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DESCARTES: Les conditions de la connaissance vraie

Publié le 17/04/2005

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Il ne servirait de rien de compter les suffrages pour suivre l'opinion garantie par le plus d'auteurs, car s'il s'agit d'une question difficile, il est plus croyable que la vérité en a été découverte par un petit nombre plutôt que par beaucoup. Même si tous étaient d'accord, leur enseignement ne nous suffirait pas : nous ne deviendrons jamais mathématiciens, par exemple, bien que notre mémoire possède toutes les démonstrations faites par d'autres, si notre esprit n'est pas capable de résoudre toute sorte de problèmes ; nous ne deviendrons pas philosophes, pour avoir lu tous les raisonnements de Platon et d'Aristote, sans pouvoir porter un jugement solide sur ce qui nous est proposé. Ainsi, en effet, nous semblerions avoir appris, non des sciences, mais des histoires. DESCARTES

éléments d'explication

•    Descartes pose ici les conditions de la connaissance vraie. —    Il convient de montrer une défiance générale à l'égard de toute autorité. L'autorité ne saurait fonder la vérité. —    Le savoir appris n'est pas une véritable connaissance. Savoir véritablement, c'est voir et nous ne pouvons voir que par nous-mêmes, non par autrui. —    Il faut donc rechercher le vrai par nous-mêmes. C'est dans notre propre évidence que nous trouverons la certitude. Nous pouvons mémoriser une règle mathématique ; mais tant que nous n'avons pas vu les rapports qu'elle définit, nous ne la connaissons pas véritablement. •    Texte tiré des Règles pour la direction de l'esprit, III.

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« solide » ou indubitable, et peut servir de fondement pour édifier d'autres pensées. QUESTION 3 [Introduction] Il est difficile de déterminer un critère absolu du vrai.

On dit parfois que le vrai est index sui, et se montre à l'espritdans l'expérience de l'évidence.

Mais comment savoir s'il s'agit d'une simple évidence psychologique et personnelle,ou bien d'une évidence rationnelle commune à tous ?L'unanimité semble être en droit un critère de vérité.

Car s'il existe bien une seule vérité, et si tous les espritspossèdent la même faculté de distinguer le vrai du faux et le bien du mal, alors, un accord unanime vaut commesignal du vrai.Mais, dans les faits, l'on ne peut jamais obtenir l'unanimité.

On parvient tout au plus à une forte majorité.

Orpourquoi plusieurs esprits auraient-ils davantage raison qu'un seul ? La raison ne se quantifie pas : c'est la qualitéde son usage qui importe.L'enjeu de ce questionnement n'est rien de moins que de déterminer la possibilité d'un sens commun et d'un accordentre les esprits. [I.

L'unanimité n'est en rien un critère du vrai] [1.

L'unanimité est utopique]On peut partir d'un constat simple : on n'obtient jamais l'unanimité dans les faits.

Car, le cas échéant, il faudraitpouvoir réunir tous les hommes et être certain que tous pensent la même chose : c'est impossible.

On peut au mieuxrallier tous les suffrages au sein d'un même groupe.

Mais l'opinion de ce groupe n'est pas normative pour les autres.Dèsl'instant que les opinions divergent sur un même sujet, il faut nécessairement qu'une ou plusieurs soient fausses. [2.

La recherche de l'unanimité paralyse l'action]Ce constat n'est pas nécessairement paralysant pour l'action, au contraire.

Car s'il fallait attendre d'obtenirl'unanimité des suffrages pour prendre une décision, la pratique serait paralysée.

Or « les actions de la vie nesouffrent aucun délai » (Descartes, Discours de la méthode).

Rousseau opère très nettement cette distinction dansson oeuvre, entre une unanimité souhaitable en droit mais impossible et paralysante dans les faits.

D'un côté, eneffet, il fonde le contrat social par la volonté générale, c'est-à-dire la volonté de chaque citoyen en tant qu'il veutaussi le bien de tous les autres.

Mais, de l'autre, il soutient qu'un gouvernement effectif comme celui de Pologne nepeut fonctionner qu'avec la loi de la majorité (les deux tiers).

Car s'il attendait l'unanimité, il serait inefficace(Rousseau, Considérations sur le gouvernement de Pologne, IX). [3.

Le nombre ne fait pas droit]Enfin, et c'est l'argument de Descartes, on ne voit pas pourquoi un groupe de plusieurs individus aurait plus raisonqu'une personne isolée.

La qualité d'une opinion ne se mesure pas à la quantité des personnes qui la soutiennent,mais à sa résistance à l'examen rationnel.

L'aridité de la quête de la vérité semble même n'être accessible qu' à unepetite minorité.

Le mythe de la caverne raconté par Platon dans La République en constitue une illustration parfaite.Celui qui va devenir philosophe connaît en effet d'extraordinaires difficultés à s'arracher à la multitude prenant lesombres des choses pour leurs essences et se complaisant dans l'obscurité.

Et une fois qu'il est parvenu à sortir de lacaverne pour contempler le soleil du bien et du vrai, et qu'il retourne chercher les autres pour le leur montrer, il sefait lyncher.

Il a raison seul contre tous, mais à quel prix.

Loin d'être indiquée par l'unanimité, la vérité sembleréservée à une élite.Mais l'élitisme ne contredit-il pas l'esprit même de la vérité, qui se veut universelle ? Comment un sens commun est-il possible ? [II.

L'unanimité comme finalité de la recherche du vrai] [1.

La vérité doit être communicable]Qu'il soit difficile voire impossible d'obtenir l'unanimité dans les faits, ne signifie pas qu'il ne faille pas essayer.Car l'enjeu est de pouvoir communiquer avec autrui.

Mais comment savoir si l'on est simplement persuadé, ou si l'ondétient une « vraie vérité » ? Par cette communicabilité même, explique Kant dans la Critique de la raison pure.

Lapersuasion désigne en effet une apparence de vérité.

Car le principe du jugement y est seulement subjectif, propreà l'esprit qui le soutient.

Il n'a qu'une valeur individuelle et est incommunicable.

En revanche, « la vérité repose surl'accord avec l'objet et, par conséquent, par rapport à cet objet, les jugements de tout entendement doivent êtred'accord ».

Autrement dit, si une croyance est communicable et peut valoir pour la raison de tout homme, c'est unevérité. [2.

Le sens commun du vrai]Il est donc possible de définir un sens commun, c'est-à-dire une unanimité théorique et normative des espritsconcernant la vérité.

Dans la Critique de la faculté de juger, Kant montre ainsi qu'il faut penser en se mettant à laplace de tout autre.

Cela ne signifie pas penser à sa place, mais penser en ayant à l'esprit la communicabilitédécrite plus haut.

Alors l'unanimité pourra être définie comme le meilleur critère de vérité.. »

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