Devoir de Philosophie

En quoi la démocratie est-elle toujours à conquérir ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

 * Voici un intitulé qui nous interroge sur une notion centrale, la démocratie. Étymologiquement, ce terme, venu du grec comme la plupart des notions qui gouvernent notre paysage culturel et idéologique, signifie gouvernement ou commandement du peuple. La démocratie désigne, de nos jours, un régime politique dans lequel le peuple - l'ensemble des citoyens - détient la souveraineté au moyen du suffrage universel. La question posée possède, dès lors, cette signification : par quels caractères et dimensions le régime politique dans lequel le peuple détient la souveraineté est-il, constamment et quelles que soient les circonstances, le fruit d'une acquisition par la lutte ?

  • TERMES DU SUJET:

-    En quoi : ici, à quel titre, sous quels aspects, par quels caractères, etc. -    Démocratie :  Régime politique dans lequel le peuple, c'est-à-dire l'ensemble des citoyens, détient la souveraineté au moyen du suffrage universel. Gouvernement du peuple et pour le peuple. -    Toujours : dans la totalité du temps, continuellement, constamment, invariablement, quelles que soient les circonstances. -    Conquérir: acquérir par les armes, soumettre par la force, obtenir en luttant, etc.

  • A. La démocratie est une notion politique.
 - C'est un régime né chez les Grecs.  - Elle ne s'applique pas nécessairement à tous.  - Elle se révèle alors comme une forme à conquérir.
  •  B. La démocratie moderne : les menaces qui pèsent sur elle.
 - La démocratie repose sur des fondements fragiles.  - Plusieurs menaces pèsent sur elle (totalitarisme, despotisme, etc.).  - Elle reste une perpétuelle conquête morale, afin de la protéger.
  •  C. La démocratie économique : la conquête d'une plus grande égalité sociale.
 - La démocratie doit respecter les droits fondamentaux des individus.  - Les exclus doivent pouvoir participer à la vie de la nation : la démocratie reste une conquête pour la garantie des droits sociaux.   

« Cette démocratie n'est-elle pas le plus parfait des régimes ? En quoi cet exemple peut-il nous montrer que ladémocratie est toujours à conquérir, en tous temps et en tous lieux ? Les citoyens ne décident-ils pas du destin deleur communauté ? En quoi la démocratie est-elle une conquête ?Modèle tout au long de l'histoire occidentale, la démocratie grecque est toutefois fort imparfaite : elle fonctionne demanière élitiste, puisque femmes, métèques et esclaves n'accèdent pas au statut de citoyens.

Dès lors, il s'agitd'une démocratie limitée.Non seulement cette démocratie s'avère limitée, mais elle dégénère assez rapidement : le régime démocratiqueathénien est, à partir de 430 environ, incapable de gérer ses affaires intérieures.

D'où une crise, puisque le désordred'Athènes finit par engendrer la tyrannie.Que nous montre l'exemple d'Athènes, cette cité démocratique ? Que la démocratie, en son aurore, n'est pas unedonnée, mais une conquête, qu'elle révèle ses manques et ses imperfections.

Non seulement le régime du peuplen'est pas celui de tout le peuple, mais la démocratie peut s'inverser en tyran- - nie et finalement s'effondrer.

Régimede liberté parfaite, la démocratie semble minée dès sa naissance.

N'est-ce pas reconnaître que la démocratie, siremarquable qu'elle soit, n'est jamais une donnée, mais une conquête, une idée morale à perfectionner ? Ne faut-ilpas garantir à tous l'accès à la citoyenneté ? Ne faut-il pas faire en sorte que la liberté ne s'inverse point entyrannie ? La démocratie n'est pas.

Elle se fait et se conquiert progressivement, comme va nous le montrer l'exemplede la démocratie moderne.

Elle désigne un acte, non point une institution figée.D'une manière générale, la démocratie se forme, dès le départ, sur une base limitée.

Tous ne participent pas à sonfonctionnement.

C'est en ce sens qu'elle relève d'une appropriation permanente, sans cesse réitérée, d'une actiondestinée à maîtriser et dépasser ses imperfections.

La démocratie antique (d'où les femmes et les esclaves sontexclus) ne prendra une forme accomplie que lorsque les membres répudiés du groupe seront réintégrés dans lacommunauté politique.

Long travail de culture et de marche en avant historique, éthique et politique. B) La démocratie moderne, comme conquête s'originant dans des fondements fragiles. La démocratie moderne, distincte de cette démocratie antique, se fonde en partie sur les acquis de la Révolutionfrançaise.

