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Explication du texte de Bergson : « On a rappelé que l'homme avait toujours inventé des machines .... et montre à sa sortie qu'il avait conservé son indépendance. »

Publié le 29/02/2012

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bergson

 

 

Introduction

L'objet de ce texte, ce dont il parle, ou encore son thème, c'est l'invention mécanique dans ses rapports avec la science moderne. Quelle est la nature des relations qu'elles entretiennent ? La position de l'auteur sur cette question prend le contre-pied d'une idée généralement répandue. Alors que l'on pense de manière assez spontanée, et donc irréfléchie, que la science moderne a conditionné le développement de l'invention mécanique, Bergson, dans ce texte, affirme l'indépendance de l'invention mécanique par rapport à la science moderne. Cette indépendance ne signifie pas une ignorance mutuelle et n'exclut pas la collaboration, à un certain niveau de développement réciproque. Le problème philosophique auquel le texte constitue une réponse pourrait très simplement se formuler de la manière suivante : l'invention des machines est-elle réductible à l'application de la science, ou bien faut-il supposer, à son origine, une capacité propre de l'homme indépendante de l'intelligence rationnelle et scientifique ? Si l'invention mécanique n'est que l'application des théories scientifiques, alors l'acte d'inventer perd sa spécificité. Il n'est alors guère sensé de continuer à parler d'invention. En effet nous n'avons alors affaire qu'à quelque chose qui tient davantage d'une sorte de déduction : la machine est en quelque sorte contenue à titre de possible dans les théories scientifiques ; il suffit alors de la repérer et de la réaliser, de la construire.

bergson

« naissance de la science moderne et de l'essor spectaculaire du machinisme à l'existence d'un lien de dépendance essentielleet nécessaire de l'invention mécanique par rapport à la science moderne.

Le texte s'achève sur une belle image qui illustre lapensée de Bergson : l'indépendance de l'invention mécanique vis-à-vis de la science moderne est semblable à celle du coursdu Rhône vis-à-vis du lac de Genève.

Ici comme là, nous avons affaire à une simple rencontre et à rien de plus.

Celle-ci peutporter ses fruits, se révéler féconde, mais suppose l'indépendance des deux termes.

De plus, rien ne garantit la pérennité decette collaboration Leurs cours pourraient bien se séparer dans le futur.[I] L'établissement de cette thèse passe tout d'abord par un constat empirique.

Il suffit, semble-t-il, de commencer par sereporter à un certain nombre de faits de natures diverses.

Bergson en énonce trois :l'homme a toujours inventé des machines ; l'Antiquité en a connu de remarquables ; "des dispositifs ingénieux furentimaginés bien avant l'éclosion de la science moderne et ensuite, très souvent, indépendamment d'elle." Ce dernier fait estcomplété par un constat actuel : des ouvriers parviennent à trouver des perfectionnements techniques "auxquels de savantsingénieurs n'avaient pas pensé."Ces constats ont pour fonction de plaider pour l'indépendance de l'invention mécanique.

On remarquera qu'ils ne sont pastout à fait équivalents, que c'est leur association dans ce qu'ils ont de complémentaire qui donne du poids à la thèse deBergson et qu'il n'y a donc nulle redondance.Le premier constat concerne l'homme lui-même et semble suggérer une donnée constante de la "nature humaine".

L'hommea toujours inventé des machines.

Une machine est un objet fabriqué destiné à transformer l'énergie et à utiliser cettetransformation.

Ce qui est sous-entendu, c'est que cette invention des machines est bien antérieure à l'apparition de lascience et à toute forme de spéculation rationnelle sur le monde, sur le fonctionnement des phénomènes naturels.

Avantmême de connaître le monde, l'homme semble avoir le besoin de le maîtriser et de l'utiliser à l'aide de fabricationsingénieuses.

Ce qui semble supposer une capacité, naturelle en l'homme, à fabriquer des mécanismes permettant d'utiliserles choses et d'agir sur elles en vue de la satisfaction de certains besoins (qu'on peut supposer vitaux) et de l'atteinte decertaines fins.

Si l'homme a toujours fabriqué des machines, c'est qu'il en a une capacité innée et c'est qu'il y a une tendanceen lui qui le pousse à le faire.

