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Défendre ses droits, est-ce la même chose que défendre ses intérêts ?

Publié le 27/02/2011

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    • Articles « droit « et « intérêt « du Nouveau Vocabulaire des études philosophiques (Hachette).  Droit A. Adj. — 1) Opposé à courbe (ligne droite). — 2) Juste, honnête.  B. Subst. — 3) Un droit : ce qu'il est permis à un individu de faire en vertu des règles de droit existant dans la société (droit objectif); pouvoir, prérogative que possède un individu en vertu des règles de droit existant dans la société (droit objectif / subjectif) ; propriété morale ou pouvoir que possède un individu par sa propre nature, que ce pouvoir soit ou non confirmé par les règles de droit (droit subjectif; cf. « les droits inaliénables de l'individu « : la liberté, la propriété, l'égalité, etc.). — 4) Le droit : avoir le droit de... posséder un droit à l'un des sens « 3 «.  Intérêt (étym. latine : interest, ce qui importe). Ce qui est utile, avantageux à l'individu (intérêt personnel), à l'ensemble des individus, d'un groupe (intérêt général); en ce sens, le mot a souv. une connotation péj. et sous-entend l'attachement égoïste à l'avantage en question.  • Remarquer que l'on dit :  « Avoir droit à «, « avoir un droit sur «, « avoir le droit de « et « avoir intérêt à «.  — Un droit ne serait-ce pas ce qui est conforme à une règle précise et qu'il est par suite légitime d'exiger soit parce que les lois ou règlements le présentent ou parce que cela résulte de contrats établis en conformité de ces lois, ou parce que cela est conforme à l'opinion en matière morale?  — Un droit ne serait-ce pas aussi ce qui est permis (moralement, ou par lois ou règles, ou parce que ce qui n'est pas défendu est permis).


« Rousseau problématisera nouvellement ces questions par rapport aux concepts de justice, d'intérêt, d'utilité (Cf.

Du contrat social ).

Ces concepts seront, antérieurement à cette œuvre, éclairés selon deux périodes distinctes (Cf. Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes ) : celle d'un état dit « de nature » et celle de l'état « social ».

La thèse de Rousseau est que loin d'être l'instauration d'une paix harmonieuse entre les individus, lasociété pervertit plutôt une nature originellement « bonne » de l'humain.

La puissance hiérarchique créée n'infléchitpas le rapport de force (débutant dans le « troisième état de nature »), selon l'auteur.

Ce serait plutôt l'inverse :l'ordre civil contractualisé (d'abord faussement) serait intensificateur de conflits.

La nécessité pour chacun de sedéfendre face aux menaces extérieures (l'autre) conduirait donc à constituer un état social nécessaire.

Mais les« droits », les « intérêts » et les « privilèges » de l'individu ne se rapportent-ils pas juridiquement à la création d'un« état social » ? Doit-on, dès lors, identifier la défense des droits, des intérêts et des privilèges dans et par la constitution d'un Étatde droit positif ? La question ici posée demande donc qu'on établisse philosophiquement cette identification. Mais la philosophie n'est-elle pas justement cette science qui considère que chaque mot à son sens propre etexclusif ? I.

Identification formelle du droit, de l'intérêt et du privilège De prime abord, la défense de ses droits, de ses intérêts et de ses privilèges ne semblent pas participer du mêmeniveau.

Parler de droit, c'est aborder la sphère juridique alors que l'intérêt et le privilège semblent être inscrits dansune sphère non-institutionnalisée et primaire de la possession individuelle. Cependant, Rousseau insiste sur le fait que le droit, l'intérêt et le privilège s'identifient dans l'exigence d'une défensede ses biens et de son intégrité.

Celle-ci, légitime, apparaît nécessaire à partir du moment où l'humain quitte ce« paradis terrestre » (état heureux de vie simple) pour prendre conscience de ce qu'il est et de ce qu'il a.

