Dans quel monde vivons-nous ?
Publié le 04/12/2012
Extrait du document
«
Il est quand même bien vrai que sans la sensation il n’y aurait pas de connaissance parce que la
conscience n’aurait rien à appréhender.
Mais en même temps la perception n’est pas seulement une
sensation, car si la sensation me présente une qualité sensible, c’est bien la perception qui
m’apporte un « objet », quelque chose ayant une forme objective repérable dans l’espace.
Donc la
perception est un phénomène de conscience global, structuré et structurant.
Nos perceptions nous aident à constituer un monde et pas seulement à accumuler des connaissances.
Merleau-Ponty dans son œuvre intitulée La Structure du comportement insiste sur l’aspect corporel
de cette expérience.
Lorsque nous percevons un objet, celui-ci se détache en quelque sorte d’un
fond, d’un horizon, qui est le monde ; mais ce monde, nous le percevons aussi et en même temps.
Nous percevons la chose et son environnement.
De la même manière, ce n’est pas seulement avec
l’organe des sens que nous percevons, mais avec notre corps tout entier.
Si l’on adopte cette
hypothèse, il semble bien que la perception nous donne le seul monde réel.
Aussi le monde dans lequel nous vivons n'est-il qu'un monde que nous percevons depuis et grâce à
notre corps ? N'est-ce qu'un monde où la sensibilité et le perceptif règnent en maître ? Comment une
perception pourrait-elle nous tromper ? Ce monde perçu par notre corps serait-il irréel ? La question
sous-entend que nos perceptions pourraient bien ne pas être fiables.
Faut-il situer le « réel » au-delà
du monde sensible comme le conçoit un certain idéalisme ?
II.
Entre monde intelligible et illusion des sens : une autre vision du monde
On oppose en général l'apparence et la réalité, c'est-à-dire une fausse et une vraie réalité.
On entend
par « réel » ce qui existe vraiment.
On dit que l’apparence est trompeuse, comme lorsque un visage
sévère cache une âme tendre et délicate.
Dans ce cas, l’apparence est physique, tandis que la réalité
est spirituelle et invisible.
Il s'agit de la thèse développée par Platon .
En effet, u ne interprétation
simplifiée du platonisme oppose un monde sensible à un monde intelligible.
Ce terme de « monde
intelligible » désigne l'ensemble des réalités intelligibles, ou Idées, que l'esprit peut saisir, par
opposition au monde sensible qui désigne l'ensemble des choses qui sont connues par les sens.
Pour
lui, il faut dépasser l'apparence sensible, fugace et changeante, des choses, pour accéder au monde
des Idées, qui fonde tout ce qui existe dans le monde sensible, et en permet la connaissance .
L'apparence sensible est donc une forme d'illusion, en tout cas d'imperfection de l'archétype parfait.
Aussi cette pensée contredit celle d’ Épicure et de Lucrèce qui soutiennent que les sens ne
trompent jamais, l'illusion est due au jugement que l'on fait de nos données sensibles.
Platon donne une version imagée de cette théorie dans la célèbre « allégorie de la caverne » ( La
République , Livre XI ).
Enfermés dans une caverne, ignorant tout du monde extérieur, les hommes
sont condamnés à prendre les ombres pour la réalité.
Celle-ci n’est perceptible que par la
connaissance intellectuelle et la libération se confond avec la philosophie.
Plus particulièrement,
Platon s’en prend aux images, parce qu’elles ne sont que les copies des choses (naturelles ou
fabriquées), qui sont elles-mêmes déjà des copies c’est-à-dire des exemplaires imparfaits d’une
réalité essentielle.
Selon Platon la perception sensible d’un objet restera à jamais imparfaite,
déformante, contingente, tandis que l’Intellect rend compte de tous les aspects d’un phénomène et
donc permet d’approcher l'essence de la chose.
A son tour Descartes ne se lasse pas d’affirmer la supériorité de la raison et de l’intellect sur la
perception sensorielle.
Pour lui les sens ne nous apportent aucune certitude .
Descartes développe
assez longuement un exemple fameux dans la deuxième méditation des Méditations métaphysiques ,
celui du « morceau de cire », démontrant que la raison a bien plus de puissance que la sensation.
Si
je considère une première fois un morceau de cire quelconque, puis une deuxième fois ce même
objet totalement fondu, réduit à une flaque de cire informe, ce n’est pas la vue mais bien
l’entendement qui m’indique sans conteste qu’il s’agit du même objet ayant les mêmes propriétés.
Il
poursuit avec l’exemple d’un groupe d’hommes observés par la fenêtre : à une certaine distance je
pourrai les observer pendant des heures, je ne distinguerai rien de plus que des « chapeaux et des
manteaux » ; je ne verrai jamais des « hommes », en revanche c’est mon bon sens qui me l’apprend..
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