Est-il légitime qu'une oeuvre d'art fasse l'objet d'un échange marchand ?
Publié le 14/10/2011
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II-1 Rapport possible entre art et technique Tout d'abord, l'idée que l'art ne nécessite aucun travail n'est peut-être qu'une illusion, laquelle serait liée au fait que le propre de l'art est justement de rendre invisible tout le travail qu'il suppose. C'est d'ailleurs ce que suggère Nietzsche, pour qui le génie a une part d'illusion, puisque nous y croyons lorsque nous ne savons pas expliquer la genèse d'une œuvre. En ce sens, l'œuvre d'art supposerait un réel travail, comme le montrent d'ailleurs les esquisses et les manuscrits, mais ce travail saurait disparaître une fois l'œuvre achevée. Ainsi, comme le souligne Nietzsche, l'apparence de facilité qui nous fait croire à une improvisation ne serait peut-être en fait que le résultat d'un énorme travail.
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I-1 La création artistique semble libérée du travail L'œuvre d'art se distingue de la production technique par lacréation qui la fonde et par l'intervention qu'y joue le « génie ».
En effet, à la différence de l'artisan qui sembleconcevoir sa production et qui met donc en œuvre des règles permettant éventuellement de la « reproduire à milleexemplaires », l'artiste est, comme le souligne Alain, « le spectateur de son œuvre en train de naître ».
En ce sens,l'œuvre d'art semble reposer sur une libre inspiration, véritable don que le génie soufflerait à l'artiste.
Dès lors, ellene pourrait donc être comprise comme un travail que l'on pourrait échanger contre un salaire puisqu'il serait en effetinjuste de « payer » pour une œuvre qui n'aurait nécessité aucun effort, l'échange supposant que ce soit le travailnécessité par la fabrication du produit qui entre en compte dans la juste « rétribution ».
I-2 L'œuvre d'art ne viseque le beau et ne peut être échangée comme un objet utileQui plus est, l'œuvre d'art ne semble avoir pour finalité que le beau et ne vise donc aucune utilité, comme le suggèreKant.
Trouver une œuvre belle, c'est en effet simplement avoir en vue sa « représentation » indépendamment deson existence (laquelle est en revanche prise en compte lorsque l'on s'intéresse à l'utilité d'un objet par exemple).Comme le beau n'est pas l'utile, dès lors, un échange marchand apparaît comme doublement injuste car, d'une part,il paraît injuste de monnayer quelque chose d'inutile, autrement dit qui ne « vaudrait rien », et car, d'autre part, ceserait dénaturer l'œuvre d'art que de rétribuer en elle une beauté qui, par définition, se veut le seul et unique but deson existence.
I-3 Le plaisir qu'apporte l'œuvre d'art est subjectif Enfin, l'échange marchand suppose que l'on dispose d'un étalonde mesure permettant d'évaluer le bien échangé.
Cet étalon suppose que cette valeur soit objective, donc qu'ellesoit contenue dans l'objet même et qu'elle soit par conséquent universelle.
Par3
Les échanges CORRIGÉexemple, on peut se mettre d'accord sur le prix d'une voiture en calculant le travail passé à la fabriquer, mais aussisa « qualité », à savoir notamment sa puissance, sa résistance, son confort, etc.
Ces qualités peuvent faire l'objetd'un accord, lequel rend possible l'évaluation du bien.
Or, dans le domaine de l'art, la beauté qui fait toute la valeurd'une œuvre apparaît comme subjective : comme l'évoque la formule « à chacun ses goûts », laquelle signifie que ceque l'autre trouve beau, moi je peux le trouver laid ou insignifiant.
Or comment pourrait-on se mettre d'accord pouréchanger un produit dont on serait incapable d'estimer la valeur ? Un tel échange ne peut donc être en lui-mêmequ'injuste dans la mesure où l'on serait condamné à surestimer une œuvre ou bien, au contraire, à la sous-estimer.Transition
Mais l'idée que l'œuvre d'art ne puisse être que le produit d'un génie désintéressé n'est peut-être qu'une illusion, etderrière l'œuvre d'art se cache peut-être un réel savoir-faire qui pourrait faire l'objet d'une juste estimation.
