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Droit: nature et norme ?

Publié le 13/01/2004

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Antigone est là pour nous rappeler que les lois du coeur, qui sont des lois non écrites, sont parfois plus profondes et plus vraies que les lois positives, que les « lois écrites » de la Cité. Il y a aussi, comme le dit Kant, au-dessus des lois positives qui changent d'un pays à un autre, d'une époque à l'autre, des lois non écrites qui sont intemporelles et que les hommes ne peuvent transgresser sans renoncer à leur humanité.De même, au-dessus des droits positifs particuliers et variables, il y a des droits universels et inaliénables : droit à la vie, à l'éducation, à l'instruction, au travail, à la participation à la vie politique, à la propriété. Ces droits sont appelés « droits naturels » parce qu'ils tiennent à la nature de l'homme.E) L'idée de droit naturel.L'idée de droit naturel est ancienne. Elle signifie que la nature des choses ou de l'homme est le fondement originaire où toutes les conventions trouvent leur légitimité. Ainsi, la loi positive ou conventionnelle, qui est fixée par le législateur, ne peut être juste que dans la mesure où elle est conforme aux principes naturels. Pour Aristote, la fin du droit est le juste. Or la nature a fixé de justes proportions, de justes rapports entre les choses.
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« Le droit positif comme produit de l'histoire. Le droit positif est, sans conteste, le produit de l'histoire et, en tant que tel, porte la marque des guerres, desrévolutions.

C'est ainsi que le système juridique français porte les traces du droit romain, du droit féodal, du codenapoléonien même si ce dernier a été profondément remanié.

Faut-il pour autant affirmer avec Hugo et Von Savigny,représentant au XIX ième le droit historique, que les moeurs et les croyances des peuples seraient l'unique sourcedu droit et que le législateur, dans un pays donné, ne devrait pas chercher à faire oeuvre originale, mais se borner àtraduire dans les lois ce que lui dictent les réalités sociales et historiques concrètes ? Si le droit varie d'une époqueà une autre, d'un pays à l'autre, s'il est le résultat de « sourdes forces agissantes », sur qui peut se fonder salégitimité ? Pour Marx et Engels, toute société est marquée par des luttes de classes.

Le besoin s'impose doncd'un pouvoir qui, « placé en apparence au-dessus de la société, doit estomper le conflit, lemaintenir dans les limites de l'ordre » (Engels). Si l'Etat peut apparaître comme le représentant officiel de toute la société, sa synthèse en un corpsvisible, c'est parce qu'en son fond il n'est jamais que l'Etat de la classe qui, pour son tempsreprésente elle-même toute la société.

Ainsi, l'Etat antique est l'Etat des citoyens propriétairesd'esclaves, l'Etat féodal est celui de la noblesse, l'Etat moderne, celui de la bourgeoisie.

Danschaque cas, l'Etat est « une organisation de la classe exploiteuse pour maintenir ses conditions de production extérieures, donc surtout pour maintenir ses conditions de production extérieures,donc surtout pour maintenir par la force la classe exploitée dans des conditions d'oppressionsdonnées par le mode de production existant (esclavage, servage, salariat) .

» (Engels ). Tout Etat doit assurer des tâches de maintien de l'ordre, de répression mais aussi des tâches delégitimation et d'occultation.

Le droit fonctionne comme idéologie qui légitime et cache la réalitéde la domination d'une classe sur une autre. C'est ainsi qu'en proclamant le droit comme idéal éternel et universel, l'idéologie juridiquebourgeoise occulte et facilite son rôle politique et économique qui consiste à perpétuer lesrapports de production capitalistes. Pour Marx et Engels , les pensées dominantes dans une société ne sont pas autre chose que « l'expression des rapports qui font d'une classe la classe dominante ; autrement dit ce sont les idées de sa domination ».

Mais toute classe dominante est obligée pour se maintenir et pour réaliser ses buts de représenter son intérêt comme l'intérêt commun de tous les membres de lasociété, cad « de donner à ses idées la forme de l'universalité ». C'est pourquoi le droit naturel moderne prétend être fondé sur la raison et se présente comme éternel et universel.

Il n'est cependant rien d'autreque le droit de l'homme égoïste, de la société bourgeoise soucieuse de ses intérêts. Ce droit a pris naissance au XVII ième siècle et s'est développé au XVIII ième siècle à un moment où la bourgeoisie ne détenait pas encore le pouvoir politique mais dominait économiquement.

Après la Révolution de 1789, il devient l'idéologie dominante de la bourgeoisie au pouvoir.

Lesluttes sociales révèlent son caractère de classe et au XIX ième siècle, Engels , jugeant l'idéologie juridico-politique du XVIII ième siècle peut alors écrire : « Nous savons aujourd'hui que ce règne de la raison n'était rien d'autre que le règne idéalisé de la bourgeoisie ; que la justice éternelle trouva sa réalisation dans la justice bourgeoise ; que l'égalité aboutit à l'égalité bourgeoise devant la loi ; que l'on proclama comme l'un des droitsessentiels de l'homme… la propriété bourgeoise ; et que l'Etat rationnel, le contrat social de Rousseau, ne vint au monde et ne pouvait venir aumonde que sous la forme d'une république démocratique bourgeoise ».

(Engels , « Socialisme utopique & socialisme scientifique »).

Droit et raison Ce n'est pas parce que l'histoire peut jouer un rôle décisif dans l'instauration du droit que la légitimité de celui-cidevient du même coup arbitraire.

Qu'un pouvoir décide d'instaurer telle ou telle loi est toujours contestable et,d'ailleurs, la contestation existe.

Le temps ne donne jamais une légitimité suffisante au droit.

Mais n'est-il pas dansla nature même du droit de s'en accommoder ? Le corps des règles juridiques n'est pas un système définitif : il estsusceptible de modifications permanentes, ce dont témoigne la jurisprudence.Son pouvoir propre est aussi dans cette capacité permanente de s'adapter à une réalité changeante.

Mais c'est,finalement, au pouvoir même de la raison, confronté à l'expérience humaine, qu'il faut rendre le droit.

Elle lui donneautorité parce qu'elle est capable de faire du droit l'instrument de la réalisation de ses propres fins.

Sans le recoursà l'idée de justice, par exemple, le droit ne peut assurer fermement son emprise sur une communauté politique.

C'estparce qu'il se présente idéalement comme une tâche infinie de la raison qu'il possède une légitimité propre et qu'ilpermet aux hommes de ne pas désespérer de son pouvoir.

En ce sens, le droit d'une société est toujours à faire.

Ilne peut se contenter de règles coutumières, la coutume n'étant jamais une raison suffisante de ce qui est bien.. »

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