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Est-il raisonnable d'aimer ?

Publié le 19/01/2004

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« Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction. »Comme l'affirma Antoine de Saint-Exupéry, l'amour nous fait fusionner avec l'objet aimé. « Le coeur sans raison n'est que passion destructrice. La raison sans coeur mène à l'extinction de l'âme! ». On notera d'abord que si l'attachement à notre semblable procède rarement de la pure raison, il est toutefois de l'ordre du raisonnable : l'amitié, la tendresse, l'amour maternel sont des comportements éminemment sociables et humains. L'homme n'est-il pas un être qui a besoin des autres pour partager avec eux joies et bonheur ? L'amour, l'amitié, le fait de vouloir le bien de l'autre s'accorde parfaitement bien avec la raison. * a) Étant donné l'amour, essayons de l'analyser. Quel amour ? On aime Dieu, sa famille, le sexe opposé, le même sexe , soi-même, son travail, et même ce que l'on croit haïr ! L'amour est multiple, polymorphe.
Par essence l’homme est un être de raison : il est doué d’une intelligence, d’une puissance de jugement, d’une morale qui lui permet de discerner le bien du mal. Chaque homme sans exception possède cette raison universelle, cette faculté particulière à raisonner qui lui permet d’agir de façon réfléchie quelque soi la situation. Cependant, il existe d’autres raisons employées par l’homme que l’on pourrait qualifier de non raisonnables : ces raisons particulières impliquent les sentiments du sujet : ses actes ne sont plus dictés par sa raison universelle mais par ses passions, ses désirs. Ainsi, l’homme qui aime agit-il de façon raisonnable vu qu’il est soumis à ses sentiments amoureux ? La notion d’amour est aussi multiple est complexe : l’amour est une caractéristique propre à l’homme. Mais existe-t-il des amours raisonnables et d’autres qui ne le sont pas ? On peut aussi s’interroger sur la nature de l’amour : amour passionnel, amour spirituel, amitié, ou simple désir : Ou se place la raison de l’homme dans ces cas là ?



« contradiction dans les termes ? Qu'est-ce qui, dès lors, caractérise le raisonnable et en quoi l'amour, dans saspécificité, échappe-t-il à la catégorie du raisonnable ? Il y a généralement une confusion faite par la plupart deshommes entre la simple attirance qui est le fait de la nature et le véritable Amour qui, lui relève d'un choixpersonnel, réfléchi et dont le fondement est inséparable d'une connaissance en acte même si nous n'en n'avons pasforcement conscience.

Si une telle confusion est à l'ouvre chez la plupart des hommes, cela s'explique par le faitqu'aimer engageant leur raison peut fort bien être un processus au sein duquel la conscience d'opérer un choix réeln'intervient pas en tant que tel, comme si cette action impliquait que les hommes disposent d'un savoir qui lesrendent raisonnables sans que cela coïncide avec leur conscience.

Celui qui aime, fait un choix, conscient ou non.Le verbe aimer s'offre dans un nombre considérable d'expressions qui témoignent de son extraordinaire polyvalence.On peut aimer Dieu, sa famille, son travail, son ami(e).

La langue française, contrairement à d'autres, ne connaîtqu'un seul verbe pour désigner l'acte de donner et celui de prendre, la charité et l'avidité, la bienfaisance et laconvoitise.

Le fait d'aimer passe par un jugement qui n'est autre qu'une manière de mesurer ce qui les qualités et lesdéfauts de l'objet aimé.

Il y a là, comme une forme de délimitation réfléchie.

Ce jugement trouvera comme extension de lui-même avec l'art de la comparaison.

Comparer revient dans les faits àtrouver les termes de supériorités de l'objet aimé par rapport aux autres qui nous entoure.

Tout ce passe comme si,la délimitation de cet objet s'accompagnait d'une justification quand au fait de l'avoir élue.

L'amour, comme laplupart des sentiments du reste, utilise à son profit la raison, fait appel aux talents et à l'intelligence, à telleenseigne que les psychologues parlent de logique passionnelle.L'amoureux veut avoir des raisons d'aimer et il en trouve envers et contre tout.

L'amour n'est donc qu'un jeu ayantpour but la recherche du meilleur équilibre.

Mais il y a des excès, et en vertu de notre sensibilité et du caractèreexclusif de notre Amour ne nous nous montrons pas odieux en certaine circonstance parce que nous pouvons êtreprofondément jaloux mais de tels excès n'hypothèquerons jamais ce qui se trouve au fondement de l'amour, l'élan ducour grâce auquel notre générosité sera toujours présente et par lequel la démonstration de ce choix dispose biend'un fondement qui relève d'une véritable connaissance, sera toujours susceptible d'être faite à la manière d'un gagequi fait que nous avons le sentiment de ne pas nous tromper.

