devoir de philo
Publié le 04/10/2018
Extrait du document
«
contradiction en l'amenant à comprendre que ce qu'il soutient n'est pas soutenable.
Or, le
mobile du conflit séparant Calliclès et Socrate n'est pas innocent : il s'agit pour Socrate
d'affirmer que les meilleurs des hommes, ce sont ceux qui, avant de chercher à commander aux
autres, savent se commander, c'est-à-dire « être raisonnable, se dominer, commander aux
plaisirs et passions qui résident en soi-même », ceux qui sont, en somme, tout ce que Calliclès
refuse d'être.
En d'autres termes, les contradictions dans lesquelles Calliclès s'enferre ne sont
que le signe d'un conflit plus grave, qui n'est pas simplement d'ordre théorique, mais bien
pratique : le problème, ce n'est pas tant sa relation au discours vrai que son rapport à l'action
bonne.
Si le discours de Calliclès sombre ainsi dans la contradiction, c'est parce que Calliclès,
loin de se dominer lui-même, est sans cesse la proie de désirs eux-mêmes contradictoires : la
contradiction théorique est le signe d'un conflit pratique qui déchire un homme incapable de
mettre la bride à ses appétits, et par conséquent toujours écartelé entre des inclinations
opposées.
Et en effet, celui qui ne sait pas se commander lui-même devient la proie d'appétits
tyranniques qui le tirent à hue et à dia : comme le remarquait Descartes, le propre du désir, c'est
de nous présenter comme également désirables des satisfactions qui pourtant s'excluent
mutuellement (jouir des bénéfices de la gloire tout en profitant de la tranquillité de l'anonymat,
exercer le pouvoir sans avoir à en supporter les responsabilités.) ; le propre d'un désir, en
d'autres termes, c'est à chaque fois de présenter sa satisfaction comme la plus indispensable à
notre bonheur, quitte à entrer en conflit avec une inclination autre, qui pourtant se pose
elle-même comme pareillement indispensable.
Aussi, celui qui n'écoute que ses désirs entre-t-il
en permanence en conflit avec lui-même : loin d'être semblable à l'aboulique qui ne sait pas ce
qu'il veut, l'intempérant ne veut pas ce qu'il veut et veut ce qu'il ne veut pas, parce qu'il veut
tout et son contraire.
Or, si nos désirs peuvent à ce point se contredire entre eux, c'est parce
qu'ils sont en eux-mêmes contradictoires : dans le Gorgias , Socrate compare les appétits à un
tonneau percé, qui se vide à mesure qu'on le remplit ; et en effet, sitôt qu'un désir a été satisfait,
il se porte sur un autre objet, et répute décevant celui qu'il avait un instant plus tôt tant cherché
à posséder.
Le désir se renouvelle sans fin ni trêve, il élève aux cieux ce qu'il n'a pas pour le
faire déchoir plus bas que terre sitôt obtenu : tout se passe comme si le désir ne pouvait
déchirer notre volonté que parce qu'il est déjà en conflit avec lui-même – il veut être satisfait,
mais est insatisfait de l'être, puisque toute satisfaction obtenue est incapable de le satisfaire (par
le simple fait d'obtenir ce que je voulais, je me mets à vouloir autre chose).
Davantage même :
plus je cède à mes désirs, plus j'affaiblis ma volonté, et moins je suis capable de leur résister :
chacun traîne derrière soi le poids de ses mauvaises habitudes passées, qui finissent par le
rendre incapable d'un choix libre et délibéré.
Aussi ce conflit qui oppose en moi des désirs
contraires se double ou se redouble d'un conflit entre ce que mes désirs commandent, et ce qu'à
présent je veux.
Telle est la figure de l'incontinent chez Aristote ( Éthique à Nicomaque , Livre.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- devoir de philo, la réalité et le futur.
- devoir de philo
- Etre libre, est-ce ne désirer que ce qui dépend de nous ?
- Devoir philo: la nature humaine
- Devoir de philo sur le discours de la méthode