Doit-on craindre la domination illimitée de la rationalité scientifique ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
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dans le Traité du vide : la science a son ordre propre, l'ordre de l'expérience sensible et de la raison universelle.
On peut donc ici montrer que la domination illimitée de la rationalité scientifique est une « injustice », qu'il faut toujoursreplacer cette rationalité sur son terrain.
En effet, l'application de la science à un autre « ordre » - à l'échelle duparticulier – reviendrait à réduire sa portée.
Pourtant la question de la place de la rationalité, et de son rapport à l'ensemble de la vie humaine, se pose.
Nefaut-il contenir la rationalité scientifique au rang de moyen ? * ** La rationalité scientifique, et son expression en termes de pouvoir : la technologie, ne donne pas les fins mais nefournit que des moyens.
Ainsi, comme le remarquait Nietzsche dans le Gai savoir , la science elle-même suppose une foi, quelque chose qui est au fondement de cette recherche de vérité et de ce type de compréhension du monde.Avec la science, la fin n'est pas donnée.
En effet, la rationalité scientifique n'est juste qu'un des outils mentauxpermettant d'atteindre un savoir ; mais en aucun elle ne peut délivrer une technique.
En découvrant la théorie de larelativité, Einstein ne produisit pas la forme achevée de ce qui est aujourd'hui la bombe atomique.
Il faut considérerla science comme une activité contemplative ne permettant nécessairement d'arrivée à une fin : un des risques dela contemplation est l'isolement et l'enfermement.
Une domination illimitée de la science serait alors une dominationou une suprématie des moyens sur la fin.En outre, on peut faire droit à une certaine conception de la vérité qui ne peut se révéler dans le discoursscientifique.
Ainsi, Heidegger dans Qu'est-ce que la vérité ? analyse le mot grec de vérité (aletheia) comme « dévoilement ».
La vérité scientifique, elle, repose essentiellement sur la prédictibilité et la possibilité de manipulerles objets décrits sous certaines lois.
La vérité poétique, elle, nous « ouvre » sur le monde, nous le « révèle », etnous révèle à nous même.
Pourtant, l'époque moderne s'est vue être le théâtre d'un renouveau de la poétique.
Eneffet, certains poètes comme Jacques Reda, poussent le vice à faire entrer des notions propres à la science dans lapoétique.
Ainsi, l'adoption du système métrique tend à concilier le jeu de la science et de la logique avec la poésie. Néanmoins, une telle forme de poésie altère cette vérité qui serait sensée nous ouvrir au monde et nous révéler ànous même.
En ce sens, la domination illimitée de la rationalité scientifique exclut d'autres discours qui lui sontirréductibles et constitue donc la perte d'un sens, un appauvrissement.
* ** Ainsi, on peut craindre non une domination sans limite de la rationalité scientifique, laquelle rationalité étant limitéepar la méthode qu'elle suppose, mais une confusion des ordres qui fait passer pour rationalité ce qui n'est quetyrannie.
Il faut en effet faire droit à d'autres rationalités, ou discours, lesquels permettant d'appréhender dessecteurs du monde vécu qui échappent de fait à la scientificité.
En ce sens, on peut considérer que la notion devérité ne se réduit pas à la notion scientifique de vérité.
La crainte, si elle a lieu d'être, ne doit donc pas tant portersur la rationalité scientifique elle-même que sur son usage.
Mais pourtant, la domination illimitée de la rationalitéscientifique pourrait s'accomplir avec le changement des mœurs et de la morale ; de ce fait la peur serait donc unsentiment obsolète : « la connaissance par amour de la connaissance, dernier piège que nous tend la morale et noustombons une fois de plus dans ses rets »..
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