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Emmanuel KANT ( 1 724-1804) Théorie et pratique, chapitre II

Publié le 17/09/2022

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« Emmanuel KANT(1 724-1804) Théorie et pratique, chapitre II. « Relativement au bonheur, aucun principe universelle­ ment valable ne peut être donné pour loi.

Car aussi bien les circonstances que l'illusion pleine de contradictions et en outre sans cesse changeante où l'individu place son bonheur (personne ne peut lui prescrire où il doit le placer) font que tout principe ferme est impossible et en lui-même impropre à fonder une législation.

La proposition : Sa/us publica suprema civisatis /ex est (1) garde intacte sa valeur et son autorité, mais le salut public qu'il faut d'abord prendre en considéra­ tion est précisément cette constitution légale qui garantit la liberté de chacun par des lois ; en quoi il demeure loisible à chacun de rechercher son bonheur dans la voie qui lui paraît la meilleure, pourvu seulement qu'il ne porte aucune atteinte à la liberté légale générale, par conséquent aux droits des autres co-sujets.» (Bordeaux et académies rattachées, juin 1996, série S) (1) Le salut public est la loi suprême de l'Etat. Kant examine la question du bonheur.

Il ne saurait être la fin de l'État en raison même de sa nature.

Le but de l'État est de garantir la liberté par des lois, d'offrir des conditions qui rendent possible la recherche du bonheur.

Celle-ci ne peut être qu'individuelle.

Ainsi le texte exhibe le sens du bonheur (« Relativement [ ...] législation »), ce sens implique qu'il ne peut être la finalité du politique(« La proposition[ ...

] lois»). La recherche du bonheur relève de l'intérêt particulier(« en quoi[ ...

] co-sujets»).

Nous analyserons les raisons de l'impos­ sibilité de trouver un principe conduisant au bonheur et par là, nous examinerons la nature du bonheur.

Cela nous conduira à expliquer en quoi le bonheur ne peut être la fin de l'État et nous essayerons de comprendre si la recherche du bonheur est compatible avec le respect de la liberté et des o SUJETS ET PISTES D1 ÉTUDE • droits d'autrui.

Ce texte s'inscrit dans l'.enjeu suivant : en quoi bonheur et politique sont-ils incompatibles ? • Le premier mouvement du texte nous montre que le bonheur est une notion équivoque, changeante, qu'on ne peut en donner un principe.

Qu'en est-il ? L'expérience désigne sans équivoque le bonheur comme la fin suprême de toute activité. Tous les hommes veulent être heureux, le bonheur est l'objet d'un désir universel.

« Tous veulent être heureux mais lorsqu'il s'agit de savoir ce qui rend la vie heureuse, ils sont dans les ténèbres » (Sénèque).

De même Descartes écrit « mais plusieurs n'en savent pas les moyens».

En effet les moyens pour être heureux sont multiples ; je peux èhoisir l'argent, la gloire, le plaisir, le travail comme figures du bonheur, mais comment y parvenir ? Y a-t-il une ou des règles sûres qui si elles étaient suivies me conduiraient au bonheur ? Autrement dit, c'est la question à laquelle répond le premier mouvement du texte.

Les hommes s'accordent pour faire de la recherche du bonheur le vrai contenu de l'existence, mais lorsqu'il s'agit de définir ce qu'est le bonheur, l'accord entre les hommes ne va pas de soi.

Pour les uns ce sera la richesse, pour d'autres la gloire, pour d'autres encore l'amour.

Il semble que ce que les hommes désignent sous le terme de bonheur est essentiellement ce qui leur manque à un moment de leur vie.

De plus la conception du bonheur semble varier pour un même individu.

Les désirs des hommes sont changeants, on peut vouloir l'argent si on est pauvre, la santé si on est malade.

Le fait d'être en bonne santé ne rend pas forcément heureux, mais si cette santé vient à manquer alors le bonheur prend la figure de la santé.

Ainsi Kant écrit « les circonstances ...

l'illusion pleine de contradictions et en outre sans cesse changeante où l'individu place son bonheur ».

Le bonheur apparaît comme indéterminé.

Mais l'homme cherche le bonheur car il est pour lui synonyme de quiétude et de paix, le bonheur une fois atteint nous délivrerait du manque et de l'inquiétude.

Donc les jugements sur le bonheur étant variables, ils dépendent du degré de culture de chacun, des conditions sociales, des désirs ; les moyens et les contenus du bonheur sont purement empiriques, seule l'expérience donne un sens concret au bonheur.

Bonheur toujours partiel et temporaire. SUJETS ET PISTES D1 ÉTU~~ L'expérience ne peut donner ni règles, ni principes infaillibles.

L'expérience nous apprend que l'argent ne fait pas le bonheur mais la pauvreté n'est pas non plus ·une source incontestable du bonheur.

Il n'est pas possible de déterminer « avec une certitude complète ce qui pourrait véritablement rendre heureux » ( Kant) car l'homme n'est ni omniscient, ni omnipotent.

C'est le sens que revêt la première phrase du texte.

Le· bonheur semble n'être qu'un idéal qui aide l'homme à supporter sa condition humaine faite de manque et d'inquiétude.

Si le bonheur est possible il n'y a cependant aucune règle pour l'obtenir.

Il ne peut exister que des conseils, c'est-àdire des recommandations quant aux moyens choisis pour être heureux. Les conseils expriment des conditions subjectives, ce qui est vrai pour l'un peut ne pas l'être pour l'autre.

Kant appelle ces conseils des « impératifs hypothétiques ».

Partant le bonheur est « impropre à fonder une législation », c'est-àdire qu'on ne peut ériger le bonheur en pouvoir de faire des lois, le bonheur ne peut donner lieu à aucun principe, règle, loi.

Il est donc impossible de trouver un principe conduisant au bonheur, et on ne peut fonder aucune loi sur le bonheur en raison de son caractère instable, empirique, particulier à chaque homme. Le bonheur concerne la sphère privée de l'individu alors que le politique est affaire publique, dès lors bonheur et politique semblent être incompatibles.

Néanmoins les hommes réclament à l'État de faire leur bonheur.

Le texte nous montre que le bonheur ne peut pas être la finalité de l'État.

Pourquoi ? Le second mouvement du texte indique sans équivoque que si le salut public est la finalité de l'État, le sens de ce salut réside dans la « constitution légale qui garantit à chacun la liberté par des lois ».

L'histoire de la philosophie nous montre qu'il n'en a pas toujours été ainsi.

Dans !'Antiquité, pour Aristote en particulier, le bonheur dépend de la science politique, car il n' y a pas de séparation entre.... »

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