Explication de texte - Marc-Aurèle
Publié le 17/11/2022
Extrait du document
«
« Les gens se retirent à la campagne, au bord de la mer, à la montagne.
Toi-même, tu
as coutume de rechercher plus que tout ce genre de retraite.
Mais c’est la chose la plus
stupide qui soit, alors qu’il t’est permis, au moment que tu veux, de te retirer en toimême.
Nulle part en effet un homme ne trouve retraite plus tranquille, plus exempte de
tracas que dans son âme, surtout s’il possède les trésors intérieurs qui lui permettent,
dès qu’il s’est penché sur eux de se sentir à l’aise -par « à l’aise » je n’entends rien
d’autre qu’un ordre parfait.
Adonne-toi donc sans cesse à cette retraite et retrouve ainsi
ta vigueur […] Il ne te reste plus qu’à songer à te retirer dans ce petit lopin qui est le tien.
Et avant tout, sans tourment ni tension excessive, sois un homme libre, regarde la réalité
comme l’être viril, l’être humain, le citoyen, l’animal mortel que tu es.
Mais parmi les
choses que tu gardes sous la main, et sur lesquelles tu te pencheras, il faut ces deux
pensées : d’abord les choses extérieures n’atteignent pas l’âme, mais restent en dehors
d’elle dans leur indifférence.
Les difficultés viennent seulement de l’opinion intérieure
qu’on en a.
Ensuite, que toutes les choses que tu vois, si ce n’est déjà fait, se
changeront et ne seront plus.
Songe sans cesse à toutes les transformations auxquelles
tu as assisté.
Le monde n’est que changement.
La vie n’est qu’opinion.
»
Marc-Aurèle, Pensées pour soi, IV, 3, 1-3 et 9, traduction Dalimier revue, GF 2018,
pages 94-96
Est-il nécessaire de se retirer régulièrement dans le plus profond de notre âme,
de notre conscience ? Marc-Aurèle, dans cet extrait des Pensées pour soi, répond par
l’affirmative à cette question : il est indispensable de nous retirer dans notre conscience
afin de nous ressourcer, de mieux nous comprendre ainsi que le monde qui nous
entoure et de nous forger notre propre opinion.
Il conteste définitivement le fait de nous
appuyer seulement sur les facteurs externes, superficiels et d’oublier que la clé de
l’épanouissement personnel, c’est nous-même.
Dans ce texte, l’auteur mentionne régulièrement le mot « âme » qui lui est
synonyme de « conscience ».
Il utilise également le champ lexical de la retraite pour
souligner la rupture entre le monde extérieur et notre monde intérieur.
Il répète
également le mot « opinion » qui démontre que notre vision du monde est un facteur
qu’il est important de développer.
L’auteur, dans son texte, a recourt à l’idéalisme objectif.
L'idéalisme objectif décrit
une vision du monde dans laquelle l'être matériel est avant tout fondé sur un être
spirituel.
Même si l’humain a toujours vécu préoccupé par les choses matérielles qui
constituent son quotidien, c’est l’immatériel, c’est-à-dire sa conscience, qui devrait être
sa préoccupation première.
Est-ce que la relation que l’on a avec notre conscience est responsable de notre
développement personnel ?
Dans un premier temps, l’auteur développe l’idée selon laquelle l’âme représente
l’endroit parfait où l’on peut se ressourcer (ligne 1 à 7).
Puis dans un second temps, il
axe son argumentaire sur le fait qu’il est en notre devoir d’exercer une certaine influence
sur notre monde extérieur et non l’inverse (ligne 7 à 9).
Enfin, il aboutit à la conclusion
selon laquelle notre âme représente un parfait point d’appui dans le monde extérieur
(ligne 9 à 14).
Premièrement, l’âme représente l’endroit parfait pour se ressourcer.
MarcAurèle commence par exposer un fait général en se servant d’une énumération « à la
campagne, au bord de la mer, à la montagne » (ligne 1).
Il pose le fait que les gens se
retirent régulièrement dans des endroits isolés, comme la montagne.
