En quoi les lois sont-elles nécessaires aux sociétés ?
Publié le 30/08/2005
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Les sociétés sont des ensembles d’individus organisées par des institutions et réglées par des lois. Or, la loi dessine le cadre de ce qui est légal et de ce qui est illégal dans une société. Elle dessine la frontière entre ce qui est autorisé et ce qui est interdit, et par là même répressible. Or, on pourrait dire qu’une société démocratique est une société où la loi indique ce qu’il est interdit de faire, au lieu de recenser ce qui est permis, tout simplement parce que les cas qui ne sont pas prévus par la loi sont toujours nécessairement plus nombreux que ceux qui sont prévus par elle. Pourtant, c'est justement parce que la loi apparait toujours comme une limite qui est imposée à nos actions qu’elle est perçue comme répressive, et que l’on peut être tenté d’imaginer qu’une société parfaite serait une société où il n’y aurait pas besoin de loi, justement parce que chaque citoyen aurait une conscience aigue de ce qu’il doit ou ne doit pas faire. Mais cela revient à dire que les lois ne sont pas nécessaires aux sociétés, qu’elles n’en sont qu’une conséquence contingente, sans qu’il appartienne à l’essence de la société d’être dotée de lois. La société implique-t-elle nécessairement des lois ? Et si tel est le cas, qu'est-ce qui justifie ce lien de nécessité ? Est-ce le naturel dépravé des hommes, ou l’organisation sociétale ?
I. Les lois permettent de combattre la nature humaine en permettant aux hommes de cohabiter.
II. Les lois assurent la pérennité d’une société
III. Les lois sont garantes de la liberté de chacun et de la justice de la société
«
individuelles bénéficie des efforts de tous et rend à tous leur effort plus facile.
Elle ne peut subsister que sielle se subordonne l'individu elle ne peut progresser que si elle le laisse faire.
» Or, dans les sociétésanimales, la première condition est remplie : chaque abeille est entièrement subordonnée à l'organisation et lasurvie de la ruche.
Cette société est pérenne, mais incapable d'évoluer, justement parce que les individusn'ont aucune marge de manœuvre.
Par contre, les sociétés humaines, parce qu'elles permettent à chaqueindividu de prendre des initiatives sont moins efficaces, moins stables, mais évoluent.
Si les lois sontnécessaires aux sociétés, les sociétés humaines ne sauraient obéir à un principe de loi similaire aux loisscientifiques dont l'invariance est sans exception et sans évolution possible.
Les lois sont donc faites pourévoluer et progresser, et non pour enfermer les hommes dans un cadre figé et sans recours possible.
Par celanous pouvons voir qu'elles ne sont pas faites pour entraver les hommes dans leurs actions compte tenu d'unprétendu naturel égoïste.
III. Les lois sont garantes de la liberté de chacun et de la justice de la société
A.
Rousseau ouvre son Contrat Social par le constat suivant : « l'homme est né libre, et partout il est dans les fers ».
Son projet politique s'inscrit donc d'emblée dans la problématique de la liberté.
La liberté et l'amourde soi (qui implique la volonté de survivre) sont les deux caractéristiques essentielles de tout homme, avantmême la constitution d'une quelconque société et du moindre rapport avec d'autres hommes.
Or, selonRousseau le passage de la vie à l'état de nature à la vie civile ne supprime pas la liberté en raison del'obéissance aux lois, bien au contraire, elle la transforme et la renforce.
Les lois ne sont pas faites pourcombattre la nature humaine, mais au contraire pour permettre son plein épanouissement.
Dans Le Contrat Social (livre I, chapitre 8), il écrit que « ce que l'homme perd par le contrat social, c'est sa liberté naturelle et un droit illimité à tout ce qui le tente et qu'il peut atteindre ; ce qu'il gagne, c'est la liberté civile et lapropriété de tout ce qu'il possède ».
En effet, en dehors du contrat social, la liberté de l'homme s'étend aussiloin que sa force : tout ce qu'il peut atteindre est à lui.
Mais par la société civile, il accède à une liberté bienplus précieuse : la liberté morale, puisqu'il est désormais maître de lui.
Ce qui permet à Rousseau de redéfinirla liberté : « l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté ».
La loi est donc nécessaire à la sociétéparce qu'elle est la manifestation de ce but commun choisi rationnellement par les hommes.
B.
Rawls, dans sa Théorie de la justice , publiée en 1971, utilise l'idée de contrat social pour penser la justice.
Pour lui, c'est par le concept de « voile de l'ignorance » que nous pouvons établir des lois justes.Selon ce voile de l'ignorance, on peut faire abstraction des intérêts particuliers pour se traiter mutuellementcomme des êtres libres et égaux.
Le principe théorique est simple : les citoyens choisissent les lois qui lesgouverneront en ignorant s'il seront hommes ou femmes, noirs ou blancs, riches ou pauvres, patrons ououvriers, s'il exercerons tel métier ou tel autres s'ils seront frappés par la maladie ou non.
Rawls pense qu'enmanière politique, nous sommes toujours tentés de juger les lois en fonction des avantages personnels queleur application procurerait.
Il faut donc imaginer une position originelle d'ignorance où chacun ignorerait saposition et même ses aptitudes naturelles, les circonstances particulière de sa propre société, c'est-à-direson niveau économique et culturel, son régime politique.
Le voile d'ignorance contribue donc à établir uneégalité de tous devant le vote d'une loi, afin que le bien commun prime sur l'intérêt particulier.
ConclusionOn affirme communément que la loi sert de garde-fous et empêche chacun de privilégier son intérêt propre.
Maiscette théorie est basée sur une conception de l'homme comme un être égoïste et assoiffé de pouvoir, ce qui reste àdémontrer.
De plus, elle ne peut mener qu'à une conclusion bien pessimiste : ceux qui font les lois le feront toujoursdans leur intérêt, et, selon les gouvernements, les sociétés ne seront jamais que des dictatures des majorités oudes parlementaires.
La solution ne guérit donc pas le mal.
Il est donc plus pertinent d'affirmer que les lois sontnécessaires aux sociétés en vertu de leur nature : une société, c'est un lien rationnel entre des individus qui sedonnent un but commun (l'égalité, la justice), et la loi n'est rien d'autre que l'expression de ce but..
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