Devoir de Philosophie

Est-on d'autant plus libre qu'on a plus de raisons d'agir comme on le fait ?

Publié le 03/01/2004

Extrait du document

Par exemple, la nocivité du tabac est une raison pour choisir d'arrêter de fumer, mais l'accoutumance que j'ai contractée vis-à-vis de cette substance n'en est pas une pour continuer; elle n'est qu'un mobile (venu du corps) qui me pousse à faire abstraction des raisons. Cette distinction est importante, car il est clair que l'abondance des mobiles sensibles qui peuvent me déterminer à prendre un parti n'est pas une garantie - bien au contraire - de la liberté de mon choix.Il faut donc étudier le problème en ne considérant que la soumission de ma volonté aux seules raisons (motifs rationnels). Il est bien évident qu'un motif est une force qui incline ma volonté à prendre un parti plutôt que tel autre. Toute la question est cependant de savoir jusqu'où s'étend la puissance des motifs. C'est le problème fondamental de la liberté humaine : les motifs sont-ils pour la volonté des éléments qui orientent le choix, mais ne le déterminent pas (la décision restant finalement à une volonté absolument libre) ? Ou bien la décision finale n'est-elle que la simple résultante des forces que représentent les motifs, la volonté n'étant rien d'autre que cette résultante ?On peut choisir la première solution, en se reposant sur l'expérience intime que chacun possède de sa liberté : Descartes fait remarquer que même lorsque j'ai toutes les raisons de choisir dans un sens, il reste en mon pouvoir de choisir définitivement dans l'autre sens. Au père Mesland, Descartes fait remarquer que je peux très bien faire le pire tout en voyant le meilleur ; cela signifie que ma liberté précède en fait toutes les raisons que je peux avoir d'agir; il existe en tout homme un pouvoir absolu, fondamental de se déterminer librement, indépendamment des motifs et même éventuellement contre eux. La puissance que nous vivons en nous-mêmes et qui vise la liberté n'est pas nécessairement celle de la passion destructrice et violente.

« L'existence de motifs n'est donc pas un risque pour ma liberté.

Il faut même aller plus loin : je ne peux pasvouloir me déterminer sans motifs; loin de limiter la puissance de ma volonté, les motifs en sont la conditionnécessaire.

La volonté appelle donc les motifs, tout simplement parce que lorsque je choisis, je veux choisir enconnaissance de cause ».

Dans la IV Méditation, Descartes critique ces philosophes qui ont cru que la situationd'indifférence, où aucun motif ne se présente, était la plus favorable à l'exercice de ma liberté.

Quelle erreur !l'indifférence est au contraire le plus bas degré de la liberté "et fait plutôt paraître un défaut dans laconnaissance qu'une perfection dans la volonté".

Les raisons d'agir ne contraignent pas mon choix.

elles luipermettent d'exister comme choix; choisir sans raisons, ce n'est plus choisir.

mais se livrer à l'arbitraire et auhasard.Comment a-t-on pu voir dans l'acte gratuit la quintessence de la liberté humaine ? Lafcadio, dans Les caves duVatican, n'a aucune raison d'assassiner ce voyageur qu'il ne connaît pas ; c'est justement cette absence deraisons qui va le déterminer à pousser Fleurissoire par la portière.

Leibniz connaissait déjà cette difficulté del'acte gratuit; difficulté plus apparente que réelle, et facile à lever : le désir de prouver la réalité de mon librearbitre est encore une raison, par où l'acte que je croyais libre est encore déterminé. Cet exemple montre assez le danger qu'il y aurait à confondre les déterminations conscientes de mes actesavec leurs causes réelles.

Leibniz et Spinoza s'accorderont au moins sur ce point : que je ne sente pas dansma conscience les forces qui déterminent ma volonté ne suffit pas à établir que ces forces n'existent pas.

End'autres termes, et pour parler un langage différent, le psychisme ne se réduit peut-être pas au conscient.

Lesentiment interne évident de notre liberté, qui suffisait à Descartes comme il suffira à Rousseau, ne prouve enfait rien du tout.Spinoza dénonçait cette illusion : les hommes se croient libres parce qu'ils ont conscience de leurs désirs maisnon des causes qui les déterminent. En tant que nous avons un corps, en tant que nous faisons partie intégrante de la nature, nous n'échapponspas au déterminisme universel.

La liberté, la vraie, ne consiste pas dans une impossible émancipation vis-à-visdes déterminismes, mais dans leur connaissance rationnelle.

Spinoza est sur ce point proche de Descartes : la raison n'est pas une menace pour notre liberté, mais une chance.Cependant.

là où Descartes ne voyait qu'un moyen de faire un meilleurusage de la liberté, Spinoza placera la liberté tout entière.

Laconnaissance, en tant qu'elle me permet d'agir et non de pâtir, de subir,se confond avec ma liberté. L'homme se croit libre parce qu'il est conscient de ses désirs mais le plussouvent il est incapable de justifier rationnellement ses actes.

De cefait, sa liberté est illusoire.

Cependant, cela ne signifie pas que l'êtrehumain est absolument déterminé.

Pour Spinoza, il ne s'agit pasd'imposer une rationalité triomphante mais de démontrer que la libertételle qu'elle est conçue habituellement est un sentiment et non uneconnaissance, tout en suggérant que seule la conscience de la passionpeut conduire le sujet vers une authentique liberté.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles