Dans quelle mesure peut-on dire que le langage est un moyen de maîtrise et de domination ?
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
Dans les sociétés traditionnelles (celles de l'Antiquité ou celles que l'on dit « primitives «) le langage est saisi comme une puissance démiurgique et magique, qui relève du sacré. Ainsi selon la Bible est-ce en parlant que Dieu créa le monde (« Dieu dit : "Que la lumière soit" et la lumière fut... Dieu dit : "Qu'il y ait un firmament"... «, etc.). De même, dans les rites de la magie et de la théurgie, dans toutes les cultures, les formules d'objurgation, d'obsécration, d'exécration, etc., jouent un rôle fondamental : le magicien parfait, comme Hermès Trismégiste dans la tradition hellénistique, est celui qui connaît le pouvoir secret des mots et sait les prononcer avec l'intonation correcte. Le nomen est omen : le nom est un signe du divin. De telles conceptions mythiques et religieuses du langage indiquent que l'homme conçoit spontanément le langage comme un pouvoir, et nous invitent à réfléchir sur ce pouvoir. Il n'est d'ailleurs pas sans intérêt de noter à ce propos que la philosophie, si l'on considère que Socrate en est le père, naquit avant tout d'une réflexion sur le langage et sur son détournement par les sophistes. Dans quelle mesure, donc, le langage est-il un moyen de maîtrise et de domination ?
Première partie : Le langage, moyen de maîtrise et de domination de la nature
Deuxième partie : Le langage, moyen de maîtrise et de domination de l'homme
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3) Si on fait du langage un usage conforme à son essence, on est fondé à dire que la vraie maîtrise peut etdoit s'interdire toute domination.
a) Le pouvoir dominateur du langage ne lui est ni propre ni essentiel :- Le pouvoir dominateur du langage se confond avec celui des porte-parole, il n'est pas celui de la parole elle-même.- La domination, elle, n'a pas besoin d'ordre symbolique pour s'établir : les animaux la connaissent.- Langage et domination peuvent et doivent être dissociés si la parole doit être vraiment humaine.
b) Alors maîtrise et domination s'avèrent des contradictoires qui s'excluent :- Chercher à dominer l'autre, à séduire pour réduire, est une forme de violence, de non-maîtrise.- Inversement maîtriser le langage, et par lui avoir empire sur soi, exclut la tentation de dominer.- L'alternative est claire : ou maîtriser vraiment ou voir la demi-maîtrise s'inverser en domination.
c) Un usage du langage conforme à son essence, qui soit libérateur sans être dominateur :- Le statut du langage : il n'est pas instrument de plaisir et de pouvoir, mais épiphanie [apparition) de l'être.- Le dialogue platonicien, ancrant le logos dans l'être, invite chacun à sa propre maîtrise autonome.- Ainsi Socrate suscite l'autre comme égal, libère en lui sa puissance de maîtrise, loin de l'écraser.
Conclusion
Ainsi donc, si on s'en tient à l'usage le plus courant du langage, son usage purement instrumental, il est possible dedire que le langage est à la fois moyen de maîtrise et de domination.
Toutefois, le pouvoir dominateur du langagevient, non du langage lui-même, mais de la place dominante de celui qui parle, voire de sa passion du pouvoir.
Aurebours, c'est bien par essence que le Langage permet une maîtrise excluant toute tentation de domination : lelogos, ordre et mesure, tempère l'âme.
Dans un véritable dialogue, en quête du vrai, la parole cesse de faireviolence : l'accord de la pensée avec l'être et avec elle-même produit L'accord des interlocuteurs.
Par-delà leshiérarchies sociales et les rapports de force, tous peuvent se reconnaître comme égaux en dignité.
introduction
Dans les sociétés traditionnelles (celles de l'Antiquité ou celles que l'on dit « primitives ») le langage est saisi commeune puissance démiurgique et magique, qui relève du sacré.
Ainsi selon la Bible est-ce en parlant que Dieu créa lemonde (« Dieu dit : "Que la lumière soit" et la lumière fut...
Dieu dit : "Qu'il y ait un firmament"...
», etc.).
De même,dans les rites de la magie et de la théurgie, dans toutes les cultures, les formules d'objurgation, d'obsécration,d'exécration, etc., jouent un rôle fondamental : le magicien parfait, comme Hermès Trismégiste dans la traditionhellénistique, est celui qui connaît le pouvoir secret des mots et sait les prononcer avec l'intonation correcte.
Lenomen est omen : le nom est un signe du divin.
De telles conceptions mythiques et religieuses du langage indiquentque l'homme conçoit spontanément le langage comme un pouvoir, et nous invitent à réfléchir sur ce pouvoir.
Il n'estd'ailleurs pas sans intérêt de noter à ce propos que la philosophie, si l'on considère que Socrate en est le père,naquit avant tout d'une réflexion sur le langage et sur son détournement par les sophistes.
Dans quelle mesure,donc, le langage est-il un moyen de maîtrise et de domination ?développement
Première partie : Le langage, moyen de maîtrise et de domination de la nature
Si l'homme se révèle capable de s'opposer à la nature et de la transformer, de s'en rendre, selon la formule deDescartes, « maître et possesseur » (cf.
Discours de la méthode, VIe partie), n'est-ce pas au langage qu'il le doit ?
• Le langage, condition de la pensée.a) Ce qui caractérise le langage humain, c'est sa dimension symbolique (cf.
sujet n° 58, 3e partie, a, 2).
Parce queson langage est symbolique, l'homme ne se limite pas, comme l'animal, à signaler de manière stéréotypée quelquechose à ses congénères, mais il peut leur parler et se parler de n'importe quelle chose.
Par le langage l'homme peutreprésenter à autrui et se représenter n'importe quels objet ou situation dans le monde.
En d'autres termes, grâce àcet appareil symbolique que constitue le langage, l'homme peut rompre avec l'adaptation immédiate au monde actueldéfinie par les signaux sensoriels et se retirer du monde, le mettre à distance pour le penser.b) Ainsi, comme l'observe Benveniste : « La forme linguistique est non seulement la condition de transmissibilité,mais d'abord la condition de réalisation de la pensée » {Problèmes de linguistique générale, p.
64).
Penser c'est «manier les signes de la langue » qui est « une structure informée de signification » (id., p.
74).
C'est pourquoi lescatégories de pensées sont dictées par la langue (Benveniste montre que les catégories aristotéliciennes sont des.
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