Est-ce pour prévenir la récidive que la justice punit ?
Publié le 01/03/2004
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pratiques qui concourent à un tel résultat.
La sanction devient, comme il le dit, «normalisatrice».S'il s'agit d'amender le criminel, le rendra-t-on meilleur qu'il est, pour lui-même? Cela est douteux, car nuln'estime que c'est un bien d'endurer une punition.
On ne peut, note Kant dans un passage capital de la Critique de la raison pratique (théorème VI, scolie 2), associer leconcept de punition à celui de bonheur.
La punition suppose une peineincompatible avec le bien personnel.C'est donc que la peine a pour but d'améliorer la nature morale etsociale du criminel.
Mais a-t-on déjà vu que le châtiment agisse sur lesentiment moral d'un être? Ce n'est ni l'enfermement, ni la discipline quiréformeront le moi profond du criminel.
Dix années de prison ne rendentpas un homme meilleur, elles peuvent simplement le dissuader derecommencer par crainte des conséquences.
Aucune action mécaniquene produira une conversion au bien.
Cela nécessite de la part ducondamné certaines dispositions initiales.
Il faut qu'il soit réceptif ausentiment du remords et du repentir.
Alors oui, à cette condition il estpossible de prendre conscience de sa faute, à la faveur d'une peine.
Lechâtiment ne sauve du mal et n'éduque que des âmes déjà préparées.Pour la grande majorité des condamnés, la peine risque de produireplutôt l'effet inverse, à savoir, endurcir les esprits, au point de lesrendre imperméables à tout sentiment moral.On peut, avons-nous dit, reconnaître également au châtiment unefonction dissuasive.
Et il est sans doute vrai que celui qui a subi unepeine prolongée et éprouvante, est enclin à ne plus commettre decrime.
Mais il est tout aussi vrai que, lorsque les effets de la peines nese font plus sentir, l'esprit se porte à oublier, et rien n'empêche alors la récidive.
Revenu dans la société civile, l'ancien condamné ne voit plus que le présent, et l'avantage immédiatque procurerait un crime fait oublier la crainte d'une peine à venir.Pour ceux qui n'ont pas commis de crime, la peine a un caractère d'exemplarité.
La justice, à cet effet, excitela crainte du châtiment, laquelle est suscitée davantage par l'infaillibilité dans l'exécution des peines que dansla cruauté de ces peines.
Les châtiments doivent être moins rigoureux que rigoureusement appliqués.
L'impunité favorise la récidiveIl va de soi qu'une justice trop laxiste incite celui qui commet un acte délictueux à le réitérer si aucunesanction ne le condamne.
La justice, ainsi que le pense Aristote, consiste à récompenser ceux qui respectentla loi et la morale et à punir ceux qui, en l'absence de sanction, n'hésiteraient pas à commettre un nouveaudélit.
[A l'exception de la peine de mort, aucune peine, aussi lourde soit-elle, n'a jamais empêché un criminel notoirede récidiver.
La justice punit non pour prévenir la récidive, mais pour prévenir le désordre social.]
La peine n'est pas dissuasiveD'une part, comme le dit justement Nietzsche, le «châtiment endurcit et refroidit; il concentre; il aiguise lesentiment d'être étranger; il augmente la force de résistance» (La Généalogie de la morale).
D'autre part, ilest certaines formes de criminalité (la pédophilie en est une) qui sont réitératives, malgré les peines trèslourdes dont elles font l'objet.
La punition ne répare pas la fauteQue l'on punisse ou pas un meurtrier, l'homicide qu'il a commis est de toute façon irréparable.
Même aprèstrente ans de prison, s'il doit à nouveau tuer, il le fera.
La justice punit, non pour empêcher le crime et saréitération, mais pour rappeler à l'ensemble des membres de la société que nul n'est au-dessus de la loi.
Il n'y a pas d'ordre possible sans justiceLa loi est la loi.
Quiconque la transgresse doit être sanctionné.
La justice est bafouée si un crime reste impuni.Si la justice est bafouée, c'est l'ordre collectif qui est mis en péril.
Qu'un seul homme puisse commettre uncrime sans être inquiété, et ce sont les fondements même de la société qui vacillent.
Dès lors, il ne reste plusde rempart contre la violence..
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