Dans quelle mesure est-il raisonnable de douter ?
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
Cette question met en avant les difficultés liées au problème du doute dans le domaine de la réflexion. En effet, si je doute de tout ce qui m’entoure, si je suis plongé dans l’incertitude, comment puis-je fonder mon savoir ? sur quoi peut s’appuyer mon esprit pour établir des connaissances si je remets en question le moindre objet du monde ? Mais douter ne signifie pas douter de tout et systématiquement. Car si le doute devient méthodique, comme le préconise Descartes, s’il est le fruit d’un usage raisonnable de l’esprit, ne peut-il pas, au contraire, permettre à l’homme d’accéder plus facilement à la connaissance vraie des choses ?
N’est ce pas cet usage de la raison que suggère la réflexion philosophique elle-même ? car en étant certain de ma connaissance des objets du monde, je prends en effet le risque de me laisser guider par l’opinion. Or, la philosophie, ayant pour dessein la quête de la vérité, ne peut prétendre tout savoir d’emblée. Loin d’être arrogante, la véritable pensée philosophique doit au contraire faire preuve d’humilité et répondre, avant toute tentative dogmatique à la célèbre injonction de Socrate : « Ce que je sais c’est que je ne sais rien. «
Il s’agit donc de trouver cette mesure exacte de doute nécessaire à la pensée, cette part raisonnable d’incertitude qui, loin de plonger l’esprit dans un scepticisme absolu doit au contraire l’inviter à fonder des raisonnements fiables.
«
dans les choses mêmes, mais vient de ce que l'esprit prend l'habitude de les lier (Enquête sur l'entendementhumain).
C'est une simple tendance de l'esprit, une association spontanée entre ses idées, qui nous fait croire à unecausalité que nous n'observons jamais.
Cette analyse de l'idée de causalité eut une influence sur la réflexion de Kant et le fit sortir selon ses propres motsde son « sommeil dogmatique ».
Hume, dans les Essais philosophiques sur l'entendement montre qu'avant toute expérience, nous n'avons pas la possibilité de connaître une quelconque relation de cause à effet par la raison seule.
« […] il n'y a pas un seul casassignable, où la connaissance du rapport qui est entre la cause et l'effet puisse être obtenue a priori […]» ( a priori devant être entendu ici comme : compris de manière indépendante de l'expérience, c'est à dire par la seule raison.) En effet, pour Hume, philosophe empiriste, seule l'expérience peut nous permettre de découvrir les relationsentre des causes et des effets.
Le scepticisme de Hume est donc modéré dans le sens où il encourage une attitude intellectuelle visant à exploiterle champ indéfiniment riche de l'expérience.
En combattant les superstitions et les croyances, qui sont le fruit de la raison, Hume s'impose ainsi comme l'un desprincipaux acteurs de la critique du rationalisme.
III/ Descartes : le doute méthodique
Avec Descartes, le doute n'est plus sceptique mais devient méthodique.
En effet, pour le philosophe, on peutlibrement entreprendre de douter dans le but de construire une vérité indubitable.
Dès lors le doute n'apparaît nonpas comme une fin en soi mais comme un moyen d'accéder à la vérité.
Il s'agit donc de remettre en question toutesnos certitudes et nos croyances si nous voulons avoir accès à la vraie connaissance.
« […]je déracinais cependantde mon esprit toutes les erreurs qui s'y étaient pu glisser auparavant.
» ( Discours de la méthode )
Car c'est par la destruction même de ces croyances « comme en abattant un vieux logis », que nos raisonnementspeuvent prétendre à une plus grande justesse et une plus grande clarté et ainsi nous permettre de construire uneconnaissance plus solide.
Il ne s'agit donc pas pour Descartes de douter pour douter.
Bien au contraire, le doute, comme méthode (dans lesens d'effort pour atteindre une fin) est alors constructif et devient absolument indispensable pour la recherche dela vérité
Conclusion
- Pour les sceptiques de l'Antiquité, la réalité, tout en n'étant pas une illusion, ne peut, « pour l'instant » être connue avec certitude.
Il faut donc suspendre notre jugement car nous ne pouvons rien connaître aveccertitude.
- Hume, en démontrant que la causalité n'est qu'une croyance subjective, affirme l'insuffisance de la raison qui, seule, ne nous permet pas d'accéder à la vérité.
- Le doute non plus sceptique mais méthodique devient, pour Descartes, un véritable instrument dans la recherche du vrai.
SUPPLEMENT: EXISTENCE DE LA VÉRITÉ.
LE SCEPTICISME.
Le scepticisme est défini par Lalande comme : « La doctrine d'après laquelle l'esprit humain ne peut atteindre avec certitude aucune vérité ».
L'esprit se déclare incapable d'affirmer ou de nier quoi que ce soit.
1° Scepticisme antique et doute cartésien.
On sait que les « Méditations » de Descartes commencent, elles aussi, par l'exercice d'un doute absolu : Descartes rejette le témoignage des sens (en rêve on croit voir, entendre, bouger et ce n'est qu'illusion).
Il rejette même lesvérités mathématiques (car il peut se faire qu'un « malin génie » tout-puissant s'amuse à me tromper dans toutes mes pensées).
Mais ce doute cartésien s'oppose radicalement au doute sceptique.
D'abord le doute cartésien est provisoire (il prend fin lorsque Descartes s'aperçoit qu'il peut douter de tout sauf du fait même qu'il pense et qu'il doute : et cette évidence invincible : je pense donc je suis est une première vérité d'où bien d'autre vont jaillir).
C'est un doute volontaire, un doute « feint », dit Descartes dont la fonction est d'accoutumer « l'esprit à se détacher des sens » (« abducere mentem a sensibus ») et même de tout objet de pensée pour révéler en sa pureté l'acte même de penser.
Le doute cartésien a la valeur d'une pédagogie de l'ascèse qui vise à nous délivrer provisoirementdes pensées pour révéler que nous avions l'esprit que nous sommes.
Le doute cartésien est méthodique (le malin.
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