De par cette
énumération de trois endroits isolés, l’auteur appuie sur le fait que les gens souhaitent et
surtout aiment s’isoler afin de se recentrer sur eux-même.
L’auteur change subitement
de cible et passe de « les gens » (ligne 1) à « toi-même » (ligne 1) : il nous inclut donc
dans cette globalité, en nous éclairant sur le fait que l’on est comme tous les autres
êtres humains sur cette Terre, on recherche « plus que tout ce genre de retraite » (ligne
2), on souhaite profondément s’isoler.
Par cette retraire et cet isolement, l’auteur nous parle implicitement de vacances
puisqu’il a cité précédemment des lieux communs de vacances comme la montagne et
la mer : l’homme s’isole donc en quête de repos.
Ces vacances, tant aimés et attendus
par chaque être humain, sont décrites abruptement par Marc-Aurèle comme étant « la
chose la plus stupide qui soit » (ligne 2).
L’auteur met ainsi le lecteur dans un état de
confrontation : l’une des choses qu’il aime le plus se voit grandement critiquée.
Juste
après cette critique, l’auteur l’explique en justifiant qu’il nous est permis, au moment où
l’on veut, de nous retirer en nous-même « il t’est permis, au moment que tu veux, de te
retirer en toi-même » (lignes 2 et 3).
Pourquoi donc attendre un moment précis dans
l’année et partir à des centaines de kilomètres alors qu’il nous est possible de nous
retirer au moment que l’on veut et dans l’endroit où l’on veut ? L’auteur démontre alors
que l’homme va chercher loin ce qu’il possède en réalité tout prêt.
En disant « en toimême » (ligne 3), l’auteur a en tête notre âme, il le souligne d’ailleurs dans la phrase qui
suit « nulle part en effet un homme ne trouve retraite plus tranquille, plus exempte de
tracas que dans son âme » (lignes 3 et 4).
Marc-Aurèle nous souligne alors que c’est
notre âme qui, en réalité, est l’endroit le plus désert, le plus silencieux, le plus éloigné
des problèmes que l’on peut rencontrer, et non pas la montagne ou la campagne qui
sont remplis de bruits de la nature.
Ainsi, c’est dans notre âme, notre conscience que
l’on peut trouver ce calme que l’on recherche tant, cette plénitude, cet « ordre parfait »
(ligne 6).
Par ailleurs, l’auteur utilise souvent le mot « âme » (ligne 4) au lieu du mot
conscience pour un but bien précis : l’âme renvoie au religieux et la façon dont il décrit
ce repos que l’on peut rencontrer seulement en nous plongeant profondément dans
notre âme est similaire au paradis.
Ainsi, selon lui, on possède en nous les clés du
paradis et il nous incite à déverrouiller cette porte et à y pénétrer sans plus attendre, en
utilisant l’impératif « Adonne-toi donc sans cesse à cette retraite » (ligne 6).
Marc-Aurèle nous a donc bien démontré que notre âme, proche du paradis,
constitue le refuge idéal pour se reposer, se retirer, se ressourcer et qu’il est inutile, voire
complètement stupide, de se déplacer pour obtenir pareil chose.
Deuxièmement, c’est à nous d’exercer une certaine influence sur notre monde
extérieur.
Tout d’abord, Marc-Aurèle nous rappelle que notre conscience, qu’il définit
comme « ce petit lopin qui est le tien » (ligne 7) nous est propre, que c’est quelque
chose d’intime et d’unique.
Un « lopin » (ligne 7) est une petite parcelle de terre, notre
âme est donc décrite comme un territoire dont on est le roi, et sur lequel on a donc
entièrement le contrôle.
Ensuite, l’auteur décrit notre âme comme un endroit « sans
tourment ni tension excessive » (ligne 8) : c’est alors que tous les problèmes, les
angoisses, les souffrances que l’homme rencontre au quotidien sont absents dans son
âme qui donne alors encore plus l’image d’être le paradis ultime où il n’y a que calme et
bonheur.
De plus, si ce n’est pas toujours le cas de la réalité, dans notre âme on est
« un homme libre » (ligne 8) : on fait donc ce que l’on veut et on ne rencontre....
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