Diderot et l'Encyclopédie (cours)
Publié le 12/03/2022
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l’ampleur du projet et celle de sa réalisation, grâce surtout à l’obstination de Diderot. Pour la première fois, un ouvrage encyclopédique réunit une multiplicité de collaborateurs : environ 200, qui d’ailleurs ne sont pas tous identifiés. Diderot peut se vanter d’avoir obtenu les meilleurs spécialistes : d’Alembert pour les mathématiques, Du Marsais pour la grammaire, Rousseau pour la musique, Daubenton pour l’histoire naturelle. Diderot donnera lui-même environ 5 000 articles. Sans doute beaucoup sont de simples compilations. En histoire de la philosophie, il utilise abondamment Brucker {Historia critica philosophiae, 1742-1744). Buffon est lui aussi quelque peu pillé. Au côté de Diderot, le chevalier de Jaucourt rédige lui aussi un nombre considérable d’articles dont certains importants, en particulier sur les questions politiques et juridiques. Mais il y a aussi Voltaire, le médecin Tronchin, le baron d’Holbach (articles de chimie, mais aussi «Prêtres» et «Théocratie»), Quesnay, Turgot, Marmontel ou Saint-Lambert (article « Génie »). Mais ce serait méconnaître Y Encyclopédie de ne retenir que quelques grands noms ou quelques grands articles (article « Economie politique » de Rousseau). La plupart des articles sont simplement d’honnêtes vulgarisations. Mais faire le point de l’avancement des sciences et des arts, contribuer à la circulation des idées, n’est-ce pas déjà tout l’esprit des Lumières ? Une autre nouveauté d’importance est la place donnée aux « arts », au sens de métiers, le terme de technique n’étant pas encore en usage. L'Encyclopédie ne sera donc pas limitée aux « sciences », en comprenant dans les sciences la philosophie, et même la théologie. « On a trop écrit sur les sciences, on n’a pas assez bien écrit sur les arts libéraux ; on n’a presque rien écrit sur les arts mécaniques » {Prospectus). Diderot sait qu’il n’a pratiquement pas de précurseurs. Il faut donc aller dans les ateliers, avoir avec les ouvriers de « longs et fréquents entretiens ». Il faut apprendre le vocabulaire très riche des métiers ; mais cela ne suffit pas : « Dans un atelier, c’est le moment qui parle et non l’artiste » (au sens artisan). Au-delà des mots, on ne peut donc se passer de figures. Diderot en prendra le plus grand soin : « On a envoyé des dessinateurs dans les ateliers. On a pris l’esquisse des machines et des outils. On n’a rien omis de ce qui pouvait les montrer distinctement aux yeux. » Et là encore, c’est une méthode d’analyse qui a été suivie : « C’est ainsi qu’on a formé successivement la machine la plus compliquée sans aucun
«
Diderot et lEncyclopédie
C'est à la fin de 1750, au milieu même du siècle, que paraît le
Prospectus de l'Encyclopédie rédigé par Diderot.
L'ouvrage, qui
devait être à l'origine une simple adaptation de la Cyclopaedia
anglaise de Chambers en deux volumes, prend très vite une
ampleur de plus en plus grande, affirme sa pleine originalité et
devient le symbole même des Lumières françaises.
Au XIXe siècle,
les Encyclopédistes désignent couramment les philosophes des
Lumières.
Cette importance historique est justifiée sous bien des
aspects.
Tout d'abord, l'édition prévue des huit tomes de texte et
des deux volumes de planches va passer à dix-sept volumes de
texte et onze volumes de planches.
Le tirage de la première
édition prévue à 1 500 exemplaires dépassera les 4 000, et elle
ne sera achevée qu'en 1772.
Des capitaux importants ont dû être
rassemblés : l'entreprise est une étape essentielle dans l'histoire
du commerce de « librairie », et elle aura de nombreux
prolongements: plusieurs rééditions en in-8° et in-4° de
nouvelles encyclo pédies (par exemple, celle du libraire
Panckouke, 1782-1832), sans parler du Grand Dictionnaire
universel de Pierre Larousse (17 volumes à partir de 1866), ou de
la Grande Encyclopédie dirigée par Marcelin Berthelot (32 volumes
à partir de 1885), qui se réclament d'ailleurs de l'œuvre de
Diderot.
Ne nous arrêtons pas à la contradiction apparente entre un
dictionnaire qui expose les connaissances selon l'ordre arbitraire
de l'alphabet et une encyclopédie qui organise les connaissances
autour du sujet traité.
Le sous-titre est d'ailleurs : «Dictionnaire
raisonné des sciences, des arts et des métiers».
Les Lumières se
sont toujours voulues ouvertes et répugnent à la clôture qui
implique une systématisation.
Il est entendu qu'il ne peut s'agir
que d'un « dictionnaire encyclopédique >> , comme le précise
d'Alembert: « Un dictionnaire encyclopédique joint à cet avan
tage [la commodité de la consultation] celui de montrer la liai
son scientifique de l'article qu'on lit avec d'autres qu'on est le
maître, si on le veut, d'aller chercher>> (article «Dictionnaire»).
Cette liaison scientifique, assurée par l'usage de renvois, est inspi
rée du Dictionnaire de Bayle.
La nouveauté est donc d'abord dans.
»
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