Cette perception que nous avons donc de ne pasnous leurrer quand au choix qui est le notre, tient au fait qu'au delà de cette impulsion du cour mais qui n'excluejamais une véritable sensibilité, il y a bien une connaissance qui trouve sa propre justification, puisque c'est envertu même de ce que l'on sait de ce sujet qui a toujours de notre part une volonté de préserver le lien avec cetobjet.

Le plus étonnant, est que cette connaissance qui exige donc des lumières peut fort bien ne pas inclure laconscience que c'est bien grâce à cette connaissance que nous aimons durablement.

Les opérations qui sont ainsiréalisées grâce au jugement et à la comparaison, ont pour résultats de nous fournir comme la mesure de notrepropre amour, puisqu'en vertu de la délimitation de cet objet par la raison et d'une justification que c'est bien cettepersonne là, avec ses défauts et surtout ses qualités qui mérite notre attention.

Aimer devient raisonnable, sans,pourtant, être conscient de telles opérations parce que celles-ci coïncident parfaitement avec le désir d'aimer luimême dont on qu'il est le fait de notre générosité, de notre sensibilité et non de notre cour.C'est comme un bilan accompli par notre raison sans pour autant que ce soit elle la véritable origine de cetteexpérience.

Mais il faut que cette synthèse soit présente pour que l'amour soit durable, sans pour autant que cesoit elle qui récolte les fruits de ce tâche accomplie.

On peut donc conclure cette partie par une citation de Jean-Jacques Rousseau : « La raison fait l'homme mais c'est le sentiment qui le conduit ». L'idée que l'Amour soit de nature raisonnable, parce qu'il y aurait une connaissance à l'ouvre dans le choix del'être aimé résiste difficilement à ce que l'on peut appelé la révolution Freudienne qui est elle-même inséparable decette science de l'inconscient que représente la métapsychologie, cette science qui va au delà de la scienceordinaire.

Si l'on s'attache aux principes fondamentaux de la métapsychologie, on doit admettre qu'aucun individune dispose d'une quelconque connaissance dans laquelle il aurait accès à cette organisation psychiquefondamentale qui détermine toute sa vie affective qui n'est autre que l'inconscient lui-même.

Si bien que les hommescroient qu'ils sont maître du choix qu'ils font lorsqu'ils aiment et pensent que les opérations qu'ils réalisent sont àmettre sur le compte de leur raison, hors il y a chez tout homme, une véritable Terra incognita qui fait que le désirobéis lui-même à une logique qui dépasse la volonté de chaque individu.Cette Terra incognita a été l'objet d'une découverte par Freud grâce à sa métapsychologie et le résultat de sesinvestigations lui a permis d'affirmer qu'il y avait bien un désir à l'ouvre chez l'homme et qui va déterminer sonexistence ayant pour nom « l'amour » mais au lieu de croire que le fait d'aimer tiendrait dans des opérations qui ontpour but la délimitation de l'objet aimé; Freud affirme, a contrario, que le fait d'aimer est une philosophie qui seréalise d'une manière quasi-implacable et qui s'évertue à échapper à toutes formes d'identifications en opérant detelles manières qu'il y aura toujours de sa part ,soit un déplacement à l'égard de l'objet aimé ,soit une fixation àl'égard de ce dernier.C'est pour cette raison que Freud nous montre que là ou l'Amour se veut raisonnable, en apparence il se rendobjectivement déraisonnable en refusant systématiquement d'obéir à une quelconque limitation de lui-même.

Lorsque l'on obéit au processus psychique qui fait que nous aimons, nous répondons nécessairement à une pousséedont l'origine est en grande partie corporelle.

Cette poussée n'est pas instantanée et n'a rien d'éphémère, c'est aucontraire la totalité de mon corps qui s'engage durablement au travers d'elle-même car ce fait va définir monexistence en permanence.

Les hommes vivent généralement dans l'illusion que le fait d'aimer serait dans leurvolonté ou de leur libre arbitre.

Freud lui-même le souligne à de nombreuses reprises.

L'idée qu'un choixs'effectuerait et ne limiterait pas d'autres conséquences que cette pulsion qui coïncide avec la totalité de moncorps, qui a pour nom « l'amour », est une idée, qui sans être fausse puisqu'elle coïncide avec une véritableexpérience, est purement illusoire parce qu'elle ne délivre qu'une parcelle de la réalité psychique des hommes.

Il s'agit maintenant de projeter dans le futur cette pensée car ceux qui pensent avoir fait un choix, ne sont paspurement et simplement dans l'erreur parce qu'il y a bien eu de leur part une volonté de donner à leur action deslimites de telles sortes que le désir d'amour se voit entièrement justifier, seulement la métaphysique, comme science. »

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