Commentez cette parole de Spinoza: "Le philosophe ne pense à aucune chose moins qu'à la mort et sa philosophie est une méditation de la vie, non de la mort" ?
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
comme elle est l'absurdité définitive, celle qui annule les significations...
Il (l'homme) pense y échapper et seconsoler du présent qui meurt en courant à l'avenir qu'il voit naître — ou, si son caractère en décide autrement, ens'enchantant de la croyance à la persistance du passé.
Ce qui meurt ne serait pas vraiment détruit.
Il serait«devenu» du passé, restant réel sans être perçu ...»
PROBLÉMATIQUE
Philosopher c'est, disait Gratry, « chercher l'essentiel inaperçu », rompre par l'effort de réflexion avec l'attitudenaturelle de dispersion et de divertissement qui nous fait prisonniers du futile et de l'accessoire.
Seulement où estl'essentiel et où est l'accessoire ? L'essentiel est-il cette vie que nous laissons échapper sans la goûterprofondément ni l'utiliser pleinement ou bien l'essentiel est-il la mort à laquelle nous pensons d'ordinaire si peu ? Lalucidité philosophique sera-t-elle méditation de la mort, ou au contraire dédain de la mort et pleine conscience de lavie ? Spinoza opte nettement pour la seconde alternative : « La philosophie est une méditation de la vie, non de lamort ».
Qu'en faut-il penser ?
« Philosopher , c'est apprendre à mourir »
La mort est notre plus universelle condition ; nous y allons tous aussi certainement, et la vie n'est qu'un longmourir.
Puisque philosopher, c'est apprendre à bien vivre, c'est aussi apprendre à bien mourir.
Je dois mourir ; je ledis ; je le sais ; mais est-ce que je vis ce savoir ? Le but de la vie, c'est le plaisir ; la peur de la mort nous le gâche.
C'est qu'elle vient à son heure, non à la nôtre.Le but est de ne pas se donner de peine de la mort ; le meilleur moyen n'est pas de ne pas s'en occuper.
Bien vivre,c'est aller, dans le sens de la vie, vers la mort ; c'est la voie du sage.
Le vulgaire, qui n'y pense pas, y va àreculons, terrorisé et abattu quand elle approche.
Savoir qu'on doit mourir nous libère de tous les maux ; qu'est-ce qui importe à celui à qui mourir n'importe pas ?Montaigne multiplie les arguments de sagesse ; mais n'est-ce pas paroles en l'air ? Parler est un savoir emprunté ; levrai savoir est celui qui se vit.
« Je remets à la mort l'essai du fruit de mes études.
Nous verrons là si mes discoursme partent de la bouche, ou du coeur.
»
"Le philosophe ne pense à aucune chose moins qu'à la mort et sa philosophie est une méditation de la vie,non de la mort" SPINOZA
La philosophie de Spinoza est une ontologie optimiste : pour lui perfection et réalité, vertu et puissance sont mêmechose.
Le bonheur absolu existe ici-bas dans la communion intellectuelle avec l'essence des choses.
Ni l'erreur, ni lemal, ni la mort n'offrent la moindre prise à une pensée positive ; ils ne se définissent qu'à partir de l'Être dont ilssont défaut, privation ; la pensée de la mort est contradictoire, c'est une pensée folle car prétendre penser le rienrevient très exactement à ne rien penser ; chacun de nous est une essence particulière affirmative qui tendobstinément à « persévérer dans son être »; et il faut bien comprendre que ce « conatus », cet effort vers laplénitude de l'existence n'a rien à voir avec un peureux et douillet instinct de conservation.
LE « CONATUS » OU EFFORT DE L'ÊTRE.
Rien ne va au néant.
Le nihilisme est absurde : « Nulle chose ne peutêtre détruite, sinon par une cause extérieure » (Éthique, III, P.
4).L'essence d'une chose est une manifestation limitée de l'essence de laCause de soi, qui est puissance infinie : « Tant que nous considéronsseulement la chose elle-même, et non les causes extérieures, nous nepouvons rien trouver en elle qui puisse la détruire » (ibid.).De là découle la proposition 6, justement célèbre: « De par son être,chaque chose s'efforce de persévérer dans son être » L'être est désird'être.
« Cet effort, rapporté à l'esprit seul, s'appelle volonté ; mais quand il serapporte à la fois à l'esprit et au corps, il s'appelle tendance (appetitus); la tendance n'est donc rien d'autre que l'essence même de l'homme ;de cette essence découlent nécessairement les actes qui servent à saconservation; et ainsi l'homme est déterminé à les faire.
De plus, entrela tendance et le désir (cupiditas) il n'y a nulle différence, sinon que ledésir se rapporte généralement aux hommes dans la mesure où ils sontconscients de leurs tendances et c'est pourquoi on peut donner la définition suivante : Le désir est la tendance accompagnée de la conscience de cette même tendance.
Ainsi ilest établi que nous faisons effort en vue de quelque chose, la voulons, tendons vers elle, la désirons, non pasparce que nous jugeons qu'elle est bonne : au contraire, nous jugeons qu'une chose est bonne parce que nousfaisons effort pour l'avoir, la voulons, tendons vers elle et la désirons.
» (Éthique, III, P.
9, Sc.).
Ainsi le désir,reconnu par toute la philosophie comme le dynamisme immanent à la nature, exprime directement l'essence del'être fini, ou puissance finie.
Précurseur de Nietzsche et de Goldstein, sur ce point, Spinoza nous dit que « l'homme libre recherche spontanément.
»
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