différents points de vue, sans êtreaveuglé par une opinion pétrie de certitude et parfois erronée.
Ainsi, l'utilisation de la propagande et de la censure,l'emprisonnement des intellectuels permettent aux régimes totalitaires "d'endormir" l'esprit critique de la population.En prônant une seule idéologie, une seule vision du monde, on empêche la population de réfléchir par elle-même eton étouffe ainsi sa liberté d'esprit.
Les opinions, n'ayant aucun fondement rationnel, semblent nuisibles dans des domaines ayant trait à larecherche de la vérité comme les sciences.
Il convient donc de les critiquer, afin d'ouvrir son esprit à autrui et de selibérer d'un point de vue erroné.
Cependant, il serait dangereux de négliger la place importante que tiennent certainstypes d'opinions dans la vie d'un être humain.
Certains types d'opinions ont leur valeur et ne sont donc pas tous à critiquer.
Nous verrons par ailleurs qu'ilest impossible de remettre en cause toutes les opinions, que certaines d'entre elles sont même nécessaires, etconstituent le seul mode de connaissance possible dans certains domaines.
Nos opinions nous viennent de nos expériences personnelles, singulières, mais on pourrait affirmer quecertaines d'entre elles sont en nous depuis notre naissance, et varient ainsi selon le milieu familial, social ou culturel.Nous acceptons automatiquement certaines opinions depuis notre petite enfance.
Nous avons déjà vu que sedétacher de ses opinions est une entreprise difficile.
Si nous considérons que certains types d'opinions sontpartagés par le plus grand nombre dans un groupe social, il paraît assez clair que tout au long de sa vie, l'homme n'apas le temps d'examiner et de critiquer systématiquement toutes ces opinions, quel que soit leur origine, en raisonde la durée relativement courte de l'existence humaine.
Remettre en cause constamment toutes les opinions, lessiennes et celles des autres, et ainsi se frayer seul un passage en vue de connaître la vérité, ne permettrait pas àl'homme de se consacrer entièrement à quoi que ce soit, et le condamnerait à un doute perpétuel, puisqu' étantincapable d'acquérir quelque certitude que ce soit, sans avoir le temps d'approfondir ses recherches.
De plus, unautre obstacle empêche la critique de toutes les opinions : les limites de l'esprit humain, ne permettant pas de toutconnaître par soi-même.
Descartes lui-même, dans sa méthode du doute hyperbolique, n'applique pas ce doute àtous les domaines, et ne le conseille pas à tout le monde.
Par "la loi inflexible de sa condition", ainsi que le formuleTocqueville dans La démocratie en Amérique , l'homme est forcé d'accepter certaines opinions communes, non vérifiables, afin d'être capable de vivre en société.
Ainsi que le dit Platon dans Menon , "l'homme qui à une opinion vraie ne le cède point à celui qui a la science".
Le savoir empirique, savoir acquis avec l'expérience, est donc ici tout aussi important que le savoirexpérimental du domaine des sciences.
Ce qui est contingent, approximatif, fluctuant, est forcément soumis àl'opinion, seul mode de connaissance possible dans certains domaines.
Effectivement, des valeurs comme la justice,la liberté, dans des domaines tels que la politique, ce qui est vrai ou faux ne saurait être déterminé parl'expérimentation scientifique.
En démocratie par exemple, le débat politique est régi par les différentes opinions.Lors d'élections, les citoyens choisissent d'élire le parti politique dont les opinions se rapprochent le plus des leurs.
Iln'y a aucun moyen scientifique de savoir quel parti est le plus proche de la vérité ; les différentes opinions seulesnourrissent les programmes politiques et la manière de diriger un pays.
Chacun a également sa propre représentationde concepts abstraits comme la justice ou la liberté, chacun s'en forge sa propre opinion, et celle-ci sera différented'un être humain à un autre, cependant il sera impossible de déterminer qui aura là-dessus l'opinion la plus "vraie", laplus "raisonnable".
L'opinion est donc ici le seul moyen de connaissance existant.
L'opinion est obligatoirement présente et nécessaire dans l'existence d'un être humain, le guidant tout aulong de sa vie.
Après avoir mené cette réflexion, nous pouvons conclure que l'opinion, bien insuffisante d'un point de vuerationnel, et ne permettant pas d'accéder de manière certaine à la vérité, joue néanmoins un rôle important dans lavie d'un homme.
Il serait même dangereux de tenter de l'éliminer, étant parfois le seul moyen d'appréhender certainsdomaines.
Finalement, nous pouvons affirmer que critiquer, au sens de porter un jugement, ne détruit pas forcémentune opinion, mais peut au contraire en faire ressortir la valeur pratique..
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