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En quoi les faits psychiques se rapprochent-ils des faits biologiques et en quoi s'en distinguent-ils ?

Publié le 15/06/2009

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Pour bien connaître l'homme, il faut expliquer toutes les fonctions qu'on observe en lui. Or, l'homme est complexe. Il pense, calcule et raisonne, aime, désire et veut, mais en même temps il respire, il mange et assimile; il naît, grandit et meurt. C'est pour expliquer des fonctions si différentes que le sens commun et la philosophie classique lui attribuent une âme et un corps. Sans nous attaquer à cette question métaphysique de la distinction de l'âme et du corps et en nous maintenant sur le terrain de l'observation, nous nous arrêterons, pour les comparer, aux deux séries de faits qu'on explique par ces deux principes qu'il est classique de distinguer : les faits biologiques et les faits psychiques. En quoi les faits psychiques se rapprochent-ils des faits biologiques P Ce sera l'objet de notre première partie. Dans La seconde, nous montrerons en quoi ils s'en distinguent. Ces recherches n'aboutiront pas à la solution du problème métaphysique de la nature de l'homme; du moins, elles la prépareront.

« interne, c'est que notre vie est trop courte et son rythme trop lent.

Mais supposons que nous pouvons tenirplusieurs millions d'années sous le regard de notre conscience, que le présent ou l'instant sont pour nous, non plusun tout petit nombre de secondes, ou même une fraction de seconde, mais l'intervalle de temps nécessaire pourqu'une parcelle de radium soit transformée en plomb par suite de la radioactivité : nous aurons alors l'impression quele dynamisme n'est pas une caractéristique essentielle de la vie et qu'on le trouve aussi dans la matière brute.Au contraire, les deux caractéristiques suivantes, qui, en somme, n'en font qu'une, manquent à la matière brute etelles sont communes aux êtres vivants et aux êtres pourvus de psychisme : l'unité et la finalité.Les éléments dont se composent les objets matériels sont juxtaposés : un mur n'est qu'une agglomération de pierreset une pierre une agglomération de grains de sable; un morceau de glace, une masse de plusieurs milliards demolécules d'eau.

Aussi peut-on fractionner la matière brute sans changer sa nature : brisez un caillou, vous n'aurezlias autre chose, mais un certain nombre de petits cailloux s'amenuisant jusqu'à ce que nous appelons la poussière.Avec un être vivant ou avec un être pensant, une opération de ce genre est impossible.

En eux tout se tient.

Leséléments qui les composent sont étroitement liés entre eux, et les séparer c'est supprimer l'être lui-même : unanimal que vous priveriez de la fonction respiratoire ou de la fonction nutritive cesserait d'être un animal, et vous leretrouveriez plus tard en poussière; un individu qui aurait totalement perdu sa mémoire ne pourrait plus penser, et sisa sensibilité était anéantie, il sombrerait dans une inertie mortelle.

Vous ne pouvez pas agir sur une partie de cesêtres sans que les autres parties en éprouvent le contrecoup : on le sait, la douleur ralentit l'exercice des fonctionsnutritives, et le mauvais fonctionnement de l'estomac rend difficile les travaux de l'esprit.

Un être vivant et un êtrepensant sont constitués par une synthèse de fonctions : avec la synthèse cessent la pensée et la vie.La synthèse est étroitement liée à la finalité ou même se confond avec elle.

Fonctions vitales et fonctionspsychiques n'opèrent pas individuellement et chacune pour soi : elles cherchent le bien général de l'être et ellesagissent en étroite coordination, avec ensemble.

C'est cette particularité qui creuse, entre la matière brute et lesêtres vivants et pensants, un abîme qui ne pourra sans doute être jamais comblé.Lorsqu'une machine fonctionne mal, quand elle effectue un travail ou suit une direction qui la conduira à sa perte,elle continue à tourner à la même allure jusqu'à la catastrophe finale : qu'on se représente une rame de wagonsdévalant une forte pente pour dérailler au premier tournant et s'écraser au fond d'un ravin.

