Devons-nous écouter ce que nous dit notre conscience ?
Publié le 11/08/2004
Extrait du document
Par la formulation même du sujet, il semble que nous nous placions d'emblée dans le champ de la morale. Plus exactement, il s'agit de définir et développer ce que pourrait être une conscience morale. Or notre conscience n'est-elle pas ce tribunal intérieur qui nous juge sans cesse et nous pousse à bien agir afin de ne pas avoir « un poids sur la conscience « c'est-à-dire des remords ou des regrets. Bien plus, écouter sa conscience, n'est-ce pas faire référence à une moralité intérieure : immédiate et naturelle ? Le sentiment qui se développe en moi donne par ma conscience peut se comprendre comme un guide de l'action. Pourtant, la conscience seule est-elle capable de produire une morale pure et universelle ? N'est-ce pas faire du sujet la norme de la morale donc une norme subjective ?
«
« Voici donc quand un homme décide "ceci est bien", quand il conclut "c'est pour cela qu'il faut que ce soit" et qu'il fait ce qu'il a ainsi reconnu bienet désigné comme nécessaire, l'essence de son acte est morale.
"Mais, cherami, vous parlez là de trois actions et non d'une seule : votre jugement, -"ceci est bien" par exemple, — votre jugement est un acte aussi ! Et cejugement ne pourrait-il, déjà, être ou moral ou immoral ? Pourquoi tenez-vous"ceci" pour bien plutôt qu'autre chose ? "Parce que ma conscience me le dit ; et la conscience ne dit jamais rien d'immoral, puisque c'est elle quidétermine ce qui est moral !" Mais pourquoi écoutez-vous la voix devotre conscience ? Qu'est-ce qui vous donne le droit de croire que sonjugement est infaillible ? Cette croyance, n'y a-t-il plus de conscience qui l'examine ? N'avez-vous jamais entendu parler d'une conscience intellectuelle? D'une conscience qui se tienne derrière votre "conscience" ? Votre jugement"ceci est bien" a une genèse dans vos instincts, vos penchants et vosrépugnances, vos expériences et vos inexpériences; "Comment ce jugementest-il né ?"C'est une question que vous devez vous poser, et, aussitôt après,celle-ci "qu'est-ce exactement qui me pousse à obéir à ce jugement ?" Carvous pouvez suivre son ordre comme un brave soldat qui entend la voix deson chef.
Ou comme une femme qui aime celui qui commande.
Ou encorecomme un flatteur, un lâche qui a peur de son maître.
Ou comme un imbécilequi écoute parce qu'il n'a rien à objecter.
En un mot vous pouvez écoutervotre conscience de mille façons différentes .
» NIETZSCHE, Gai savoir, §335.
Transition : La légitimité qu'il y a à convoquer la voix de la conscience dans la sphère pratique est remise en cause par les possibles dissensions qui peuvent avoir lieu entre ma conscience et celle d'autrui.
Ces désaccordspotentiels soulignent la nécessité pour la conscience individuelle de faire appel à un juge extérieur.
Troisième partie : L'identification de la voix de la conscience à Dieu permet de garantir son infaillibilité et permet de penser un accord entre les consciences.
3.1 La résolution du problème de l'impartialité.
« Cette disposition intellectuelle originaire et (puisqu'elle est la représentation du devoir) morale, qu'on appelle conscience, a en elle-même ceci de particulier, que bien que l'homme n'y ait affaire qu'aveclui-même, il se voit cependant contraint par sa raison d'agir comme sur l'ordre d'une autre personne.
Car le débat dont il est ici question est celui d'une cause judiciaire (causa) devant un tribunal.
Concevoir celui qui estaccusé par sa conscience comme ne faisant qu'une seule et même personne avec le juge, est une manière absurdede se représenter le tribunal; car s'il en était ainsi l'accusateur perdrait toujours.
C'est pourquoi pour ne pas être encontradiction avec elle-même la conscience humaine en tous ses devoirs doit concevoir un autre (comme l'homme en général) qu'elle-même comme juge de ses actions.
Cet autre peut être maintenant une personne réelle ou seulement une personne idéale que la raison se donne à elle même.
» KANT, Doctrine de la Vertu, §13.
3.2 Dieu comme juge intérieur.
« Une telle personne idéale (le juge autorisé de la conscience) doit pouvoir sonder les coeurs ; en effet le tribunal est établi dans l'intérieur de l'homme – en même temps elle doit être source de toute obligation, c'est-à-direqu'elle doit être une personne telle qu'en rapport à elle tous les devoirs en général doivent être considérés commedes ordres ; car la conscience est le juge intérieur de tous les actes libres.- Or comme un tel être moral doit enmême temps détenir toute puissance (dans le ciel et sur la terre), puisqu'il ne pourrait pas autrement procurer à seslois l'effet qui leur est approprié (ce qui appartient pourtant nécessairement à sa fonction judiciaire) et qu'on appelle Dieu un tel être moral ayant puissance sur toutes choses, il faut donc concevoir la consciencecomme le principe subjectif d'un compte à rendre à Dieu de ses actions ; on peut même dire que ce dernierconcept est toujours (même si ce n'est que de manière obscure) compris dans la conscience morale desoi. » KANT, Doctrine de la Vertu, §13.
CONCLUSION
La voix de la conscience n'est pas un tyran en l'homme mais joue le rôle de conseiller.
Parler de devoir d'écoute par rapport à la conscience ne suppose pas que l'homme en devienne l'esclave, sans quoi sa liberté d'agirserait remise en cause, mais lui laisse le choix de suivre ou de ne pas suivre les conseils de sa conscience.
Faire dela voix de la conscience le guide de nos actions suppose que son impartialité soit fondée, sinon notre consciencepersonnelle risque d'entrer en conflit avec d'autres consciences.
La voix de la conscience comprise comme troisièmepersonne, juge intérieur ou Dieu permet de répondre aux objections concernant l'infaillibilité de notre conscience etrend possible une correspondance entre les consciences..
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