Corrigé dissertation : Jusqu'ou faut il poursuivre le progrès technique?
Publié le 20/04/2013
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Contrairement aux sociétés modernes, pour lesquelles la technique constitue le principal moyen d'action, les sociétés techniques essaient de résister tant bien que mal à son attrait, qu'elles considèrent comme dangereux pour le bien-être de l'homme. Cette attitude, longtemps considérée comme un, signe de sauvagerie et d'ignorance par les peuples soi-disant "civilisés", commencent à avoir des échos au sein même des pays occidentaux, où l'on parle de plus en plus de la technique comme d'une menace et du progrès technique comme d'une aberration. Et si l'on connaît un peu l'histoire de l'humanité, on s'aperçoit rapidement que cette interrogation est présente à chaque époque, de manière plus ou moins déclarée. Il semble donc que toute société, toute civilisation, en arrive un jour à se demander jusqu'où il faut poursuivre le progrès technique. Existe-t-il une limite au-delà de laquelle l'activité de transformation de notre milieu devient vraiment dangereuse, ou bierl cette réaction n'est-elle que l'indice de la difficulté que l'homme a toujours eu à accepter la nouveauté ? Si la technique est faite pour servir l'homme, comme on le conçoit habituellement, est-il normal qu'elle effraie autant certaines sociétés, qui en font un monstre démoniaque dévorant tout sur son passage ? Est-il plus normal de la diviniser et de voir en elle la solution à tous les problèmes de l'humanité ?
«
Désirer quelque chose, c'est s'imaginer que cette chose pourrait venir combler notre exigence de sens, sans qu'il y ail forcément de motivation logique à cela.
Alors que le besoin est prédéterminé et commun à toute l'espèce, le désir, lui, se détermine différemment selon les circonstances, les sociétés et les individus.
Puisqu'il est imaginé, l'objet du désir n'existe pas, tel quel, dans la réalité.
Même le désir sexuel est bien plus que la réaction physiologique à la réalité, puisque l'on s'aperçoit, d'une part, que les êtres considérés comme sexuellement attirants
sont très variables selon les cultures (les lutteurs de sumo, par exemple, considérés au Japon comme de véritables sex symbols, sont plutôt repoussants pour une femme occidentale !) et d'autre part, que l'attrait sexuel est renforcé par certains
gadgets qui n'ont rien de naturel.
Pour le dire autrement, alors que l'objet du besoin animal se trouve dans la nature, l'objet du désir, lui, doit être construit.
On satisfait un besoin, on réalise un désir.
Or, réaliser, c'est littéralement rendre réel quelque chose
de naturellement impossible.
Cela suppose une transformation de la nature et donc, une certaine technicité.
Là encore, cette
analyse est valable même pour la sexualité, puisque tous les sexologues reconnaissent que le plaisir s'apprend et que la plupart des troubles de la sexualité (qui n'existent pas chez l'animal, alors qu'elles concernent un être humain sur trois)
proviennent d'une maîtrise insuffisante des techniques corporelles.
La technique permet donc de réaliser les désirs et les rêves de l'être humain : nous volons grâce aux techniques
de l'aviation.
la fuséologie nous a permis d'aller sur la lune et l'on entend de plus en plus parler du terraformage de Mars.
Or, on ~ait que les objets du désir varient avec le temps, parce qu'aucun ne peut nous vraiment nous satisfaire.
C'est pour cela que ,.l'on ne peut ~as assigner de limite au progrès technique.
L'instinct peut se permettre de ne pas changer, parce qu'il a toujours les mêmes besoins à satisfaire; la technique ne peut pas s'arrêter, parce qu'elle aura toujours de nouveaux rêves a réaliser.
On peut donc dire sans risque d'erreur que la technique est toujours bénéfique pour l'être humain, parce qu'elle augmente son pouvoir sur le monde et lui permet de le rendre conforme à son attente.
Plus la technique progresse, plus
l'homme peut s'épanouir, dans un monde conçu selon ses désirs.
En ce sens, on peut dire que les civilisations à fort taux de
technique sont supérieures aux sociétés archaïques, puisqu'elles vont dans le sens de cet épanouissement.
Sans la technique,
nous serions soumis aux contraintes de la nature, qui constitue pour nous un milieu hostile et étrangers à nos aspirations_ La
technique nous permet de nous libérer de ces corrtraintes et de développer un monde à notre mesure, un monde véritablement
humain.
Arrêter le progrès technique serait donc aller à l'encontre des intérêts de l'humanité.
Pourtant, les ethnologues affirment que la faible technicité des sociétés archaïques provient en partie d'un choix et
pas seulement d'une méconnaissance des techniques modernes.
Ainsi, certaines connaissent les principes de l'agriculture et ont tout à fait conscience des avantages qu'elle pourrait leur apporter et pourtant refusent de s'en servir pour des raisons culturelles.
Or, on sait que l'être humain est essentiellement motivé par son intérêt.
Se pourrait-il donc qu'il y ait un intérêt à limiter le progrès technique ? Y aurait-il un point au-delà duquel la technique pourrait nuire à l'humanité ?
