Des normes naturelles?
Publié le 14/08/2014
Extrait du document
Appréciations d'ensemble et remarques
Excellente dissertation, aux qualités techniques évidentes (elle répond, elle aussi, à des « normes « que l'on veut croire justifiées) : bonne introduction, posant clairement le problème de l'existence, de la nature et de la valeur des « normes «, situant ce problème dans le champ plus vaste du rapport de la nature et de la culture; bon développement, informé par des références nombreuses à l'anthropologie, produisant un inventaire sérieux des différents types de « normes «; conclusion débouchant sur une perspective élargie.
D'autres avantages précieux donnent toutes ses chances à ce travail : entre autres, le fait que, étant donné le caractère étendu du sujet, le candidat ait compris qu'il pouvait sortir de la sphère des références philosophiques traditionnelles pour faire un usage fructueux de sa culture anthropologique — anthropologie des Lumières; anthropologie moderne, avec Les enfants sauvages de Lucien Maison, les travaux de Claude Lévi-Strauss sur la prohibition de l'in‑
ceste, dont la connaissance suppose une lecture au moins partielle des Structures élémentaires de la parenté, l'oeuvre de Margaret Mead, la notion de personnalité de base héritée de Ralph Linton, la référence au culturalisme, le concept d'intégration culturelle, etc.
«
20 matériaux concrets, ou encore entrer en rapport avec
des concepts moraux, sociaux, philosophiques.
Dans
tous ces domaines, il s'agit de mesures, de limites
définies plus ou moins arbitrairement (par la nature ou
par la culture?).
Ce cadre est tracé pour une majorité,
L5 dans lequel elle doit s'inscrire.
Nous verrons ultérieu
rement quels autres facteurs entrent également dans
l'institution d'une norme.
La nature humaine fait donc l'objet de recherches
passionnées, et principalement depuis le
XVIUC siècle,
30 siècle des Lumières.
La tendance générale est alors à
une croyance en une nature chez l'homme, existant
sous les multiples
«revêtements culturels» accumulés
depuis des siècles de
vie sociale.
Les thèses s'affrontent
hardiment, telles celles de Rousseau et Hobbes,
le pre-
35 mier louant le « bon sauvage », et condamnant le pro
grès comme dégradant et néfaste pour l'homme,
le
second affirmant la présence d'une nature fondamenta
lement égoïste, voire sanguinaire.
Quel que soit leur
contenu, toutes ces thèses ne peuvent qu'offrir un
40 caractère arbitraire, en relation d'ailleurs avec les con
ceptions politiques personnelles des auteurs.
Ce n'est en fait qu'avec Lucien Maison que les pro
blèmes
se posent de façon plus sérieuse et appron
fondie.
L'analyse des Enfants sauvages a permis d'ar-
45 river à des conclusions très intéressantes et nouvelles.
Par l'étude donc de divers cas d'enfants dits « sau
vages
», trouvés dans la nature, et n'ayant eu aucun
contact avec un milieu social quelconque (ou
si bref
qu'il
n'a pu être utile et notable), Maison développe
50 une thèse s'inscrivant dans la lignée culturaliste : il
n'existe aucun «inné» dans l'être humain, aucun
caractère universel qui ferait du nouveau-né un
humain
à part entière, quelles que soient les conditions
extérieures.
Bref, aucune
« nature » défi.nie, à l'instar de
55 l'espèce animale.
Seul le contact social, culturel, peut
être le révélateur du potentiel humain, la réalisation
d'une somme de possibilités,
à l'état de « nuée ».
Cette
fusion avec
le milieu culturel est indispensable pour
faire d'un individu un être ayant les caractéristiques.
»
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