Explication de texte B.172 des Pensées de Pascal

« le présent à une simple succession de plaisirs immédiats .Pascal affirme malgré cela que nous « errons dans des temps qui nesont pas les nôtres, et s'il est vrai, se remémorer le bonheur passé ne peut-il cependant pas nous procurer du bonheur dans leprésent ? Et le bonheur présent ne réside-t-il pas dans le fait de pouvoir regarder passé et avenir avec bonheur ? Dire que leshommes préfèrent se complaire dans leurs souvenirs ou s'imaginer dans l'avenir signifie que nous pouvons affirmer avoir étéheureux ou qu'on sera heureux, mais pas être heureux.

Ainsi une personne entrant par exemple dans la vie active peut sedire avoir passé une scolarité heureuse avec ses amis, et espérer à la fois être autant sinon plus heureux dans son travail maispas pas affirmer être heureuse de rentrer dans la vie active.

En conséquence de ce refus de vivre au présent nous laissonséchapper le bonheur en pensant aux bonheurs qui furent ou qui seront au détriment du bonheur présent , qui est le seulvéritable bonheur.

Ce principe diverge de celui de Sénèque qui dans La vie heureuse ne recherche pas spécifiquement lebonheur comme un souverain bien mais comme un ensemble de sensations passées qui permettent de qualifier la viemenée jusqu'alors d'heureuse , et d'anticiper ainsi l'avenir dans les meilleures dispositions pour que la vie continue d'êtreagréable ; il n'y aurai ainsi pas de bonheur à chercher dans le présent.

Pascal nous explique lui que le bonheur futur n'est pasun bonheur réel et que l'homme passe à coté des bonheurs du présent car il fuit celui-ci.

II.

Mais pourquoi fuyons-nous le présent ? L'auteur affirme que celui-ci « nous blesse » et même nous effraye car il estimpossible à « saisir » et l'avenir semble se transformer immédiatement en passé.

Nous ne cherchons même pas a vivre lesmoments agréables, mais à les retenir et notre incapacité à le faire nous « afflige ».

Nous sommes ainsi nostalgiques del'instant présent que nous cherchons en même temps à utiliser pour construire l'avenir souhaité ce qui n'est pas toujourspossible, l'avenir proche et l'avenir lointain entrant parfois en contradiction : ainsi, un jeune élève rédigeant son devoir dephilosophie confortablement installé dans son canapé sait qu'il regrettera le temps ou ses obligations consistaient à faire sontravail scolaire et aimerai retenir le moment ou il est inspiré, tout en espérant d'une part qu'il terminera vite pour allerregarder un film et d'autre part qu'il y consacrera un maximum de temps pour réussir ses études et donc sa vie.

L'élèves'empêche ainsi de profiter de son bonheur présent en pensant à la fois qu'il s'écoule trop vite et, paradoxalement, qu'ildurera trop longtemps .Cependant, l'élève présentement assidu se prive du plaisir de regarder un film en prévision d'unavenir qu'il n'est même pas sur d'atteindre et cette inquiétude contribue encore à gâcher son instant présent.

C'est ce quePascal résume dans la dernière phrase du premier paragraphe : « ...pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notrepuissance, pour un temps ou nous n'avons aucune assurance d'arriver.» Notre présent est ainsi une alternance de regrets, etd'espoir plein de doute.

Ainsi, « ..soutenir [le présent] par l'avenir » est une chose vaine qui si elle en est la raison ne justifiepas la tendance humaine à fuir l'avenir.

Nous repoussons donc le présent pour se consacrer aux bonheurs passés ou futurs carnous sommes incapables de faire abstraction de ceux-ci car cela rendrait le présent désuet.

Selon la Torah d'ailleurs « Unpeuple qui n'a pas de passé n'a ni présent ni avenir ».

III.

De ce fait, c'est toujours dans l'avenir que nous cherchons le bonheur, mais pourquoi serait-il plus dans l'avenir que dans lepassé ou le présent ? Et le souverain bien n'est-il pas plutôt un droit, dont nous espérons bénéficier dans l'avenir ? La justiceet la liberté sont des valeurs et conditionnent donc des bonheurs individuels, mais n'y sont guère suffisantes ; la constitutionde 1793 stipule à l'article 1 que « le but de la société est le bonheur commun » le bonheur n'est donc pas un droit mais un butà atteindre, nécessitant d'être conditionné et privilégié dans le présent si on veut le trouver dans l'avenir et si au contraire leprésent est semé d'obstacles trop importants pour être surmontés et que le bonheur est inaccessible ou semble inaccessible,le présent n'a plus de raison d'être : Joseph K.

n'a franchi les obstacles que parce qu'il espérait franchir les portes de la loi, s'ilavait su n'avoir plus aucun avenir, il n'aurait pas pris la peine de l'attendre et aurait mis fin à son présent.

Vivre le présentsemble donc tout simplement impossible.

Cela en partie aussi car comme le dit Pascal nous ne faisons qu'espérer vivre, deplus si l'Homme est incapable de trouver le bonheur parce qu'il le cherche en se concentrant pour forger un avenir heureuxnous nous condamnons à ne jamais trouver le bonheur.

Nous faisons en effet parfois par morale ou par conscience civile deschoses qui ne nous rendent pas momentanément heureux mais dont nous savons que l'absence compromettrai notre bien-être futur : si l'on trouve un portefeuille par terre et qu'on l'amène intact au commissariat , c'est parce que nous sommes bienéduqués , que le sentiment de vivre en accord avec notre éducation lui donne un sens et une légitimité, nous tentons ainsi denous convaincre que dans notre passé nous n'avons pas conditionné notre avenir en vain; nous sommes devenu quelqu'und'honnête et entendons bien en tirer de l'amour propre faute d'en tirer de l'argent.

Cependant par cette action nousentendons toujours préparer notre avenir; nous nous sommes tous dis à un moment de notre vie alors que nous noussentions coupables, que le vrai bonheur était décidément d'avoir la conscience tranquille, et c'est de par cette expérienceque nous savons que le fait de ne pas rendre le porte feuille entrainerai dans l'avenir une sensation nuisible à un éventuelbonheur.

Si le présent est aboutissement, il n'y rien de mieux à espérer de l'avenir et donc plus de raison de vivre.

C'estpourquoi c'est dans l'avenir que l'homme cherche le bonheur, et c'est pour cette raison qu'il ne l'atteindra jamais.

Ainsi, Pascal nous explique que si les hommes ne recherchent pas tous la même chose, ils la cherchent tous au mauvaisendroit, c'est à dire dans le futur ou le passé et ce qu'ils ont devant eux, ils préfèrent le voir dans l'avenir pour pouvoir ledésirer encore plutôt que d'en profiter.

Les hommes sont donc incapables de « cueillir le jour » si ce n'est dans le but d'enmettre le fruit de coté pour le jour suivant.

L'analyse du texte nous apprend donc qu'il faudrait pour être heureux arriver àfaire abstraction momentanément des temps irréels que sont le passé et l'avenir, pour se concentrer sur le présent afin d'yprofiter du bonheur qu'il nous offre, ce que nous refusons de faire de peur de négliger en cela notre avenir et que le bonheur. »