Ce premier fait montre que l'homme n'a pas eu besoin de connaître rationnellement lesphénomènes naturels à l'aide de lois précises et quantifiées pour inventer des mécaniques.

Il l'a fait avant que des théoriesscientifiques quelconques ne fussent à sa disposition.Le deuxième fait allégué par Bergson est historiquement précis.

Il ne concerne plus l'homme en général, en tant qu'homme,mais une période historique précise, l'Antiquité.

Si l'homme a toujours inventé des machines, certaines périodes reculées, àpropos desquelles nous avons des témoignages précis et qui sont antérieures à l'essor de la science moderne, témoignent del'existence de machines, qui plus est "remarquables".

Il faut sans doute ici entendre complexes, ingénieuses etparticulièrement bien adaptées à leur fin.

La science antique n'est pas la science moderne.

Elle n'est pas encore une sciencequantitative, expérimentale, cherchant à comprendre le comment des phénomènes afin d'acquérir une prise sur eux.

Lascience antique est essentiellement spéculative et théorique.

Elle est aussi essentiellement désintéressée.

Une tellescience, on peut penser ici à la physique d'Aristote, ne saurait déboucher sur des applications techniques ou mécaniques.

S'ilexiste bien une science dans l'Antiquité, il ne s'agit pas d'une science applicable, d'une science d'où on puisse déduire desmachines, des mécaniques.

Pourtant il en existe de remarquables durant cette période.

Elles ne peuvent donc être que leproduit d'une capacité humaine d'invention distincte des capacités intellectuelles requises par la spéculation scientifique etphilosophique.Le troisième fait allégué par Bergson joue sur l'opposition entre "ouvriers" et "ingénieurs".

On ne se situe plus au niveau depériodes historiques, mais d'individualités.

C'est un fait qui vaut aujourd'hui, c'est-à-dire pour une période qui connaît ledéveloppement de la science moderne et l'invention mécanique.

On constate une dissociation parfois entre l'inventionmécanique et la science au niveau des individus.

Ce sont parfois des individus sans culture scientifique et qui n'ont pas reçude formation théorique spécialisée qui "trouvent des perfectionnements" applicables aux machines, donc qui se révèlentcapables d'inventivité.

Preuve factuelle que la capacité à inventer ne repose pas sur des compétences théoriques acquisespar de longues études spécialisées comme peuvent être celles qui mènent au métier et au statut d'ingénieur.

L'ingénieur estcelui qui a reçu une formation censée le rendre capable d'ingéniosité, donc d'inventivité.

L'ingénieur a reçu une formationscientifique et technique qui le rend capable de mettre en oeuvre des applications de la science.

L'ouvrier est sans culturescientifique, sans connaissances théoriques pointues et approfondies, doté seulement des connaissances techniquesnécessaires à l'exécution de son travail, c'est-à-dire d'un savoir faire plus ou moins complexe et limité (on remarquera queBergson prend soin de parler de l'ouvrier et non de l'artisan ou du technicien).

Il s'agit donc d'un individu qui se contentefinalement d'exécuter un certain nombre de gestes simples au contact direct de l'outil et plus précisément ici de la machine.Cette fréquentation de la machine, par laquelle il la dirige, semble lui donner une compétence particulière, une capacitéd'invention mécanique.

C'est du moins de cette façon qu'on pourrait interpréter le texte immédiatement.

En cela oncommettrait un contresens.

Comme le confirme la phrase qui suit.

La capacité d'invention mécanique ne semble pas unecapacité acquise grâce à l'expérience et à la fréquentation des machines.

D'abord, Bergson écrit " aujourd'hui encore desimples ouvriers trouvent des perfectionnements ."Il s'agit donc de cas isolés.

Parmi la multitude des ouvriers, il y en a qui trouvent des perfectionnements.Cela semble suggérer que leur capacité de trouver des perfectionnements ne vient pas de leur pratique, elle n'est pasacquise par et grâce à l'expérience.

C'est en forgeant qu'on devient forgeron, certes, mais ce n'est pas de cela dont il s'agit ici.D'où il suit que "L'invention mécanique est un don naturel".

Si elle n'est pas acquise, en effet, ni par la pratique du métier, nipar l'étude des sciences, il reste à penser qu'elle a son origine dans une disposition particulière tenant à l'espèce, certes, mais. »

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