Rousseau nous en fournit les principes, avec Du contrat social (1762), qui met en relief la nature dupacte démocratique.

Qu'est-ce qu'un État légitime ? Aux yeux de Rousseau, celui qui exprime la volonté générale ettrouve en elle sa légitimité.

L'État démocratique moderne naît de ces thèses de Rousseau et de l'action desrévolutionnaires de 1789.

Il prendra très progressivement son visage actuel, quand régresse la notion de citoyensactifs et de citoyens passifs et quand les femmes, à la Libération, acquièrent le droit de vote.

Définissons cettedémocratie moderne.

C'est un gouvernement du peuple et par le peuple, au moyen du suffrage universel ; ellen'implique nullement un système fonctionnant sans représentants et, en ce sens, s'éloigne de Rousseau.

Le peupledélègue, en effet, ses pouvoirs à un corps élu.

La démocratie représentative donne le pouvoir aux représentants dupeuple.

Ainsi, alors que la démocratie antique est directe et limitée, la démocratie moderne est à la fois illimitée etindirecte.Ici encore, malgré les apparences, la démocratie est davantage une conquête difficile qu'une donnée.

En effet, ladémocratie incarne un pouvoir politique fragile, sans cesse menacé par le vide.

D'où des risques de renversementdans un régime despotique ou totalitaire, comme nous le montre très bien Claude Lefort.La démocratie n'est jamais une donnée, mais une conquête, ce n'est jamais un fait, mais une volonté, ce n'estjamais une réalité, mais une création contre tous les dangers et tous les périls.

C'est dans un vide, nous dit Lefort,qu'elle s'origine.

Elle surgit, au tournant du XVIII siècle, quand s'impose l'idée d'un pouvoir politique dépourvu dumodèle d'un garant transcendant, tel ce Prince ou ce Roi, médiateur entre Dieu et les hommes.

Le systèmemonarchique de l'Ancien Régime donnait à voir un Principe sacré, le Souverain reflétant la gloire de Dieu.

À cefondement inconditionné succède, avec la Révolution, un fondement beaucoup plus fragile, puisque disparaît alorsl'idée d'une base sacrée.

D'où une faiblesse et une précarité liées à une institution politique où se dérobe l'ancienfondement sacré ou inconditionné : Dieu n'est plus la base de la politique et du régime politique.Dans ces conditions, la démocratie s'avère précaire et, dès lors, c'est une conquête contre des remises en questionpériodiques liées à sa nature même.

En mettant la Constitution à la racine du pouvoir, la démocratie institue commefondements l'homme lui-même et ses valeurs.

D'où les faiblesses extrêmes de la démocratie, la nécessité de laconquérir, de haute lutte, contre tous les périls qui menacent ce pouvoir dépourvu de la force du sacré.

Ladémocratie se conquiert parce qu'elle incarne un pouvoir rattaché au vide, à l'absence de fondements sacrés sisolides.

Ce n'est pas un fait, mais une bataille, comme le montre l'exemple des totalitarismes et dictatures quis'acharnent contre elle.

Être démocrate, c'est se battre contre la maladie totalitaire toujours menaçante, toujoursrenaissante, contre les tyrannies pouvant advenir dans le champ historique.« La démocratie s'institue et se maintient dans la dissolution des repères de la certitude.

Elle inaugure une histoiredans laquelle les hommes font l'épreuve d'une indétermination dernière, quant au fondement du Pouvoir [...].

Dansune société où les fondements de l'ordre politique et de l'ordre social se dérobent [...], la possibilité d'undérèglement de la logique démocratique reste ouverte.

» (C.

Lefort, Essais sur le politique, Seuil, p.

29).Oui, la démocratie est ici une conquête difficile, car les risques de dérèglement du système sont immenses.

Elle està conquérir contre les dangers de dérapages, les dérives, les dictatures, les totalitarismes, etc.

Ce que nous montretoute l'histoire moderne, quand naît, par exemple, à la suite d'élections libres, le totalitarisme nazi.

La République deWeimar accouche ainsi du troisième Reich.

Le 30 janvier 1933, le président Hindenburg appelle Hitler au poste dechancelier ; dès lors, s'établit la dictature nazie, avec élimination des opposants au régime.

Qu'est-ce à dire, sinonque la démocratie, de fonctionnement délicat, est une difficile conquête, une lutte des sujets, fidèles au vraicombat de l'homme ? La démocratie n'est pas seulement une formule politique, mais un choix moral, une volonté desebattre, contre les totalitarismes toujours menaçants, pour la liberté et la dignité, pour le respect de cette humanitédevant laquelle il faut s'incliner.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles