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DOCUMENTATION COMPLÉMENTAIRE - Contes Fantastiques de Théophile Gautier

Publié le 12/06/2015

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gautier

·  « Onuphrius

Paru en 1832 dans La France littéraire sous le titre imprononçable d'Onuphrius Wphly, ce récit fut inséré en 1833 dans Les Jeunes-France, romans goguenards, avec ce titre : Onuphrius ou les vexations fantas­tiques d'un admirateur d'Hoffmann qui révèle les distances que prend Gautier avec le « fantastiqueur « allemand.

 

Ce conte est une sorte de catalogue de situations et de mésaventures étranges. Le ton est bien différent de celui de La Cafetière, écrit l'année précédente. Mais son intérêt n'est pas seulement d'ordre fantastique ; Gautier a mis dans ce personnage qu'il condamne beaucoup de lui-même. Ce récit, qui nous révèle les goûts artistiques et vestimentaires d'un jeune homme de vingt ans, peut aussi être lu comme un reportage sur la jeune génération romantique.

·   « La Cafetière « et Hoffmann

Parue dans Le Cabinet de lecture le 4 mai 1831, puis dans d'autres revues, La Cafetière fut recueillie en 1852 dans La Peau de tigre, chez H. Souverain, sous le titre d'Angéla. Le conte reprit son titre initial dans La Peau de tigre, édité en 1866 par M. Lévy. Ce premier conte doit beaucoup à Hoffmann (cf. livre de l'élève, Parcours thématique «, p. 243), et en particulier l'idée d'animer une cafetière.

Voici deux extraits du Vase d'or d'Hoffmann où, sans doute, Gautier a puisé son inspiration :

[Amoureuse de Théodore, la jeune Véronique consulte une sorcière : [ ..1 Une fois le calme rétabli, Véronique maîtrisa son trouble ; le malaise ressenti sur le palier s'était dissipé et la vieille elle-même ne lui paraissait plus si répugnante. Elle osa enfin jeter ses regards sur la pièce. Une écoeurante ménagerie d'animaux empaillés pendait au plafond ; en désordre, sur le plancher, tout un attirail de mysté­rieux instruments ; dans la cheminée brûlait un méchant feu bleuâtre, d'où jaillissait de temps à autre un crépitement d'étin­celles jaunes. Soudain un bruissement d'ailes glissait d'en haut et d'horribles chauves-souris à face humaine, qu'un atroce rictus défigurait, voletaient en tous sens. Une flamme quelquefois allait lécher le mur noir de suie : les hurlements d'effroi qui éclataient alors remplissaient Véronique d'angoisse et d'horreur.

Vous permettez, ma jolie ? dit la vieille en ricanant. Elle avait saisi un grand goupillon et, après l'avoir plongé dans le chaudron de cuivre, elle aspergea le foyer. Le feu s'éteignit : une fumée opaque envahit la pièce, qui fut plongée dans le noir. Mais bientôt la vieille revint du débarras avec une chandelle allumée. Plus aucune trace de bêtes, plus aucun attirail : Véronique n'aperçut qu'une chambre tout à fait ordinaire et misérablement meublée. La vieille s'approcha d'elle et lui dit de sa voix criarde : Je sais fort bien ce qui t'amène, ma petite. Parions que tu voudrais savoir si tu épouseras Anselme, quand il sera devenu Conseiller aulique. - Véronique était figée d'épouvante, mais la vieille poursuivit : Tu me l'as déjà dit chez ton père. La cafetière qui était devant toi, tu te rappelles ? c'était moi. Tu ne me reconnais pas ? [ .1

Nouvelle apparition de la cafetière plus loin, alors que Théodore se trouve enfermé dans un flacon de cristal, sur un rayon de la bibliothèque de l'alchimiste Lindhorst.

CONTES FANTASTIQUES

[..] La voix de Serpentine avait pénétré comme un rayon de soleil dans la prison d'Anselme : le cristal, cédant à sa puissance, se dilata, et Anselme put remuer et respirer librement. Sa souffrance s'apaisait peu à peu : évidemment, Sepentine l'aimait toujours et elle seule lui rendait son emprisonnement supportable. Sans plus se soucier des écervelés qui partageaient son infortune, il s'absorba donc entièrement dans la pensée de l'adorable Serpentine.

Mais soudain, à l'autre extrémité de la pièce, s'élevèrent confusé­ment des grognements exécrables. Anselme ne tarda pas à décou­vrir qu'ils provenaient d'une vieille cafetière au couvercle ébréché, placée sur un buffet bas, à l'opposé de la bibliothèque. Puis, l'ayant examinée plus attentivement, il vit se préciser peu à peu, défraîchis, répugnants, ratatinés, les traits d'une figure de femme.

E.T.A. Hoffmann, Le Vase d'or, in Contes, Folio Gallimard.

·    « Omphale et les tapisseries

Omphale ou la tapisserie amoureuse parut en 1834 dans Le Journal des gens du monde, avant d'être repris en volume sous le titre Omphale, his­toire rococo, dans Une larme du diable, Dessessart, 1839.

