Décrire les Phénomènes moraux sur lesquels repose ce qu'on appelle conscience morale, sentiment ou notion du devoir, distinction du bien et du mal, obligation morale, etc.
Publié le 20/06/2011
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1. Par une première observation générale des motifs de nos déterminations, nous avons distingué le motif tiré de la notion du bien absolu comme offrant exclusivement le caractère de loi. Il nous reste à décrire plus particulièrement cette notion avec celles. qui l'accompagnent, et à découvrir son origine. 2. On peut réduire à quatre toutes les notions fondamentales qui se rattachent à celle du bien absolu, y compris cette notion elle-même. 1° Nous concevons le bien absolu, supérieur au bien personnel, comme celui-ci est supérieur au bien apparent ou sensible. 2° Nous concevons le bien absolu comme la loi obligatoire des êtres libres et intelligents. 3° Nous concevons les déterminations des êtres libres comme justes ou comme injustes, suivant qu'elles sont conformes ou non conformes au bien absolu qui. est leur loi.
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elle nous concevons le bien, mais nous sommes bien loin de le comprendre dans toute son étendue.
Nous savonsqu'il existe, qu'il est la règle des êtres libres, qu'ainsi les actions libres sont justes ou injustes; mais quand il fautsortir de ces formes universelles, arriver aux applications, et déterminer les actions qui en fait sont justes ouinjustes, les difficultés commencent, et les erreurs avec elles.16.
Cependant , dans le cercle de la vie pratique, il se trouve un assez grand nombre d'applications immédiates quise font avec facilité et par tout le inonde.
Ce sont elles qui constituent ce qu'on nomme la morale publique, sanslaquelle il n'y aurait pas de sociétés possibles.
Mais ce n'est là, pour ainsi dire, que le premier essai, et il est vrai leplus indispensable, des notions fournies par la conscience morale.17.
Cet essai est loin de suffire, 1° parce qu'il pose beaucoup plus de négations que d'affirmations, c'est-à-dire qu'ildétermine plutôt le mal qu'il faut éviter que le bien qu'il faut faire; 2° parce qu'il répond aux combinaisons tout à faitélémentaires de la société humaine, et qu'ainsi, à mesure que cette société se complique, on a besoin de nouvellesapplications plus étendues, impossibles sans des études considérables: La législation des peuples est le résultat dece travail progressif.18.
D'où on voit que si le bien est en soi invariable, les applications en sont variables à cause des éléments variableseux-mêmes que présentent les divers états de civilisation; que, si la conscience morale est infaillible dans sesaxiomes fondamentaux, les conséquence qu'elle engendre, suivant les circonstances plus ou moins compliquées de lavie réelle et de la société, sont souvent très-difficiles à apercevoir, et qu'il en résulte assez fréquemment deserreurs dans ce qu'on nomme les lois positives; mais qu'on ne peut conclure ni de la variété des applications contrel'immutabilité du bien en soi, ni des erreurs des lois humaines contre la certitude de la conscience morale ; qu'enfinla législation positive ne peut se perfectionner qu'autant qu'elle se règle simultanément, 1° sur la conscience moraleet les premières notions du juste et de l'injuste ; 2° sur l'étude exacte et fidèle des éléments de tous genres queprésente l'ensemble social.
Il y a donc ici concours de la morale et de la science; et c'est l'un des problèmes sociauxactuellement débattus que cette combinaison ; la morale sans la science serait insuffisante ; la science sans lamorale, dangereuse.19.
Plusieurs écoles ont assigné à l'idée de bien et à celles qui en dérivent , diverses origines que nous allonsindiquer sommairement.
Disons d'avance que ce sont les divers systèmes de psychologie qui conduisent à cesdiverses conséquences morales.20.
Les matérialistes et les sensualistes ont demandé aux sens l'origine de l'idée du bien.
Dès lors ils n'ont pas vu nipu voir au delà du bien sensible, du plaisir, du bien-être.21.
Les sentimentaux ont confondu le jugement par lequel nous reconnaissons une action comme bonne, avec lesentiment agréable qui accompagne ce jugement.