II Possibilité de voir dans l'œuvre d'art un travail à échangerII-1 Rapport possible entre art et technique Tout d'abord, l'idée que l'art ne nécessite aucun travail n'est peut-êtrequ'une illusion, laquelle serait liée au fait que le propre de l'art est justement de rendre invisible tout le travail qu'ilsuppose.
C'est d'ailleurs ce que suggère Nietzsche, pour qui le génie a une part d'illusion, puisque nous y croyonslorsque nous ne savons pas expliquer la genèse d'une œuvre.
En ce sens, l'œuvre d'art supposerait un réel travail,comme le montrent d'ailleurs les esquisses et les manuscrits, mais ce travail saurait disparaître une fois l'œuvreachevée.
Ainsi, comme le souligne Nietzsche, l'apparence de facilité qui nous fait croire à une improvisation ne seraitpeut-être en fait que le résultat d'un énorme travail.
Or cet important travail pourrait légitimement faire l'objet d'unéchange puisque dans l'évaluation du bien échangé le critère principal est justement celui du travail accompli.
II-2Utilité possible du beau De même, poser que l'art ne doit viser que le beau ne lui retire pas pour autant toute valeur.Il serait même dangereux de confondre l'inutile avec ce qui n'a pas de valeur.
En effet, certaines choses, bienqu'inutiles, sont pourtant essentielles à l'homme, comme le jeu, l'amour, le bonheur par exemple.
Or le beau semblelui aussi faire partie de ce qui compte beaucoup pour la culture humaine, comme si l'homme avait besoin de labeauté « pour ne pas mourir de la vérité » (Nietzsche).
Baudelaire, notamment par le biais de ses poèmes, montre àquel point l'art, en visant le beau, « rend l'univers moins hideux et les instants moins lourds ».
Le beau est donc unefaçon pour l'homme de transformer le monde selon un certain idéal, et également d'en décrire la noirceur pour mieuxs'en délivrer.
Lorsqu'il affirme que « l'art ne reproduit pas le visible, il rend visible », P.
Klee suggère d'une certainefaçon que les artistes et les œuvres d'art « servent » à nous montrer ce que nous devrions voir mais que seulsquelques-uns voient.
Or ne s'ensuit-il pas que l'œuvre d'art mérite d'être « payée » dans la mesure où elle nouspermet de porter sur nous-mêmes et sur le monde un nouveau regard ?4
Les échanges II-3 Objectivité possible du plaisir esthétique Nous pouvons donc tomber d'accord pour dire qu'uneœuvre d'art est belle si justement elle nous montre ce que nous ne savons pas voir.
Dans ce cas, il semble possibled'apprécier à sa juste valeur une œuvre d'art, puisque le plaisir esthétique paraît être un critère qui permet demesurer l'œuvre d'art.
Ainsi, une œuvre qui nous émeut et qui provoque en nous ce que Kant appelle le « libre jeudes facultés », à savoir le plaisir d'une harmonie entre notre pensée, notre sensibilité et notre imagination, sera uneœuvre belle.
Or cette harmonie qu'elle provoque et qui nous fait dire « c'est beau ! » est, selon Kant, à la foissubjective et universelle : c'est en effet moi qui éprouve l'émotion mais en même temps je la suppose chez autrui.C'est dire que, selon Kant, il y a bien un « sens commun » qui nous permet de tomber d'accord sur la beauté d'uneœuvre : parler de chef-d'œuvre à propos de Mozart ou de Van Gogh, c'est bien en effet avancer l'idée d'uneuniversalité possible en matière de goût.
Dès lors, dans la mesure où il est possible d'évaluer la beauté d'une œuvred'art en interrogeant le « sens commun », il s'ensuit qu'il est donc possible et même juste de rétribuer l'œuvre d'artpour sa beauté..
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