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DESCARTES: Plaisirs du corps et de l'esprit

Publié le 27/02/2008

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descartes
Mais la principale différence qui est entre les plaisirs du corps et ceux de l'esprit consiste en ce que, le corps étant sujet à un changement perpétuel, et même sa conservation et son bien-être dépendant de ce changement, tous les plaisirs qui le regardent ne durent guère ; car ils ne procèdent que de l'acquisition de quelque chose qui est utile au corps, au moment qu'on les reçoit, et sitôt qu'elle cesse de lui être utile, ils cessent aussi, au lieu que les plaisirs de l'âme peuvent être immortels comme elle, pourvu qu'ils aient un fondement si solide que ni la connaissance de la vérité ni aucune fausse persuasion ne le détruisent. Au reste, le vrai usage de notre raison pour la conduite de la vie ne consiste qu'à examiner et considérer sans passion la valeur de toutes les perfections, tant du corps que de l'esprit, qui peuvent être acquises par notre conduite, afin qu'étant ordinairement obligés de nous priver de quelques-unes pour avoir les autres, nous choisissions toujours les meilleures. Et parce que celles du corps sont les moindres, on peut dire généralement que, sans elles, il y a moyen de se rendre heureux. Toutefois, je ne suis point d'opinion qu'on les doive entièrement mépriser, ni même qu'on doive s'exempter d'avoir des passions ; il suffit qu'on les rende sujettes à la raison, et lorsqu'on les a ainsi apprivoisées, elles sont quelquefois d'autant plus utiles qu'elles penchent vers l'excès. René DESCARTES, Lettre à Elisabeth du ler septembre 1645.

Objet du texte :

-          Il s’agit ici pour Descartes de distinguer entre les plaisirs qui viennent du corps et se qui tiennent à l’âme. Montrer plus particulièrement qu’il s’agit d’une différence qui tient à la différence de nature qui existe entre l’âme et le corps.

-          A partir de cette distinction, Descartes a pour objet de montrer que les plaisirs de l’âme ont plus de valeur que ceux du corps, et en analysant le phénomène de la passion, il fera état de ce qu’on doit soumettre à l’âme et à la raison tout plaisir corporel en vue d’adopter la meilleure conduite possible. Il s’agit donc d’un point de vue qui est a fortiori moral. Il s’agit pour Descartes de nous expliciter le mécanisme propre à nous faire choisir le meilleur plaisir et sous quelles conditions cela est possible.

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« faire jouer une faculté nécessaire à savoir la raison : quel est donc son rôle ? Ses pouvoirs et ses limites ? Explication détaillée : · PREMIER MOUVEMENT : - Descartes examine donc ici, dans un premier temps, la différence qui préside entre les plaisirs du corps et les plaisirs de l'âme.

Et l'on verra que cette différence procède, plus profondément, d'une différence denature qui existe entre l'âme et le corps. - Le plaisir du corps se caractérise par sa finitude.

Ces mêmes plaisirs ne semblent durer que dans la limite de leur assouvissement.

Ils dépendent donc à la fois de la conservation du corps (et peuvent s'apparenteren cela au besoin), mais aussi de son bien-être (et peuvent s'apparenter en cela plutôt à la passion). - En réalité cette nature finie, et donc aussi inconstante, des plaisirs qui tiennent au corps, dépend, à un degré supérieur, du changement perpétuel auquel le corps est lui-même soumis.

On comprend alors que lanature du corps détermine, logiquement, la nature de ses plaisirs. - De la même manière le corps semble n'avoir de plaisirs qu'en tant qu'ils lui sont utiles (besoins quand il s'agit de sa nécessaire conservation ; passions quand il s'agit d'apaiser un mouvement irrépressible).

Ilscessent donc en même temps que leur consommation.

Il ne dure qu'autant qu'ils sont utiles au corps.