Ce conte évoque, comme La Cafetière, l'époque de la Régence, mais le ton est plus détendu, plus léger, plus badin. Dans les deux contes, des tapisseries s'animent et il semble bien que Gautier ait été particulièrement sensible à cette forme de fantastique ou, du moins, que la vue d'une tapis­serie ait toujours suscité chez lui quelques fantasmes.

Dans Mademoiselle de Maupin, après avoir longuement décrit une tapisse­rie, l'héroïne raconte les appréhensions de sa petite enfance, et cette confidence ressemble fort à un aveu de Gautier lui-même :

Je te parle longuement de cette tapisserie, plus longuement à coup sûr que cela n'en vaut la peine ; — mais c'est une chose qui m'a toujours étrangement préoccupée, que ce monde fantastique créé par les ouvriers de haute lisse.

J'aime passionnément cette végétation imaginaire, ces fleurs et ces plantes qui n'existent pas dans la réalité, ces forêts d'arbres incon­nus où errent des licornes, des caprimules et des cerfs couleur de neige, avec un crucifix d'or entre leurs rameaux, habituellement poursuivis par des chasseurs à barbe rouge et en habits de Sarrasins.

Lorsque j'étais petite, je n'entrais guère dans une chambre tapissée sans éprouver une espèce de frisson, et j'osais à peine m'y remuer. Toutes ces figures debout contre la muraille, et auxquelles l'ondu­lation de l'étoffe et le jeu de la lumière prêtent une espèce de vie fantastique, me semblaient autant d'espions occupés à surveiller mes actions pour en rendre compte en temps et lieu, et je n'eusse pas mangé une pomme ou un gâteau volé en leur présence. Que de choses ces graves personnages auraient à dire, s'ils pouvaient ouvrir leurs lèvres de fil rouge, et si les sons pouvaient pénétrer dans la conque de leur oreille brodée. De combien de meurtres, de trahisons, d'adultères infâmes et de monstruosités de toutes sortes ne sont-ils pas les silencieux et impassibles témoins L

 

Gautier, Mademoiselle de Maupin, chap. XII, GF-Flammarion.

gautier

« CONTES FANTASTIQUES Plessy, étant encore débutante, ne dédaigna pas d'accepter un rôle: - c'était celui de Béatrice dans Jodelet.

- Et que notre pauvre Edouard était comique dans les rôles d'Arlequin! Nous étions jeunes, toujours gais, souvent n'cbes., -Gautier prosateur Gérard de Nerval, Petits châteaux de Bohême, in Œuvres, tome !, Garnier.

On sait que Baudelaire dédia ses Fleurs du mal à Gautier, "poète impec­ cable"· Dans un article qu'il lui consacra, et qui pamt dans l'Artiste le 13 mars 1859, il essaya de définir l'originalité de ce poète auteur aussi de romans et de nouvelles.

Ce souci permanent, involontaire à force d'être naturel, de la beau­ té et du pittoresque devait pousser l'auteur vers un genre de roman approprié à son tempérament.

Le roman et la nouvelle ont un privi­ lège de souplesse merveilleux.

Ils s'adaptent à toutes les natures, enveloppent tous les sujets, et poursuivent à leur guise dijJérents buts, Tantôt c'est la recherche de ta passion, tantôt la recherche du vrai ; tel roman parle à la foule, tel autre à des initiés ; celui-ci retrace la vie des époques disparues, et celui-là des drames silen­ cieux qui sejouent dans un seul cerveau, Le roman, qui tient une place si importante à côté du poème et de l'histoire, est un genre bâtard dont le domaine est vraiment sans limites.

Comme beau­ coup d'autres bâtards, c'est un enfant gâté de la fortune à qui tout réussit.

JI ne subit d'autres inconvénients et ne connaît d'autres dangers que son infinie liberté.

La nouvelle, plus resserrée, plus condensée, jouit des bénéfices éternels de la contrainte: son f!tfet est plus intense; et comme le temps consacré à la lecture d'une nouvel­ le est bien moindre que celui nécessaire à la digestion d'un roman, rien ne se perd de la totalité de 1 'effet.

L'esprit de Théophile Gautier, poétique, pittoresque, méditatif, devait aimer cette forme, la caresser, et l'habiller des différents cos­ tumes qui sont le plus à sa guise.

Aussi a-t-il pleinement réussi dans les divers genres de nouvelles auxquels il s'est appliqué.

Dans le grotesque et le bouffon, il est très-puissant.

C'est bien la gaieté solitaire d'un rêveur qui de temps à autre ouvre l'écluse à une effusion de jovialité comprimée, et garde toujours cette grâce sui generis, qui veut surtout plaire à soi-même.

Mais là où il s'est le plus élevé, où il a montré le talent le plus sûr et le plus grave, c'est dans la nouvelle quej'appellerai la nouvelle poétique.

Baudelaire, Théophile Gautier, in Œuvres complètes, Le SeuiL -Gautier superstitieux Il croyait à la fatalité, au sens occulte des songes, aux envoûte­ ments et à toutes les superstitions que les esprits forts appellent 40. »

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