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Croissance verte ou décroissance ?

Publié le 24/03/2015

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Par-delà le jargon, cette notion d'heuristique de la peur signifie quelque chose de très profond, à savoir que c'est finalement grâce à la peur qu'on va découvrir les menaces qui pèsent sur l'environnement, prendre conscience des dangers qui planent sur le monde, que ce soit d'ailleurs sur le plan environnemental ou géopolitique.

 

Le livre accompagnait la montée en puissance du pacifisme en Allemagne autant que de l'écologie.

 

la passion qui marque le premier pas vers la sagesse, définie, comme je vous le disais à l'instant, par le principe de précaution.

 

Il faut rappeler que ce principe lui-même, au fil du temps, a changé de sens.

 

À l'origine, lorsque l'idée et le nom apparaissent pour la première fois, dans l'Allemagne des années 1970, le principe de précaution signifie simplement qu'il ne faut pas épuiser les richesses à tout va, qu'il faut faire attention à l'usure du monde, qu'il faut préserver les possibilités de vie des générations futures.

 

Et puis, progressivement, ce principe va prendre le sens d'une espèce d'idéologie du risque zéro.

 

Les écologistes, avec un sens politique très sûr, vont choisir très largement de s'appuyer sur elle pour essayer de faire passer leurs idées et augmenter leur influence dans la société.

 

On passe d'une question de philosophie politique (réforme versus révolution) à une interrogation plus fondamentale, proprement métaphysique : l'humanité est-elle sur la planète le seul sujet de droit, la seule entité porteuse de valeurs?

 

Les sociaux-démocrates veulent corriger le tir, réformer la société capitaliste en corrigeant ses effets pervers, tout en gardant une société de marché ; les communistes veulent abolir la propriété privée et sont révolutionnaires.

 

Aux États-Unis et au Canada, dans le vocabulaire anglo-saxon, on va retrouver exactement la même dichotomie qu'en Allemagne entre les Fundis et les Realos : on a les Deep ecologists et les Shallow ecologists.

 

allemandes, américaines et canadiennes, pour réunir une documentation considérable que j'ai rapportée à Paris.

 

J'ai traduit quantité de textes qui n'étaient pas encore traduits, notamment les lois nazies sur la protection de la nature et des animaux, et je me souviens qu'au moment de la sortie du Nouvel Ordre écologique, j'avais été invité dans une émission, La Marche du siècle, animée par un homme qui, lui aussi, a un peu disparu du paysage médiatique, Jean-Marie Cavada.

 

Cavada m'avait opposé, comme on fait toujours dans ce genre d'émission, à des personnalités qui étaient bien sûr en désaccord avec moi.

 

Il y avait là Antoine Waech-ter, leader des Verts à l'époque ; mais aussi Susan George, une femme d'ailleurs sympathique et courtoise, qui était la présidente de Greenpeace France.

 

J'avais donc en face de moi, au sens propre, deux «fondamentalistes« verts, très hostiles à mon livre parce que ce dernier était très critique à l'égard des Fundis et des Deep ecologists.

 

C'est dans ce contexte qu'ils m'ont fait cadeau en direct --- car c'est bien comme ça que je le prends, ça m'a été très utile --- de deux métaphores qui indiquent bien la différence entre ces deux courants.

 

Ces deux métaphores, je vais vous les livrer, parce que c'est un bon moyen mnémotechnique pour se souvenir de cette dichotomie et de la signification profonde qu'elle revêt.

 

c'était une métaphore des Fundis, en vérité déjà une métaphore de la décroissance.

 

À l'époque, on ne parlait pas encore vraiment de décroissance, on parlait plutôt de «croissance zéro«.

 

C'était un héritage du fameux «rapport Meadows«, un rapport produit par le Club de Rome qui, pour la première fois, plaidait pour la croissance zéro.

 

Aujourd'hui, on parlerait plutôt de décroissance, mais c'était déjà, au fond, la même idée : la fermeture du robinet, c'est-à-dire l'idée que, de toute façon, le développement économique tel que le conçoivent les sociétés occidentales n'est pas durable, pas tenable.

 

Il n'y a pas de développement durable possible, cette notion est une imposture totale : il faut changer de système.

 

Le système capitaliste est un système dévastateur en soi, intrinsèquement parlant, on ne peut pas le corriger, mettre des serpillières autour de la baignoire est idiot : il faut fermer le robinet.

 

À son tour, Susan George --- mes contradicteurs étaient décidément très en verve --- me donna une autre métaphore, tout aussi parlante --- peut-être même plus profonde encore parce qu'elle ajoute à celle de Waech-ter l'idée de révolution conservatrice, et, avec les Fundis, c'est tout à fait de ça qu'il s'agit.

 

Luc Ferry, quand vous êtes sur l'autoroute et que vous voulez aller à Marseille ou à Nice, et que vous voyez constamment des panneaux «Lille-Bruxelles«, c'est que vous êtes dans la mauvaise direction!

 

C'est que vous allez vers le Nord au lieu d'aller vers le Sud.

 

Juxtaposées, les deux métaphores, celle de la serpillière, d'un côté, celle du demi-tour «révolutionnaire«, de l'autre, marquent parfaitement la différence entre Fundis et Realos, entre écologistes réformistes et écologistes radicaux.

 

« Je voudrais aujourd'hui aborder avec vous, d'un point de vue plus philosophique que politique, les questions qui touchent à l'écologie.

Pour ouvrir ces réflexions, je commencerai par une remarque générale sur le statut qu'a reçu cette passion démocratique entre toutes qu'est la peur, avec la naissance de l'écologie politique dans les années 1970.. »

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