dissertation
Publié le 14/10/2014
Extrait du document
«
s'adresse, en dernier lieu, au public.
Ainsi, lorsqu'il faut informer le spectateur,
notamment dans les scènes d'exposition, les répliques des personnages
peuvent singulièrement manquer de naturel.
Plus encore, les monologues
portent l'artifice à son sommet : le personnage, soit pour exprimer ses tourments
intérieurs, soit pour renseigner le public, parle seul, tout haut.
C'est ainsi que
George Dandin, dans la pièce éponyme de Molière, ouvre la pièce en nous
confiant ses regrets de paysan marié à une femme noble.
Le procédé a un
intérêt essentiellement dramatique – le spectateur saisit d'emblée les enjeux de
la pièce.
En outre, dans le théâtre en vers, le caractère factice de la langue est
manifesté : qui, dans la vraie vie, parle en rimes ? L'alexandrin au théâtre, au
fond, ne fait que rappeler avec force l'idée que toute langue théâtrale est le fruit
d'un travail d'écriture approfondi.
Même Figaro, dont le monologue en prose
semble pourtant naturel, use des ressources poétiques de la langue.
Ainsi,
lorsqu'il se lamente sur les privilèges de la noblesse, il a recours à une
énumération de groupes nominaux de deux syllabes qui accentuent la charge
polémique du propos : « Noblesse, fortune, un rang, des places »… Cette
recréation poétique de la parole est portée par des intrigues et des personnages
eux aussi purement illusoires.
3.
L'action et les personnages ne sont que des constructions poétiques
L'action théâtrale est elle aussi éloignée de la réalité.
Certains dramaturges
n'hésitent pas à s'extraire totalement du réel pour le monde plus incertain du
rêve ou de « l'imagination la plus folle », comme le dit Ionesco.
Dans Le Songe
d'une nuit d'été par exemple, Shakespeare nous immerge dans une forêt
peuplée d'êtres merveilleux.
À la fin de la comédie, Puck (personnage)
s'adresse aux spectateurs en rappelant que toute la pièce n'a été qu'un
« songe » et que les personnages sont des êtres rêvés : « Ombres que nous
sommes […] vous n'avez fait qu'un somme.
» Quand, à l'inverse, le dramaturge
fait place au réalisme, il se doit de créer l'illusion du réel.
Cette illusion passe
par des effets de condensation ou d'amplification, de resserrement ou de
dilatation.
Dans George Dandin , par exemple, le monologue d'exposition
amorce la pièce par une situation de crise, qui suit de près le mariage du
paysan Dandin avec la jeune noble ; le dramaturge, au lieu de nous représenter
les motifs qui ont présidé à cette union, choisit d'en exposer directement les
conséquences.
Les personnages, leurs caractères, leurs émotions sont
également de purs artifices : Phèdre, et sa « fureur », est un condensé de
passions humaines, tandis que l'Harpagon de Molière est un type proprement
inhumain de l'avarice.
Le théâtre peut donc chercher à « faire vrai », ou bien, au
contraire, tourner le dos à toute forme de réalité, mais dans tous les cas il ne
produit qu'un univers factice.
Toutefois, cet art de l'illusion est porteur d'une
certaine réalité..
»
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