L'homme qui a construitces machines a bien prévu certains accidents qu'un habile automatisme permet d'éviter.

Mais dans ces cas, c'est leconstructeur, un être vivant et pensant, et non pas la machine, qui pare au danger et fait face à la circonstancenouvelle.

Dans la matière brute, nous observons le règne absolu des causes efficientes : les causes finales ou lafinalité ne s'observent que dans la vie psychique et dans la vie organique.Prenons, pour commencer, la vie psychique où le rôle de la finalité est plus clair et parfaitement compréhensible.Voici un entrepreneur qui s'attaque à la construction d'une maison, un maçon qui se dispose à bâtir un mur.

Ils ontl'idée de ce qu'ils doivent réaliser : cette idée, c'est la fin, la cause finale.

C'est une vraie cause.

Non pas, sansdoute, que la simple représentation du but puisse en rapprocher d'une ligne : ce n'est pas la pensée du toit couverten tuiles rouges qui montera les tuiles à La place qu'elles doivent occuper.

Mais l'idée du résultat fait choisir lesmoyens les plus propres à l'obtenir : sachant le genre de toiture que désire son client, l'entrepreneur s'adressera à latuilerie qui fabrique ce matériau et calculera le moyen le plus économique de l'apporter à pied d'oeuvre.

Au contraire,s'il ne savait pas ce qu'il veut faire, il resterait inerte ou se livrerait à une activité ou plutôt à une agitation vaine.L'idée du résultat ou de la fin à obtenir a donc joué un rôle important : la causalité finale est une vraie causalité.Dans notre vie psychique, la finalité ne prend que rarement une forme aussi nette.

Le plus souvent, c'estinconsciemment que notre activité s'organise vers un résultat à obtenir.

Nos mouvements habituels sontautomatiques : les divers gestes qu'effectue le fumeur pour prendre sa blague à tabac et une feuille de papier,rouler sa cigarette et l'allumer, ne demandent aucune réflexion; cependant, ils concourent à un but précis et si, àun moment donné, l'automatisme dévie et compromet le résultat, le fumeur, presque sans y songer, donnera le coupde pouce qui rétablira l'ordre prévu : dans tous ces mouvements, il y a de la finalité.La finalité de nos automatismes nous permet de nous faire une certaine idée de la finalité dans l'activité des êtresvivants en qui nous n'observons aucun signe de pensée.Tandis que l'évolution de la matière brute est rigoureusement déterminée par les antécédents qui agissent sur elle,l'activité de la matière vivante est orientée par un plan à réaliser, un but à atteindre.

Supposons que dans un feud'artifice une pièce se soit accidentellement détachée ou ait été oubliée par le monteur, les autres joueront leurrôle, mais ne feront rien pour suppléer celle qui fait défaut; aussi l'effet global sera-t-il manqué.

Au contraire, qu'unexpérimentateur détache d'un embryon la partie qui doit former le tube digestif, il verra ce système se constituer àpartir d'une région qui, normalement, assure la formation d'un organe tout différent, par exemple du systèmenerveux.

Tout se passe comme si les éléments constitutifs de l'être vivant avaient conscience du but à atteindre etordonnaient leur activité vers ce but.Il y a donc entre la vie psychique et la vie tout court des ressemblances frappantes.

Mais les différences sont peut-être plus profondes : l'être vivant se comporte comme si la représentation d'une fin à atteindre le dirigeait, commeelle dirige l'être pensant; mais nous devons nous contenter de ce comme si : au fond, la vie et la pensée diffèrentessentiellement. *** La première différence qui saute aux yeux, quand on compare les faits psychiques et les faits biologiques, est queles premiers comportent la conscience, tandis qu'on n'a pas de raison d'attribuer la conscience aux seconds : c'estconsciemment que l'entrepreneur organise le travail de ses ouvriers en vue de la maison à édifier; au contraire, onne saurait considérer comme conscientes les fonctions qui régularisent les mouvements du cœur ou la sécrétion desglandes.Sans doute, il ne faudrait pas dire qu'aucun phénomène biologique n'est conscient, et qu'il n'y a pas de phénomène. »

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