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Faut-il cher à tout démontrer ?

Publié le 03/12/2012

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     Pour répondre à cette question il semble tout d’abord légitime de nous étonner face à une ambition aussi vaste. Est-il raisonnable de donner à la recherche du savoir une telle ambition ? N’y a-t-il pas ici le risque d’une dérive dogmatique du savoir qui devrait, finalement, ne jamais suivre que le seul modèle géométrique ? Est-on en droit d’exiger que toute chose, tout domaine et même tout sujet existant soit soumis aux exigences de la démonstration ? Par ailleurs est-ce, sinon un droit, une exigence propre à la recherche de la connaissance du réel ?             D’une part il apparaît que la totalité de ce qui est ne semble pas, à première vue, requérir un travail démonstratif : ai-je besoin d’une démonstration pour dire que ce doigt est un doigt ou même pour dire qu’un doigt est plus petit qu’un autre ?             Si par démontrer nous entendons déduire, c'est-à-dire conclure une propriété d’un objet ou d’une figure à partir d’une loi ou d’un principe universel et nécessaire, alors nous sommes peut-être en droit de nous dire que nous n’avons pas besoin d’autant d’intelligence pour comparer deux doigts. Certes je peux mesurer l’un, puis mesurer l’autre, puis enfin grâce au principe d’identité et de différence de l’arithmétique, déduire que l’un est plus petit que l’autre. Mais faut-il seulement procéder ainsi ? Est-ce là une démarche raisonnable et, surtout, bien utile ? Aussi il semble déjà à première vue surprenant que l’on puisse se demander s’il faut chercher à tout démontrer.             Mais cette question est d’autant plus surprenante qu’il apparaît de surcroît que même dans les disciplines où la démonstration est une méthode incontournable, notamment en mathématiques, non seulement on prend pour point de départ des axiomes – lesquels par définition ne sont pas démontrables – mais de surcroît on finit toujours par buter sur des indémontrables : c’est le célèbre théorème de Gödel[1] selon lequel tout ce que l’on peut démontrer parfois c’est que le résultat d’un calcul algébrique est indécidable.             Mais n’est-ce pas malgré tout, ce célèbre théorème, une démonstration ? Certes, c’est une démonstration négative, mais c’est bien une démonstration. De plus ce théorème nous enseigne qu’il en va ainsi potentiellement de toute démonstration : il démontre que toute démonstration peut tomber sur des indémontrables.             Aussi si dans un premier temps il nous faudra voir dans quelle mesure la démonstration peut apparaître à bien des égards comme un modèle de savoir et de cohérence. Il apparaîtra toutefois que la démonstration elle-même permet de limiter le champ et l’étendue de la démonstration. Néanmoins c’est bien toujours au moyen d’une démonstration qu’on doit le faire. Il y a donc là une contradiction performative qu’il nous faut tenter de dépasser. Nous nous demanderons enfin dans quelle mesure toute activité humaine exige d’être justifiée et encadrée par un cadre cohérent de justification. Faut-il par exemple en politique, plutôt chercher à convaincre par des démonstrations ou plutôt chercher à persuader ?  En premier lieu, la démonstration est une nécessité afin de parvenir à la vérité. La vérité désigne la connaissance valable, qui est conforme à son objet. Or, ce qui nous détourne de penser correctement les choses, c’est l’imagination, ou encore la croyance. L’imagination déforme son...

« voir dans quelle mesure la démonstration peut apparaître à bien des égards comme un modèle de savoir et de cohérence.

Il apparaîtra toutefois que la démonstration elle-même permet de limiter le champ et l'étendue de la démonstration.

Néanmoins c'est bien toujours au moyen d'une démonstration qu'on doit le faire.

Il y a donc là une contradiction performative qu'il nous faut tenter de dépasser.

Nous nous demanderons enfin dans quelle mesure toute activité humaine exige d'être justifiée et encadrée par un cadre cohérent de justification.

Faut-il par exemple en politique, plutôt chercher à convaincre par des démonstrations ou plutôt chercher à persuader ?  En premier lieu, la démonstration est une nécessité afin de parvenir à la vérité.

La vérité désigne la connaissance valable, qui est conforme à son objet.

Or, ce qui nous détourne de penser correctement les choses, c'est l'imagination, ou encore la croyance.

L'imagination déforme son objet, et le superstitieux en fait particulièrement les frais.

La croyance repose sur la confiance que l'on a envers quelqu'un, et qui fait que l'on adhère à ce qu'il dit sans vérifier par nous-mêmes.

Or, bien que l'imagination soit « d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours », comme le dit Pascal dans les Pensées, et que la croyance puisse fort bien s'avérer vraie, la seule manière de s'assurer de la vérité d'une idée, c'est de passer par la démonstration.

Seule elle nous fait passer du probable à la certitude, en manifestant une vérité dans sa clarté et sa nécessité.

Descartes, saisissant ce privilège unique de la démonstration, dit ainsi dans les Règles pour la direction de l'esprit: « Mieux vaut ne jamais songer à chercher la vérité sur aucune chose que de le faire sans méthode ».

Outre le fait d'indiquer que seule une méthode rigoureuse permet d'atteindre la vérité, que Descartes voit idéalement dans les mathématiques - science démonstrative par excellence -, cette idée pose comme une déontologie de la science.

Si d'aventure quelqu'un cherche à connaître la vérité, il doit impérativement faire preuve de méthode, au risque de voir l'imagination et la croyance reprendre le pas sur la certitude.

Les conséquences seraient alors plus dramatiques qu'une simple ignorance.

L'ignorant ne prétend pas savoir, mais celui qui se trompe sans le savoir est d'autant plus dangereux qu'il est persuadé d'avoir raison.

Cette exigence de démonstration, que Descartes rappelle, peut déjà être observée dans la philosophie platonicienne.

En effet, à la différence des sophistes qui prétendent posséder le savoir et l'enseigner, Socrate - dans les dialogues platoniciens - avance en remettant en cause ce qui est considéré comme acquis, et donc en levant les préjugés.

Par la maïeutique,. »

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