Commentaire – Hegel - « On dit volontiers : mon vouloir a été déterminé par ces « mobiles », circonstances, excitations et impulsions. »
Publié le 13/06/2014
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Dégagez l'intérêt philosophique de ce texte de Hegel en procédant à son étude ordonnée:
On dit volontiers : mon vouloir a été déterminé par ces « mobiles «, circonstances, excitations
et impulsions. La formule implique d'emblée que je me sois ici comporté de façon passive. Mais, en
vérité, mon comportement n'a pas été .seulement passif ; il a été actif aussi, et de façon essentielle,
car c'est mon vouloir qui a assumé telles circonstances à titre de mobiles, qui les a fait valoir comme
mobiles. II n'est ici aucune place pour la relation de causalité. Les circonstances ne jouent point le rôle
de causes et mon vouloir n'est pas l'effet de ces circonstances. La relation causale implique que ce qui
est contenu dans la cause s'ensuive nécessairement. Mais, en tant que réflexion, je puis dépasser
toute détermination posée par les circonstances. Dans la mesure où l'homme allègue qu'il a été
entraîné par des circonstances, des excitations, etc., il entend par-là rejeter, pour ainsi dire, hors de
lui-même sa propre conduite, mais ainsi il se réduit tout simplement à l'état d'essence non libre ou
naturelle, alors que sa conduite, en vérité, est toujours sienne, non celle d'un autre ni l'effet de
quelque chose qui existe hors de lui. Les circonstances n'ont jamais sur l'homme que le pouvoir qu'il
leur accorde lui-même.
HEGEL
Plan
Introduction
I - Passivité et activité
II - Causalité et réflexion
III - Négation et affirmation de la liberté
Conclusion
Introduction
La justification par le poids des circonstances extérieures est souvent avancée
par un individu lorsqu'il lui est reproché de ne pas avoir agi comme il l'aurait dû :
c'est « l'occasion, l'herbe tendre, quelque diable aussi me poussant « qu'évoque La
Fontaine... Mais peut-on accepter de telles explications, sinon excuses ? Si j'admets
qu'une détermination agit sur moi, quelle idée ai-je de moi-même? Et cette idée
correspond-elle à ce que je suis par définition ?
«
C'est donc le vouloir qui décide initialement de la signific ation des
circonstances et du rôle qu'elles pourront avoir sur mon comportement.
II - Causalité et réflexion
Lorsque j'affirme que ma conduite résulte de circonstances, je fais un
mauvais usage de la relation de causalité.
En effet,
1) la causalité impl ique l'idée d'une nécessité complète (il n'y a pas
d'exception à la loi, rien ne peut empêcher la conséquence d'apparaître) ;
2) au contraire, « la réflexion » est toujours capable de « dépasser » la
détermination dont je prétends qu'elle s'applique sur m on comportement.
On rencontre ici un point fondamental : la pensée d'un sujet est par nature
supérieure à tous les événements (aussi bien externes qu'internes), parce qu'elle est
mise à distance, et diffère l'efficacité des choses.
Cette réflexion est l' indice de l'homme comme essence libre, c'est -à-dire
comme doté d'une liberté essentielle par rapport à tout donné immédiat (en
particulier de la nature).
III - Négation et affirmation de la liberté
Se protéger d'une accusation en faisant référence aux ci rconstances, c'est
d'abord rejeter sa responsabilité.
Mais du même coup, c'est nier son essence libre et se mettre au même rang
que les phénomènes naturels qui, eux sont bien déterminés par la causalité de la
sorte, je trahis l'essence de l'homme en moi : Hegel affirme semblablement qu'un
artiste qui renoncerait à créer librement pour imiter servilement un modèle naturel
renonce à la liberté fondamentale de l'esprit.
II y a là une sorte de « mauvaise foi »
sartrienne : je renonce à ma liberté quand cela m' arrange (momentanément), alors
qu'en fait c'est toujours mon vouloir qui a choisi d'attribuer une signification
déterminante aux circonstances.
C'est ainsi parce que l'homme commence par attribuer un pouvoir aux
circonstances qu'il peut ensuite faire allu sion à ce même pouvoir pour justifier ses
actes.
Conclusion
L'analyse de Hegel (dont les conséquences morales sont évidemment
capitales : revendication nécessaire d'une responsabilité totale sur ce que je fais)
transpose un point de vue kantien (différen ce entre l'empirique et le rationnel dans
l'homme) en termes d'essence, et souligne ainsi l'importance de la liberté de l'esprit
relativement à tout phénomène..
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