La technique, avons-nous dit, nous permet d'augmenter nos capacités et notre efficacité.
Il serait bon d'ajouter qu'elle:~ le fait artificiellement.
Ajouter un outil à la main de l'homme, ce n'est pas augmenter la puissance de sa main, c'est lui substituer
celle de l'outil.
La technique, comme le disent ses défenseurs, travaille pour nous.
Mais pour nous signifie tout autant à notre
place qu'à notre avantage.
Or, on le sait, les capacités de l'homme ne sont pas instinctives.
Cela signifie, entre autres choses, qu'elles ne
peuvent se développer que si elles sont utilisées.
Alors qu'un chien saura aboyer même s'il n'a jamais entendu aucun autre
chien le fair~t'homme, lui, ne saura parler que si quelqu'un le lui a appris.
Dans ces conditions, quel peut être l'effet réel de la technique sur nos capacités ? Puisque la technique travaille pour nous, nous avons moins besoin de certaines capacités
naturelles.
Etant moins utilisées, elles sont condamnées à s'atrophier, voire même à disparaitre.
Par exemple, on sait que l'usage des médicaments, en particulier des antibiotiques, atténuent notre résistance naturelle à la maladie.
En effet, le corps
réagit à la maladie en produisant des anticorps qui vont l'immuniser par la suite.
Si l'on intervient artificiellement dans ce processus, soit en coupant la maladie avant la réaction, soit en fournissant les arrticorps nécessaires, le corps ne va pas "travailler" et va perdre peu à peu sa capacité de résistance - au point que les médecins conseillent maintenant de laisser les jeunes enfants développer certaines maladies de manière naturelle.
On pourrait donner ainsi de multiples exemples, depuis le calcul mental (en déclin du fait des machines à calculer) jusqu'à la mémoire (influence des techniques d'écriture) ou la force physique.
L'esserrtiel est de bien comprendre que la technique, loin de nous libérer des faiblesses de notre nature, les accentue encore.
De ce fait, elle crêe une nouvelle
dépendance vis-à-vis d'elle-même_ Plus le soi-disant progrès technique avance, plus nous devenons dépendants de cette
technique qui nous assiste, nous épaule, comme si nous n'étions que des animaux handicapés et non des êtres humains
responsables de nous-mêmes et de notre destin.
La technique ne nous libère pas, elle nous aliène au contraire à ses
exigences, en nous imposant des rythmes, des conditions d'efficacité, une maitrise de nous-mêmes qui n'ont rien de naturel ni d' épanouissant.
Pour le dire autrement, la technique nous déshumanise et ce, sur bien des points_ En effet, nous le savons, elle vise à nous rendre toujours plus efficaces.
Par conséquent, elle institue un travail de plus en plus fondé sur la rentabilité et l'efficacité, c'est-à-dire sur la capacité d'organisation rationnelle de l'être humain.
Or, l'homme est composé d'affectivité tout
autant que de rationalité.
Ne mettre l'accent que sur la seconde, c'est donc le mutiler, le transformer en machine à produire.
Pour pouvoir satisfaire les rêves de quelques-uns, la technique doit uniformiser les désirs de tous les autres, afin que tous
soient motivés par la même perspective.
N'est-il pas caractéristique que la criminalité augmente autant lorsqu'une société
connait un fort développement technique ? Cela s'explique tout simplement par le fart qu'elle fait apparaitre des désirs
communs, que seuls quelques-uns peuvent réaliser.
De la même façon, elle conduit à une marginalisation de ceux qui ne présentent pas ces qualités d'organisation et
d'efficacité, depuis les vieillards que l'on place en centre spécialisés, au lieu de bénéficier de leur savoir, jusqu'aux chômeurs
que l'on transforme en statistiques, en passant par les jeunes et les handicapés.
Comme en outre, elle augmente notre
efficacité individuelle, elle permet de se passer de tous ces gens « indésirables », alors qu'auparavant leur différence même
était un atout supplémentaire pour la survie.
L'évasion et le rire que produisait autrefois le fou, nous le trouvons aussi bien dans le cinéma ou les substances chimiques : alors pourquoi continuer à accepter nos fous ? La somme de connaissances dont
disposaient les vieux, nous les trouvons stockés dans la mémoire de nos ordinateurs ou les lignes de nos bibliothèques : alors pourquoi s'embarrasser de nos vieillards ? Autant les enfermer dans des asiles, où ils seront efficacement soignés dans
déranger le fonctionnement normal et efficace de notre société ...
et finalement, qu'ils soient d'accord ou non avec un tel isolement n'est pas notre problème.
Ce manque de solidarité des sociétés modernes est à mettre sur le compte de la quête d'efficacité menée par la technique.
Cette quête permanente est d'ailleurs déstabilisante pour tous, même pour ceux qui semblent bénéficier du systéme.
En effet, nous l'avons vu, plus encore que les autres animaux, l'homme a besoin de s'orienter dans l'existence, de s'adapter à son environnement.
Or, s'orienter nécessité des repères relativement stables ; il est impossible de s'adapter à quelque chose.
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