Commentez cette pensée de Nietzsche: « Ce n'est pas le doute, c'est la certitude qui rend fou. » ?
Publié le 18/01/2004
                            
                        
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                                                                    En effet, ce qu'il est pertinent de retenir du propos deDescartes dans le cadre de la réflexion qui nous occupe ici, c'est que l'on ne saurait pousser le doute à sonparoxysme, puisqu'alors, il s'autodétruit : pour douter, il faut être.
                                                            
                                                                                
                                                                    Par contre, la certitude, elle,  peut êtretotale, on peut, point  par point bâtir  un édifice conceptuel  grâce auquel on pense avoir  établi des véritésindiscutables.	
C.
II.
                                                            
                                                                                
                                                                                   	La certitude rend fou parce qu'elle est sans recours	 	
Il est par ailleurs intéressant de relever que le thème de la folie fait une apparition – remarquée, bien que ce nesoit qu'au détour d'une phrase – dans l'argumentation cartésienne : douter que mon corps ne soit réellementmien, ce serait ressembler aux fous qui « assurent constamment qu'ils sont rois, lorsqu'ils sont très pauvres ;qu'ils sont vêtus d'or et de pourpre lorsqu'ils sont tout nus ; ou s'imaginent être cruches ou avoir des corps deverre ».
                                                            
                                                                                
                                                                    Or, ces exemples de fous que nous donne Descartes ne sont précisément pas des exemples où le foudoute	 de ce qui est indubitable, mais où il est 	certains	 de quelque chose de faux.
                                                            
                                                                                
                                                                    C'est bien là toute la clé de	ce paradoxe  : la  certitude  n'est pas la vérité,  c'est un rapport  psychologique  à ce  qu'on  connait  qui secaractérise par le fait que nous ne pouvons mettre en doute la véracité de ce que l'on pense.
                                                            
                                                                                
                                                                    L'exemple dufanatique peut être tout à fait éclairant : le fanatique est celui qui vit dans la certitude absolue, qui refused'exercer sa raison en l'appliquant à un domaine.
                                                            
                                                                                
                                                                    Fanatique est celui qui a éliminé certains thèmes (religieux,politiques  ou autres)  du champ  de la réflexion  : selon  lui, certaines  thèses ne demandent  plus à êtreinterrogées ni évaluées.	
A.	
La pensée de Nietzsche met en évidence quel est le véritable rôle de la pensée et la fonction du doute : lapensée saine est une pensée dynamique qui avance continuellement, qui interroge plus qu'elle n'affirme, et ledoute lui sert de cordon sanitaire : celui qui ne doute plus est menacé de folie précisément parce qu'il n'utiliseplus  sa raison,  et c'est  visiblement  cela qui menace  le plus  la raison.
                                                            
                                                                                
                                                                     La certitude  rend fou parce  qu'elleconsiste en une certaine sclérose de la raison.
                                                            
                                                                                
                                                                    Mais il convient de remarquer que Nietzsche n'a pas opposé lacertitude à l'incertitude, mais bien au doute ; or, l'incertitude est un état de fait subi par le sujet pensant,tandis que le doute peut être méthodique, et surtout volontaire : le doute implique une maitrise par le sujet desa propre pensée, puisqu'il peut douter même en dépit des apparences ou de ce que la pensée lui dicte.	
B.	
Cette citation s'inscrit résolument dans la critique nietzschéenne de la vérité telle qu'elle apparait par exempledans la première section de 	Par delà bien et mal	, où Nietzsche interroge la valeur de la vérité : pourquoi la	vérité  serait supérieure  à la non-vérité, au  mensonge ?  Il dénonce  la vérité en tant qu'idole et demanded'assumer la possible absence radicale de vérité.
                                                            
                                                                        
                                                                    Cette section, il l'intitule « les préjugés des philosophes », cequ'il veut donc montrer c'est avant tout que la valeur même de la vérité n'a jamais été justifiée ni démontrée.Nietzsche oppose à cette notion une autre, celle d'interprétation.
                                                            
                                                                                
                                                                    Il y a donc une véritable relativisation de lanotion de vérité dans la philosophie nietzschéenne.	
C.
 	
III.	             	   Pourtant, on pourrait dire que le doute absolu rend également fou : certitude et doute	n'ont-ils pas tous deux un rôle essentiel dans l'usage de la raison ?	 	
Le propos de Nietzsche est pourtant bien provoquant, et il nous semble difficile de tenir une position qui écartela certitude  et prône  le doute  (à supposer  que c'est  bien ce que  Nietzsche  affirme).
                                                            
                                                                                
                                                                    En effet,  commeDescartes  l'a démontré,  le doute  absolu  est impossible,  car il se  détruit  lui-même.
                                                            
                                                                                
                                                                     Ce qu'on  appelle  lepyrrhonisme est bel et bien une position absurde, puisque dire que rien n'est certain, c'est affirmer que l'on estcertain de cela au moins, et c'est donc affirmer le contraire de ce qu'on affirme.
                                                            
                                                                                
                                                                    C'est ce que Pascal met enévidence dans sa pensée 131 (éd.
                                                            
                                                                                
                                                                    Lafuma) en affirmant « qu'il n'y a jamais eu de pyrrhonien effectif parfait ».Autrement dit, on ne saurait douter de tout.	
A.	
Autrement dit, un certain degré de certitude est nécessaire.
                                                            
                                                                                
                                                                    Cette certitude n'est-elle pas un début de folieque nous  partageons  tous nécessairement  ? on  pourrait,  afin de résoudre  ce dilemme  distinguer  deuxdomaines : le domaine de l'action et celui de la connaissance.
                                                            
                                                                                
                                                                    Du point de vue de la connaissance, on pourraitdire, conformément à ce qui a été énoncé précédemment, que la certitude constitue une mort de la pensée.Mais du point  de vue de l'action, il  n'en reste pas moins que nous  devons fixer des règles aussi sûres quepossibles afin d'agir  et de  ne pas  rester  dans l'expectative.
                                                            
                                                                                
                                                                     Mais alors,  la certitude  n'est plus un étatpsychologique subi, mais voulu : nous serions tous semblable à l'homme perdu dans la forêt tel que nous ledécrit Descartes dans 	La morale par provision	, et la seule solution pour être sûr de pouvoir sortir de la forêt,	c'est bel et bien de choisir une direction au hasard et de s'y tenir coute que coute.
                                                            
                                                                                
                                                                    Celui qui doute pourra errerindéfiniment dans la forêt parce qu'il change continuellement dans direction, celui qui choisit de se tenir à uneseule et unique direction n'est pas assuré de prendre le chemin le plus court, mais il est assuré de s'en sortir.	
B..
                                                                                                                    »
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