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Dialogues sur la religion naturelle, Deuxième partie - Hume

Publié le 23/03/2015

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Mais une conclusion peut-elle, avec quelque justesse, être transposée des parties au tout ? L'immense disproportion ne prohibe-t-elle pas toute comparaison et toute inférence ? De l'observation de la croissance d'un cheveu, pouvons-nous apprendre quelque chose sur la génération d'un homme ? La façon dont pousse une feuille, fût-elle parfaitement connue, nous instruirait-elle le moins du monde sur la végétation d'un arbre ?

Mais dussions-nous prendre les opérations d'une partie de la nature sur une autre, pour le fondement de notre jugement sur l'origine du tout (ce qui jamais ne sera admissible) : pourquoi encore choisir un principe aussi chétif, aussi faible, aussi borné que la raison et le dessein des animaux tels qu'ils se trouvent sur cette planète ? Quel privilège particulier a cette petite agitation du cerveau que nous appelons pensée pour que nous devions en faire ainsi le modèle de tout l'univers ? Sans doute, notre partialité en notre faveur nous la présente en toute occasion ; mais la saine philosophie doit se garder soigneusement d'une illusion aussi naturelle.

Dialogues sur la religion naturelle, Deuxième partie, trad. M. Malherbe, éd. Vrin, 1987, p. 74.

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« Textes commentés 47 L'argument principal que le sceptique Philon oppose, dans les Dialogues sur la religion naturelle, au « théisme expérimental » repose sur notre expé­ rience des inférences causales et critique l'usage qui en est fait par Cléanthe.

D'une part, comme il vient de le montrer, on ne saurait établir -fût-ce problématiquement -une relation causale sur un seul cas, comme on le fait en rapportant l'« objet »-monde à un Dieu créateur comme à sa cause.

Quel que soit l'objet, en effet, il ne révèle jamais à première vue ce qui l'a produit ; pour celui qui l'examine, « n'importe quelle chimère de sa fantaisie serait sur le même piedl » -et, d'ailleurs, Philon ne manquera pas de multiplier les hypothèses qui font concurrence à celle d'une intelligence créatrice (sixième à huitième parties).

Car, d'autre part, il conteste, comme dans le texte ci-contre, la suprématie accordée au modèle de l'activité finalisée des hommes.

La reli­ gion naturelle commet une faute logique grave, en prenant une partie de l'univers comme image de la cause productrice de cet univers ; ce n'est pas l'homme qui est à l'image de Dieu, comme la religion chrétienne le professe, c'est plutôt l'inverse, si l'on examine le raisonnement des théistes.

En réalité, ce raisonnement se construit sur une analogie parfaitement discutable, car il faudrait que les objets comparés (le monde et une machine, l'intelligence de l'homme et l'hypothétique intelligence du principe) soient aussi semblables que possible.

L'on peut aussi bien considérer l'univers comme un animal, ou une plante, sa production comme une croissance aveugle, ou son principe comme strictement matériel.

Mais ces hypothèses n'ont pas pour vocation de substituer un modèle à un autre ; elles appartiennent à la stratégie sceptique de Hume, qui veut ici délier la contemplation de l'ordre (d'ailleurs contestée par le fait du mal naturel) de l'inférence, au fond trivialement religieuse, d'une cause finale.

Si les hypothèses du théisme expérimental proviennent d'une authentique curiosité scientifique, elles ne peuvent se maintenir que par un reniement de cet attachement au vrai : finalement, elles ne se soutiennent que des mêmes motifs passionnels qui inspirent les croyances populaires et supposent, comme elles, l'ignorance -sauf que les savants peuvent ne pas vouloir savoir, quand beaucoup de déistes verraient leur foi se dissoudre, s'ils savaient.

La grande énergie de ces Dialogues sans ressentiment, tout le talent de l'auteur appliqué à masquer ses thèses, à écrire à double sens, à brouiller les pistes, la continuité d'une contestation intellectuelle à la fois nuancée, précise et décidée, font interpréter sa conclusion non comme une« volte-face» dont elle peut sembler donner l'apparence, mais plutôt comme la réduction du contenu intellectuel de la religion au peu qu'il est.

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Dialogues ...

, Il, p.

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