Extrait sur "La Démocratie en Amérique", d'Alexis de Tocqueville
Publié le 05/12/2012
Extrait du document
«
Dans son entreprise analytique, Tocqueville pose de questions fondamentales sur
le régime existant en Amérique, tout en construisant des analogies importantes avec les
anciens régimes du « Vieux Monde ».
Par exemple, il s’interroge : est-ce la
démocratie, « le régime de la majorité », vraiment préférable aux autres régimes ? Prise
globalement, vaut-elle la peine quand comparée avec ces autres formes de
gouvernement ? D’ailleurs, peut-on, au fait, la comparer aux régimes qui
traditionnellement impliquent la servitude de l’homme ou du citoyen ? Si oui, quel est le
bilan final de cette étude comparative? Ces questions visent, en fin de compte, dévoiler
les avantages et désavantages de la démocratie.
Tocqueville cherche à comprendre le mieux possible la nature et le
fonctionnement de la société démocratique et comment ce système influence et interagit
avec la société des hommes, c'est-à-dire le collectif, d’une part, et l’individu, d’un autre.
La conclusion à laquelle il aboutit vise à conduire les penseurs démocratiques, surtout
ceux qui s’opposent de manière plus radical à la catégorie de despotes, à réviser une
opinion, voire même à renoncer à une de ses présupposés, à savoir : que le
gouvernement démocratique, contrairement aux despotiques, contribueraient seulement
pour libérer l’individu et l’esprit humain et que l’égalité et la liberté sont forcément plus
grandes et plus répandues dans une démocratie que dans d’autres régimes.
Une telle
idée, pour lui, risque de reposer sur des faux principes car elle ne voit pas que la raison
humaine individuelle termine pour se soumettre à une nouvelle et très puissante forme
de servitude développée dans la démocratie : celle de l’opinion publique.
Au moment que Tocqueville écrit, à l’exception des Etats-Unis d’Amérique la
plus part du monde (voire le monde tout entier) ne vit pas sous le régime de la
démocratie (ou d’une démocratie accomplie), y compris l’Europe et sa France natale.
Si,
par contre, Tocqueville prévoit une inévitable ascension de la démocratie partout dans le
futur, il veut aussi l’analyser jusqu’à ses dernières conséquences afin de la déchiffrer
entièrement et de prévenir les individus et les nations de tous ses effets, bien ou
mauvais, et en quoi elle se différencie des autres régimes (comme par exemple ceux qui
sont dirigés par des dépotes).
Le passage que nous traitons cherche de manière plus
spécifique à expliquer la nouvelle forme et nouvelle force que l’opinion commune
gagne dans les régimes démocratiques, et pourquoi, selon Tocqueville, cela n’est pas
forcement quelque chose de bien pour l’esprit humain, n’étant en fait, dit-il, qu’une
forme variée de servitude.
Critique de l’égalité : le fardeau de l’opinion publique dans une démocratie
L’égalité et la liberté institutionnalisées, To cqueville veut démontrer, ont aussi
des effets négatifs pour l’esprit et pour la raison humaine.
Le pouvoir de la majorité est
(ou peut être) lui aussi un pouvoir essentiellement despotique ou fondamentalement
tyran.
L’opinion publique, l’opinion commune, exerce un pouvoir trop grand dans la
démocratie, et cela porte des conséquences négatives sur l’individu.
Ce constat révèle la
possible contradiction de l’excellence humaine avec les idées de liberté et égalité,
contraire aux convictions des défenseurs de la démocratie.
Selon lui, l’égalité ferait l’homme surestimer le pouvoir de la raison humaine et
aller chercher ceux qui l’entourent pour trouver la vérité.
Les gens passeraient à se
douter de l’opinion d’un seul homme ou d’un seul groupe, mais seraient totalement
disposés à faire confiance à l’opinion publique, i.e.
l’opinion commune.
Puisque tous
sont considérés comme également capables de connaitre la vérité, les gens termineraient
par assumer logiquement que la vérité se trouve dans la majorité.
Même la force de la
religion, rappelle Tocqueville, est fondée principalement sur l’opinion publique..
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