Or, comme le jugement porte sur la qualité même des choses,indépendamment de nous, tandis que le sentiment agréable est une simple modification de notre être ils ont étéconduits à dire que les actions ne sont pas lionnes en elles-mêmes, mais par rapport à nous; ce qui est la négationdu bien moral et du bien en soi.22.
Les demi-rationalistes, prenant les idées pour autant d'actes ou de créations humaines, ont pris pour le bien cequi n'est en réalité que le travail de l'esprit humain sur le bien; c'est-à-dire qu'en fait de morale, ils n'ont rien vu au-dessus des ouvrages des moralistes d'une part, des institutions et des lois d'autre part.
Or, au-dessus de tout celaest le bien en soi, indépendant de l'esprit humain, supérieur à lui, que les ouvrages et les lois étudient, expliquent etappliquent, mais ne constituent point.23.
Les empiristes ont essayé d'expliquer par l'expérience ce qui vient de la raison, et par suite ont nié le bienabsolu, et reconnu seulement le bien relatif, ou personnel.24.
Les idéalistes, au contraire, n'ont vu que 'le bien absolu, et nié le bien sensible ou le bien-être, et le bien réel oul'utile.
De là cette exclamation stoïque : 0 douleur ! je n'avouerai jamais que tu sois un mal.
De là encore cette autreexagération qui consiste à dire que toutes les vertus sont égales, parce qu'elles sont toutes l'expression du bienabsolu, comme tous les vices sont égaux par une raison semblable.
Ce système voit la règle, mais inutilement,puisqu'il n'aperçoit point les choses qui doivent être réglées : sa règle réduite à l'état absolu n'est plus qu'uneabstraction.25.
Du sensualisme en morale, naît l'épicuréisme pratique; du sentimentalisme naît ce qu'on pourrait appeler lamorale du sentiment, et la morale de l'honneur dont les conclusions sont souvent identiques avec celles de la raison,mais sont aussi souvent faussées ou exagérées, risquent de réduire la vertu à de simples apparences, et sonttoujours irréfléchies; du demi-rationalisme naît la morale de l'autorité, ou celle qui ne reconnaît rien au-dessus descasuistes et des législateurs ; de l'empirisme naît l'égoïsme pratique, ou la morale de l'utile; enfin de l'idéalisme naîtle stoïcisme pratique, dépourvu de la chaleur du sentiment, dédaignant Petite au lieu de lui donner sa culturelégitime , tuant les facultés au lieu de les diriger, et faisant (le la vertu quelque chose de froid et d'immobile.26.
Ces erreurs diverses sont faciles à apprécier.
Elles ont leur source logique dans une analyse incomplète desphénomènes de conscience.
Les systèmes suivants doivent ce qu'ils peuvent renfermer d'exagéré à la préoccupationtrop grande avec laquelle ils ont considéré la parole comme condition des idées morales, ou bien au contraire négligéd'en tenir compte.27.
L'un de ces systèmes consiste à donner pour origine à l'idée de bien l'éducation , et par suite l'esprit du tempset du pays.
Or, l'éducation et la société ne produisent point en nous l'idée du bien, mais lui donnent lieu de naître.L'éducation ne pourrait rien sur un être dépourvu de raison, ou de la faculté de concevoir le bien.
Ce que cesystème a établi avec vérité, c'est l'influence prodigieuse que l'éducation et ce qu'on appelle les idées du tempsexercent sur nous dans les applications que nous faisons des premières conceptions de la raison.
Par là on expliquecomment les erreurs morales gagnent tout un peuple, et comment les individus et les nations qui ont perdu de vueles premières vérités morales, ne se renouvellent que par une intervention étrangère.28.
Un autre système accorde à l'autorité religieuse ce que le précédent accorde à l'éducation et à la société,c'est-à-dire qu'il attribue à l'autorité religieuse la création de la morale.
Or, l'autorité religieuse fait à la société ceque la société fait aux individus.
Elle ne crée point la raison pratique, la conscience; mais elle l'éveille, c'a été le butde la révélation primitive; et quand cet enseignement lointain et défiguré n'a plus été dans les sociétés en.
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