Dans une page demeurée célèbre du Manifeste du surréalisme, André Breton écrit à propos des romanciers et de leurs oeuvres : « Le caractère circonstanciel, inutilement particulier, de chacune de leurs notations, me donne à penser qu'ils s'amusent à mes dépens. On ne m'épargne aucune hésitations du personnage : sera-t-il blond ? Comment s'appellera-t-il ? Autant de questions résolues une fois pour toutes, au petit bonheur, il ne m'est laissé d'autre pouvoir discrétionnaire que de fermer
Publié le 30/10/2009
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« Le seul mot de liberté est tout ce qui m'exalte encore «, l'aveu flotte en étendard dès les premières pages du Manifeste du surréalisme. Car « liberté «, tel est bien le maître-mot de cette « révolution surréaliste « dont André Breton va être le plus zélé promoteur. Il s'agit bien de rendre à l'imagination son pouvoir, dans le domaine de l'art en général, de la littérature en particulier. C'est pourquoi le roman et les romanciers deviennent une cible de choix. Les romans livrent leurs lecteurs aux écrivains : « Le caractère circonstanciel, inutilement particulier, de chacune de leurs notations, me donne à penser qu'ils s'amusent à mes dépens. On ne m'épargne aucune des hésitations du personnage : sera-t-il blond ? Comme s'appellera-t-il ? Autant de questions résolues une fois pour toutes, au petit bonheur ; il ne m'est laissé d'autre pouvoir discrétionnaire que de fermer le livre, ce dont je ne me fais pas faute aux environs de la première page. « La seule liberté qui reste au lecteur de romans : interrompre sa lecture. Le refus est net. Breton l'illustrera par la suite à propos d'une page de Crime et châtiment : Non, il ne rentrera pas avec Raskolnikov dans cette petite chambre tapissée de papier jaune ! Pourquoi cette chambre-ci, pas une autre ? Pourquoi ce papier jaune ? A quoi bon suivre Dostoïevski ? Pourquoi subir cette manifestation-là de son arbitraire de créateur ?
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