En quoi consiste la communication des consciences?
Publié le 04/09/2015
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c) Parfois, cependant, dans certains cas exceptionnels, nous avons, au cours d’une de ces conversations fortuites, l’impression subite d’avoir rencontré comme un autre nous-même : il nous semble lire dans ses yeux comme nous lisons en nous et nous lui portons un intérêt analogue à celui que nous nous portons à nous-mêmes. Il y a eu alors un commencement de communication des consciences.
B. La communication des consciences. — Ce phénomène ést paradoxal, car, d’une part, il implique l’unité des consciences et, d’autre part, non seulement exige leur pluralité ou plutôt leur dualité, mais encore l’accuse.
a) Pour expliquer cette mystérieuse pénétration d’une conscience par une autre ou plutôt pour l’éclairer par un fait analogue, nous sommes obligés de recourir à la connaissance que nous avons de nous-mêmes par introspection : la communication des consciences paraît se faire par intuition Non pas par une de ces intuitions divinatrices qui nous font passer comme instantanément du signe à la chose signifiée ou d’une donnée de l’observation à sa cause, mais, semble-t-il, par une de ces intuitions véritables qui supposent l’unité du sujet connaissant et de l’objet connu. Je n’ai pas besoin d’interpréter les paroles, les gestes ou le regard de mon ami pour atteindre sa pensée profonde; cette pensée, je la lis dans ses yeux; il me suffit de le voir ou même de le sentir à côté de moi, car les silences dans la nuit sont parfois plus éclairants que de longs bavardages. On dirait que les consciences sont fondues en une seule.
b) Néanmoins, non seulement l’autre reste autre et même différent de nous, mais encore nous voulons qu’il diffère de nous : s’il ne faisait que noirs reproduire, il ne nous intéresserait plus et ne provoquerait pas notre affection. Aussi cette communication accuse en un certain sens la distinction des consciences au lieu de la supprimer : avant ce regard pénétrant qui a semblé nous fondre en un, nous n’étions l’un pour l’autre que deux voyageurs, deux étudiants ou deux soldats; mais, à partir de cet instant, je suis moi pour lui; il m’accepte avec tout ce que je suis comme je l’accepte tel qu’il est.
«
D'abord, un système ·sensoriel fort complexe la met en relation avec la
réalité matérielle; les oreiHes et les yeux, en particulier, con•stituent, à l'état de veille, comme des fenêtres cünstamment ouvertc·s sur le monde environnant.
Bien plus, l'individu conscient faisant partie par son corps de ce monde dont on prétend le couper, la communication assurée par les .sens devient une véritable communion.
En·suite, Ia conscience n'est .pas non plus isolée dtr" monde de C{)nscience·s dans lequel elle vit; c'est un fait aus•si indiscutable que la perception du monde extérieur; nous communiquons avec les autres, échangeant nos
pensées, noua fai·sant part de nüs sentiments ou les laissant deviner sans le vouloir : je vois• la colère de celui avec qui je discute tout comme je
vois l'ébullition de l'eau.
Mais si le fait de la communication des consciences ne peut être mis en doute, on peut se demander en quoi elle consiste, comment elle se fait.
Avant de
proposer une réponse à cette question, nous commencerons, pour bien voir ·de quoi il s'agit, par e•squisser la phénoménologie de la com munication de•s• consciences, c'est-à-dire par la décrire.
1.
Phénoménologie de la communication des consciences.
- La vie en société nous fournit des occasions constantes d'entrer en rappo·rt avec
les autre.s, mûs les rapports avec autrui n'entraînent que rarement une vérrtable communication de consciences.
A.
TraV'aux .d'approche.
- Pour situer la communication des consciences dans 1la hiérarchie des relatio•ns que nous pouvons avoir avec les autres, prenons un cas conc.ret de l'exrpérience la plus commune : je vais à un guichet pour un renseignement ou une formalité quelconqŒe et je fais la
queue en attendant mon tour; examino·n·s mon attitude à l'égard des êtres conscients qui rn 'entourent.
a) D'une façon générale et malgré la politesse de notre compürtement à leur égard, nous ne traitons guère ces inconnus que nous coudoyons· que comme des choses ou des objets, les considérant uniquement en tant qu'ils peuvent être ·obstacles {)U moyens par rapport aux fins que nous poursui vons.
Ains•i, dans le hall de la gare, ~a longue file de voyageurs qui m'ont précédé au bureau de location ne représente pour moi que des gens qui me retardent et à cause desquels je risque d'être obligé de me contenter d'une place ·debout sinon de rester sur le quai; la pers.onne affectée à ce •service n'est p-our moi qu ''lln employé comme les autre•s, caractérisé, non par son physique et encore moins par se.s qualit·és intellectuelles et morales,
mais par le fait qu'~! est chargé de la location et non de la distribution des billets, de la location pour les trains de la ligne de Bordeaux et non p-our ceux de la ligne de Toulouse.
La personne dj.sparaît sous la fonction.
A la personne, à sa pensée, à se.s intérêbs, à ses soucis d'employé et à plus f.orte raison de père ou de fiancé, je n'accorde aucune attention.
Quel
ques cas exceptionnels mis à part, quand je m'adresse à un guichet, je suis si loin de chercher à entrer en communication avec une conscience que j'ai recours de préférence, lorsqu 'eUe existe, à une machine capable de me procurer ce que je désoire : ainsi en est-ii pour les billets de quai.
b) Il est cependant rare, si nous nous -observons durant un laps de temps d'une certaine importance, que cette méconnaissance d'autrui reste.
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