Désir: manque et puissance ?
Publié le 12/01/2004
Extrait du document
«
Peut-on toutefois déceler ce qui, désirable en soi, mériterait qu'on s'y consacre ? La distinction entre les désirs liésau corps et ceux de l'âme seule conduit à s'interroger sur la valeur accordée aux désirs.
Cela conditionne des choixd'existence.
C'est une question de liberté, de spiritualité aussi.L'ambiguïté du désir, capable de nous abaisser comme de nous élever, oblige à situer le problème au niveau éthique.Il peut conduire à vouloir aussi bien le mal que le bien.
La raison doit poser des bornes, sachant que sans le désir,elle ne suffirait pas à combler les espoirs de l'homme.
En témoigne la joie du savant, de l'artiste, du sage,satisfaction de l'âme, fruit de leur désir du vrai, du beau, du juste.
Et l'on ne désire jamais trop le juste, nousenseigne Descartes, si l'on ne confond pas vertu et fanatisme.
« Ce qu'on n'a pas, ce qu'on n'est pas, ce dont on manque, voilà les objets du désir et de l'amour.
» Platon, LeBanquet, ive s.
av.
J.-C.
« L'inquiétude [...] qu'un homme ressent en lui-même par l'absence d'une chose qui lui donnerait du plaisir si elleétait présente, c'est ce qu'on nomme désir.
» Leibniz, Nouveaux Essais sur l'entendement humain, 1765 (posth.)Le désir correspond à un état de tension, qui ne cesse qu'avec la possession de l'objet désiré.
Or, qui dit tension ditagitation, trouble, absence de repos.
C'est précisément ainsi que se définit l'inquiétude (ou la non-quiétude).
« Le désir est manque d'être, il est hanté en son être le plus intime par l'être dont il est désir.
» Sartre, L'Être et le Néant, 1943.
« Le désir fleurit, la possession flétrit toutes les choses.
» Proust, Les Plaisirs et les Jours, 1896. Tant qu'on désire, on « embellit » l'être désiré, en lui prêtant des qualités qu'éventuellement il n'a pas ; dès qu'ons'installe dans la possession, j on « enlaidit » au contraire l'être qu'on a jadis désiré, jusqu'à ne plus voir ce qu'il y ade beau en lui.
« Le bien que nous n'avons pu atteindre encore nous paraît supérieur à tout le reste; à peine est-il à nous, c'estpour en désirer un nouveau et c'est ainsi que la même soif de la vie nous tient en haleine jusqu'au bout.
» Lucrèce, De la Nature, der s.
av.
J.-C.
« Pour trouver des charmes dans la jouissance, il faut que le désir soit irrité par des obstacles [...I.
Jouir sansinterruption, c'est ne jouir de rien.
» Holbach (d'», Le Système de la nature, 1770..
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