Est-ce légitimement que l'on invoque la réalité des faits contre les spéculations de la raison ?
Publié le 27/02/2008
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* La raison, créatrice du fait et de la connaissance de celui-ci Texte: Einstein et de Léopold Infeld, La théorie est une interprétation du réel
« Les concepts physiques sont des créations libres de l'esprit humain et ne sont pas, comme on pourrait le croire,uniquement déterminés par le monde extérieur.
Dans l'effort que nous faisons pour comprendre le monde, nousressemblons quelque peu à l'homme qui essaie de comprendre le mécanisme d'une montre fermée.
Il voit le cadran et lesaiguilles en mouvement, il entend le tic-tac, mais il n'a aucun moyen d'ouvrir le boîtier.
S'il est ingénieux, il pourra seformer quelque image du mécanisme, qu'il rendra responsable de tout ce qu'il observe, mais il ne sera jamais sûr que sonimage soit la seule capable d'expliquer ses observations.
Il ne sera jamais en état de comparer son image avec le mécanismeréel, et il ne peut même pas se représenter la possibilité ou la signification d'une telle comparaison.
Mais le chercheur croitcertainement qu'à mesure que ses connaissances s'accroîtront, son image de la réalité deviendra de plus en plus simple etexpliquera des domaines de plus en plus étendus de ses impressions sensibles.
Il pourra aussi croire à l'existence d'unelimite idéale de la connaissance que l'esprit humain peut atteindre.
Il pourra appeler cette limite idéale la réalité objective.
»
Dans ce texte, il s'agit de s'interroger sur les rapports entre la théorie et la réalité.
Les concepts que nous utilisons pourexpliquer la réalité ne sont pas guidés et fournis par le réel, mais sont des constructions de l'esprit humain.
Une telle thèseva alors conduire à s'interroger sur la question de la vérité.
Afin de mieux le comprendre, on peut partir ici de l'analogie :On a beau répéter qu'il nous est impossible d'ouvrir le boîtier, la tentation est grande de s'imaginer le contenu de la montre,son mécanisme.
Or c'est bien là ce qui peut retenir notre attention dans la lecture de ce texte.
Il ne s'agit pas d'uneinterdiction provisoire, conjoncturelle, mais d'une impossibilité principielle : nous ne pouvons voir la réalité physique tellequ'elle est en elle-même, indépendamment de tout sujet observant.
Bref, nous n'avons pas d'accès à la chose en soi.
Lathéorie ne pourra plus dès lors être pensée comme une copie de la réalité (ou alors une copie sans modèle, une copie quin'imite rien) mais bien comme un modèle d'interprétation, d'intelligibilité des phénomènes.
Est-ce à dire qu'il n'y aurajamais aucune connaissance de la réalité, que si toutes les théories ne sont que des interprétations, aucune ne vaut plus quel'autre ? vous pouvez montrer en quoi l'affirmation selon laquelle nous n'avons pas accès au réel en soi ne conduit pasnécessairement à de telles affirmations.
Pour reprendre l'analogie utilisée dans le texte, il y a des images du mécanismes quirendent beaucoup mieux compte que d'autres la manière dont la montre fonctionne.
Enfin, il convient d'insister sur la findu texte qui achève le passage d'un point de vue réaliste naïf à un point de vue idéaliste méthodologique puisque la notionde vérité est définie comme limite idéale de la connaissance de l'esprit humain.
Le rappel de l'impossibilité de toutecomparaison entre la description théorique et la chose elle-même opère en effet une sortie de la compréhension classiquede la vérité comme adequatio intellectus et rei (adéquation de l'esprit et de la chose).
Mais la réalité objective n'est pas laréalité en soi.
Dans une perspective épistémologique, on peut choisir d'attribuer un rôle fondamental, celui de déterminer l'usage que l'onfera des faits et l'interprétation que l'on donnera de ceux-ci, parce que la raison est seule capable de produite une visionsynthétique des problèmes posés par les faits.
Les faits, s'ils ne sont pas déterminés par la raison, sont un amas informe dedonnées ; seule la raison peut rendre leur observation productive et créatrice de connaissance.
Conclusion Si l'on reproche fréquemment à la raison de n'être que pure spéculation et d'oublier les faits, il apparaît cependant que lesfaits sans la raison ne peuvent être considérés comme des objets de connaissance valables : plutôt donc que de disqualifierune des deux instances que sont les faits et la raison au profit de l'une d'entre elles uniquement, il faut plutôt concevoir uneinteraction entre elles : ainsi, les faits et la raison se font mutuellement valoir ; c'est leur conjonction qui est productive.
Ilne faut donc pas répondre au sujet en tranchant pour l'une ou l'autre branche de l'alternative posée entre la réalité des faitset les spéculations de la raison, mais définir une interaction entre eux..
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