Et lanature finie de ces plaisirs naît de la nature du corps en tant qu'il est soumis au changement : les plaisirs ducorps changent donc en même temps que le corps subit des transformations. - A l'inverse, et de manière symétrique, les plaisirs de l'âme sont éternels (en tant qu'ils s'encrent dans la seule âme), et ce précisément parce que l'âme est elle-même immortelle. - Pourtant, leur immortalité (qui ne ferait aucun doute si l'âme n'était liée à rien, et surtout pas au corps) est menacée du fait de l'union absolue du corps et de l'âme.

Par nature donc les plaisirs de l'âme sontimmortels, mais, en tant que l'âme est liée au corps, ils risquent à tout moment d'être contaminés par ceuxdu corps, les trompant et leur faisant prendre pour vrai ce qui n'en a que l'apparence (par exemple le biend'un plaisir corporel).

Il suffit que le corps persuade l'âme pour que les plaisirs de cette dernière soient soumisau risque de l'instabilité et de la finitude propres aux plaisirs corporels. - On s'aperçoit que se pose alors un problème pratique pour Descartes : à savoir le fait que le corps peut arriver à influencer l'âme et à lui faire suivre ses passions.

Le vrai bonheur risquant ainsi d'être manqué. · SECOND MOUVEMENT : - Il s'agit donc maintenant de fonder ce qui correspond au vrai usage de notre raison en vue de dessiner le mécanisme nécessaire pour parvenir au vrai bonheur, et donc ne pas laisser l'âme être commandée par lesplaisirs incertains du corps. - Il s'agit donc pour la raison d'examiner attentivement toutes les perfections que celles-ci soient dérivées de l'âme ou du corps.

Et se « sans passions » : c'est-à-dire de manière parfaite raisonnable etrationnelle.

C'est donc un examen sans passion qui sera apte à juger du fondement et du bien fondé de nospassions, tant corporelles et de l'âme. - Or, La « principale utilité de la morale», dit Descartes, consiste à régler le désir.

Régler : ce qui ne signifie ni supprimer ni mépriser.

Morale du désir réglé, la morale cartésienne est au premier chef une moraledu désir .

En effet, les passions en général peuvent être considérées soit en elles-mêmes, mais ainsi elles « ne nous portent à aucune action », soit en tant qu'elles nous mènent à agir et déterminent ainsi notreconduite : or cela, elles ne le font que par l'intermédiaire du désir.

C'est donc « par l'entremise » du désir queles passions « nous portent [à l'] action » et « règlent nos mœurs », car elles « ne peuvent nous porter à aucune action que par l'entremise du désir qu'elles excitent ».

D'une manière générale, il n'y a action queparce qu'il y a entreprise, et il n'y a entreprise que parce qu'il y a désir.

Et tout désir vise à l'acquisition, à laconservation ou à la possession de quelque bien.

(cf.

Lettre à Chanut du 1 er février 1647.) - Il s'agira donc de soumettre, et non pas mépriser, ces désirs et passions, tant du corps que de l'âme, à la raison qui seule est capable d'examiner de manière raisonnable, c'est-à-dire avec mesure et donc sanspassion (la raison en tant que telle n'est pas soumise à la passion mais elle légifère sur ces dernières).

C'estdonc elle qui sera capable de montrer, au corps comme à l'âme, quel plaisir est le meilleur.

Dans la pratique,donc, nous serons obligés de discriminer certaines passions en vue de réaliser certaines autres qui sont, etdoivent être, par ailleurs les meilleures, du point de vue de la raison.

La raison et son examen doivent doncnous permettre de choisir et de décider, et donc a fortiori d'agir, et ce de la meilleure façon possible.

Pourcela il faut savoir renoncer à certaines de nos passions.

On serait d'ailleurs tenter de dire que les passions ducorps sont les plus généralement celles qui sont refusées, ou en tout cas les moins bonnes, si l'on se réfère àla définition du premier mouvement.

C'est d'ailleurs la nuance que Descartes va apporter dans le 3 e mouvement.. »

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