Naissentalors le sentiment « d'amour propre », d'égoïsme, de convoitise, donc de conflit d'intérêts entre les hommes.

Si lavolonté de se prémunir contre les autres apparaît légitimement, l'instauration d'un premier ordre encore « non-contractualisé » (relève d'un simple pacte précaire) d'anti-agression demandera à trouver une forme légale.

De fait,les notions de droit, d'intérêt et de privilège, d'abord notions légitimes, seront légalisées à partir du « contrat »passé entre les hommes, reconnaissant l'établissement d'une instance propre à installer l'ordre et la cohésion au seinde la communauté.

La « loi » permettra de créer cet ordre en reformulant la notion de droit.

En s'y soumettantlibrement, les individus acceptent de remettre leur liberté première (leurs droits, intérêts et privilèges) à celui ouceux qu'ils élisent pour préserver le droit et l'intérêt « commun ».

Ils acceptent en fait de perdre ceux-ci au profitdu gouvernant qui leur redonnera sous une nouvelle forme qui tiendra compte de cette exigence d'ordre et de paixcommune. Mais si nous nous tournons vers l'idée que Calliclès (Cf.

Platon, Le Gorgias ) se fait du droit, alors c'est la nature qui prime : le « droit du plus fort » est consacré naturellement.

Il est ce droit naturel qu'à le plus fort de dominer le plusfaible.

En cela Calliclès condamne l'usage que fait Socrate de la nature et de la loi, jetant la confusion dans lesesprits puisqu'il en appelle de l'une à l'autre systématiquement pour servir son argumentation.

Mais la loi estnaturelle, réitère Calliclès, et celle – artificielle – édictée par les « faibles » n'est faite que pour qu'ils puissent seprémunir de l'action des « forts ». Une première conséquence est la suivante : les « forts » ont un droit, un intérêt et un privilège naturel : celui dedominer.

Ces trois notions s'identifieront donc dans l'idée de « domination naturelle », certes, mais pas dans celle de« défense ».

les « forts » n'ont naturellement pas à se défendre puisqu'ils sont dominateurs par nature. Une deuxième conséquence philosophique de cette thèse est la suivante : il est donc dans la nature des « forts »de vouloir dominer et ainsi les faibles cherchent artificiellement à se défendre contre cette volonté naturelle.

De fait,la défense de ses droits, de ses intérêts et de ses privilèges est l'avatar des « faibles » et participe d'un mêmemouvement réactif : se défendre en créant une loi (anti-naturelle) constitutive de ces notions illusoires.

Ces troisnotions seraient donc, selon Calliclès, identifiées dans le stratagème d'édification d'une loi contre-nature.

C'est lanotion même de « défense » qui permettra d'identifier ces trois notions (droit, intérêt, privilège). Nietzsche réutilisera cette conception calliclèsienne du droit naturel en y apportant toutefois une rectificationintéresante.

Les « forts » sont certes ceux dont la nature à conféré un droit de domination.

Leur intérêt est doncde faire valoir ce privilège naturel.

Mais selon l'Allemand, l'histoire (Cf.

Généalogie de la morale ) prouve que ce sont les « faibles », les « réactifs » qui tendent à s'imposer contre les forts.

ce renversement à une conséquence.

Les« forts » doivent, pour survivre, apprendre à « défendre » leur droit, leurs « intérêts » et leurs « privilèges » face àla menace des « faibles » et de leurs loi inique (selon la nature).

Puisque le vrai droit, le vrai intérêt et le vraiprivilège est celui que la nature confère simultanément à un être qualifié de « fort », celui-ci ne saurait utiliser les« ruses » réactives des « faibles » pour faire triompher ce droit naturel.

Le faire serait du même coup renier ce qu'ily a de noble, de vital et de spontané dans la force naturelle. Avec Rousseau, Calliclès et Nietzsche sont identifiées les notions de droit, d'intérêt et de privilège à chaque moment. »

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